Droits des femmes et libertés : un appel conjoint de la société civile et des partis    Le gouvernement examine les équilibres financiers du budget 2026 au service du développement national    UGTT, fonction publique, mouvements sociaux …Les 5 infos de la journée    10e Conférence mondiale sur la Fatwa: l'Algérie insiste sur la formation d'un mufti éclairé face à l'IA    Situation humanitaire à Gaza : une coalition de 26 partenaires appellent à agir en toute urgence    Nouvelle Porsche 911 Cup : plus puissante, plus légère, plus durable    Egypte, USA et Qatar relancent la médiation pour une trêve à Gaza    Vague de feu en Grèce : évacuations et appels à l'aide internationale    Le mufti Hichem Ben Mahmoud : l'IA doit rester en harmonie avec l'islam et la charia    Le Club africain recrute Saidou Khan pour deux saisons    La société française Voltalia investit dans un projet solaire de 130 MW à Gabès    Caravane Soumoud : le gouvernement prépare des poursuites après des révélations d'irrégularités    La CAF valide trois stades tunisiens pour les compétitions africaines 2025-2026    Tataouine : Des licenciements massifs après l'interdiction de la sous-traitance ?    L'Union des travailleurs de Tunisie dénonce des propos « diffamatoires » contre Kaïs Saïed    Eruption du volcan Merapi en Indonésie : un panache de cendres de 1600 mètres signalé    Fête de la femme : Plus de 300 Tunisiennes mises à l'honneur    Assomption 2025 à Tunis : quand chrétiens, musulmans et juifs prient ensemble pour la paix    Expo Osaka 2025 : la Tunisie célèbre sa culture et la femme tunisienne avec le spectacle « Asayel »    Inscriptions scolaires 2025-2026 : payez à distance facilement avec le Wallet e-Dinar    Najwa Karam, Soleil de la chanson arabe signe un retour triomphal au Festival Carthage 2025    La Galaxy Watch contribue à améliorer le bien-être grâce à son capteur innovant : explications    Yasser Jradi : un an après sa disparition, Tunis et Gabès lui rendent hommage    Kairouan : suspicion d'enlèvement d'une adolescente de quatorze ans    Saisie de 36 kg de cannabis    Un séisme de magnitude 5,3 secoue le nord des Philippines    Tunisie : quand le prix ne suffit plus à attirer les voyageurs...    Illuminez Chaque Moment : OPPO Dévoile le Tout Nouveau Reno14 F 5G avec Photographie Flash IA et Design Sirène Irisé    De cœur à cœur, Rafik Gharbi ressuscite Aznavour dans le spectacle "Hier encore" à Boukornine    Kamel Lazaar - Fadhel Jaziri, par son exigence et sa créativité, a hissé la Tunisie au rang des grandes scènes internationales    Le métro de Tunis à l'arrêt complet suite à une panne majeure    Scandale des orientations universitaires au Kef : un élève soupçonné de falsification encourt jusqu'à 80 ans de prison    Lotfi Riahi : "Jusqu'à 700 dinars pour équiper un élève en primaire"    Tunisie – Orientation post-bac : 8 mandats de dépôt dans une affaire de piratage choquante    Nouveau Code du travail : précisions de Hafedh Laamouri sur les droits à l'indemnité    Tunisie 13 août 2025 : Femmes, exil, climat, vieillesse... le recensement d'une rupture    L'Algérie rejette une nouvelle mesure française visant ses diplomates    Attention : mer dangereuse et risques d'orages en Tunisie aujourd'hui    Le Festival de Hammamet fait ses adieux à Fadhel Jaziri, sur les notes de paix du groupe malien Ngoni Ba    Rania Toukebri : « Les missions lunaires font partie de ma vie »    FIC2025 – "Ballets folkloriques du monde" : un voyage scénique au cœur des traditions musicales de dix pays    Le champion du monde tunisien Ahmed Jaouadi rejoint l'Université de Floride pour préparer les JO 2028 à Los Angeles    Assassinat d'Anas Al-Sharif et les journalistes d'Al Jazeera à Gaza : la SNJT dénonce un crime contre la presse    Décès de Fadhel Jaziri    Moez Echargui, champion à Porto, lance un appel : je n'ai pas de sponsor !    Décès de Me Yadh Ammar, une illustre figure du barreau, de l'université et de la société civile    Ahmed Jaouadi : Un accueil présidentiel qui propulse vers l'excellence    Tunisie Telecom rend hommage au champion du monde Ahmed Jaouadi    







Merci d'avoir signalé!
Cette image sera automatiquement bloquée après qu'elle soit signalée par plusieurs personnes.



Hella Ben Youssef : La conquête de la citoyenneté politique des femmes tunisiennes
Publié dans Leaders le 08 - 03 - 2022

Sans doute convient-il de rappeler que, l'histoire des femmes en politique ne commence, non pas avec l'acquisition du droit de vote et d'éligibilité et du code du statut personnel, ni ne se finit avec l'obtention de la parité intégrale pour l'ensemble des scrutins locaux et nationaux. Dès les tous premiers instants de la lutte de libération nationale, les femmes tunisiennes vont participer aux diverses actions et manifestations prenant autant de risques que les hommes. Des figures emblématiques surgiront de ces luttes. Elles s'imposeront dans la vie politique et sociale de la toute jeune République. Avec le temps le mouvement féministe va s'affirmer sous des formes diverses (notamment associatives) tout à la fois en cherchant à consolider ses acquis et à élargir et renouveler ses revendications.
Nonobstant de réelles avancées, il y a encore du chemin à faire avant d'obtenir une citoyenneté pleine et entière, comme en témoigne les atermoiements autour de la question cruciale de l'héritage. Plus généralement certaines problématiques restent entières : celle du refus de toute violence, d'intégrité corporelle, celle d'autonomie (à travail égal, salaire égal), ou bien encore celle du droit d'accès à la propriété foncière (particulièrement dénié en milieu rural). Bien sûr on pourrait aussi évoquer les tâches ménagères et domestiques dont la répartition demeure très déséquilibrée (plusieurs études le confirment).
De nombreuses lois ont tenté d'affirmer le principe d'égalité. Néanmoins des inégalités (de fait et non de droit) socioéconomiques significatives entre hommes et femmes perdurent. Comme le rappellent régulièrement les institutions internationales, celles-ci posent non seulement un problème de justice mais aussi d'efficience économique. La situation est d'autant plus paradoxale que les parcours scolaires et universitaires des femmes n'ont cessé de s'améliorer, pour dépasser le plus souvent ceux des hommes.
Il est vrai qu'au même titre que dans d'autres pays, y compris certains très avancées, le poids des traditions, la prégnance du patriarcat et des stéréotypes encore largement intériorisés freinent les possibles avancées.
Si les conventions internationales, chartes et autres déclarations officielles confirment que la protection et la promotion des droits des femmes incombent aux gouvernements, force est de constater que cela ne suffit pas ! Seule l'action (sous diverses formes et modalités) donne un ancrage solide à la réalisation de l'égalité des sexes. Dit autrement et brutalement, ce n'est pas par la parole raisonnable que l'on change les mentalités, mais bien par l'action déterminée et audacieuse sur les divers terrains d'enjeux que l'on peut espérer modifier les comportements (et par là les mentalités). Il faut donc transformer les droits des femmes de « fait à accomplir » en « fait accompli » !
A titre d'illustration « le droit à la ville des femmes » thématique qui rencontre un franc succès dans de nombreux pays d'Amérique du Nord et Latine comme en Europe, adopte une démarche qui se focalise sur l'action des pouvoirs locaux pour faire face aux différents enjeux. Une approche donc, qui vise à l'intégration de la dimension de genre dans les politiques municipales, la représentation des femmes et leur mise en réseau et, surtout, la participation des femmes à la définition, la mise en œuvre et le suivi des stratégies municipales sur l'égalité des genres. Cela pourrait apparaitre comme un vœu pieux compte tenu des moyens financiers réduits dont dispose nos municipalités. Il reste que beaucoup de financements tant directs (bailleurs institutionnels) qu'indirects (ONG) seraient bien plus efficients en s'appuyant sur une autorité locale, en prise directe avec les réalités, mais également responsable et redevable. Toujours est-il que l'instance « municipalité » pourrait être ce lieu privilégié de l'expression comme du traitement des demandes de citoyennes qui ont le plus grand mal à trouver un lieu d'écoute, mais aussi une sorte de relais à leur désir d'implication et d'engagement.
Tout cela n'exige pas nécessairement d'importants moyens financiers. Bien au contraire l'échelon municipal peut souvent trouver des solutions concrètes à des situations concrètes, qui autrement resteraient sans réponse, faute d'interlocuteur adéquat. Cet échelon apparait d'autant plus nécessaire et utile à mesure que l'on se rapproche de petites agglomérations ou localités rurales. En l'absence parfois ou de l'insuffisance des services publics, les municipalités peuvent pallier certaines carences en faisant jouer des solidarités qui en d'autres circonstances ne se seraient pas exprimées : La garde des enfants en bas âge lors des campagnes de récoltes agricoles, l'organisation de transports de courtes distances pour les ouvrières agricoles. Les instances locales peuvent accélérer l'obtention d'une couverture sociale aux femmes des périphéries urbaines et zones rurales en les aidant dans leur processus d'inscription (plateforme mobile Ahmini). A l'évidence, les municipalités notamment les plus petites en milieu péri-urbain ou rural peuvent être un relais efficace de dispositions législatives telles que la loi sur « l'économie sociale et solidaire ». Les services municipaux peuvent alors jouer un rôle d'intermédiation décisif entre les divers prestataires: les associations et ONG désireuses de déployer des actions de lutte contre l'analphabétisme et l'illettrisme des femmes (30%), les dispensateurs de fonds (microcrédit et BTS) d'accompagnement de projets. Mais aussi, la possibilité pour ces municipalités d'offrir des formes de garanties de type caution solidaire ou de prêt d'honneur !
De manière plus générale les femmes des périphéries et de la ruralité jouent un rôle décisif tant en matière de sécurité alimentaire que de préservation de l'environnement (protection contre la désertification, l'entretien des forêts). Si elles constituent bien, à près de 80% de la main d'œuvre forestière, seules 15% d'entre elles disposent d'un statut professionnel.
Outre le fait qu'il s'agit d'une injustice intolérable, c'est également une grossière erreur économique. Avec le dérèglement climatique, il faut s'attendre à des alternances de périodes de pluies diluviennes et de sécheresse qui n'ont plus de rapport direct avec la saisonnalité (régularité des saisons). Disposant de savoir-faire informels, les femmes de la ruralité sont tout à faire en mesure de participer à la prévention de catastrophes naturelles en se constituant en brigades d'intervention sur le modèle des dispositifs de la protection civile ou de mutuelle de service. Il conviendrait à ce titre de les doter des formations techniques adéquates (gestion des retenues d'eau, drainage, périmètres irrigués, régénération des forêts..) sanctionnées par un statut professionnel.
A titre de conclusion provisoire, Lutter pour l'émancipation des femmes et singulièrement pour celles les plus défavorisées ne se réduit pas à un impératif éthique, mais constitue bel et bien une exigence incontournable de l'amélioration du bien-être économique et social.
De fait, la citoyenneté pleine et entière et donc politique ne saurait s'envisager sans une réelle et complète citoyenneté économique et sociale !
Hella Ben Youssef
Vice présidente de l'internationale socialiste des femmes pour la région méditerranéenne nord sud


Cliquez ici pour lire l'article depuis sa source.