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Abdelaziz Kacem: Echéances de mars, déchéance d'un printemps
Publié dans Leaders le 11 - 03 - 2022

J'aime le mois de mars, en dépit des antécédents qui entachent son nom. Les Romains, nos ennemis intimes, avaient beau profiter du retour des beaux jours, pour reprendre leur sport favori, la guerre, et le shakespearien «Méfiez-vous des ides de mars» a beau hanter encore le restant de ma superstitieuse adolescence, j'aime le mois de mars, le mois des recommencements.
Voici donc revenir le temps où Dame Nature, en dépit des outrages, se prépare à se refaire une beauté, voici revenu le mois des grandes célébrations. Heureux qui, comme ceux et celles de l'autre rive, fêtera «mars, le mois des mots». Oh, que j'aimerais, moi qui ai amassé tout un attirail de vocables, miser sur l'éphémère auquel le Printemps des poètes confère sa créance des lettres. L'éphémère ! Le proverbe, ne dit-il pas : fleur marsière ne tient guère.
Mars, le mois des mots ! Bel appel au dire. J'ai publié, il y a bientôt trente ans, un essai dont j'ai fait une sorte de défense et illustration de mes langues et qui avait, en son temps, retenu l'attention des critiques. J'y suis revenu, pensant aux anachronismes que le temps impose, immanquablement, aux œuvres théoriques. À ma grande surprise, je l'ai trouvé plus que jamais actuel, en ses aspirations. Non pas qu'il soit prémonitoire ou prophétique, mais que notre présent a pris beaucoup de retard sur notre passé récent. Ne pourrions-nous pas recommencer notre vingtième siècle, époque furieuse, traversée par une invincible volonté de vivre, de recyclage, de mise à niveau ?
J'assiste, aujourd'hui, effaré par une paupérisation matérielle et intellectuelle généralisée. Le langage aussi en fait les frais. La crise économique, une fois confiée à des mains propres et compétentes, finira par être résorbée. En revanche, je ne vois pas comment remédier aux poisons qui rongent l'éducation et la culture. Là, tous les maux sont dans les mots. Un vocabulaire défaillant, lourdement théologisé, avec une sémantique biaisée.
Cela fait plus de dix ans que l'on se gargarise de mots que l'on a pris soin de désignifier. Le plus galvaudé d'entre eux, le plus malmené, le plus dénaturé est sans doute le vocable de KARAMA. Il a suffi de l'accoler à une sinistre Instance dite de Vérité et de Dignité ou à un avatar des sinistres Ligues de défense de la révolution, pour qu'il perde toute référence éthique.
Nous parlons d'une catastrophique décennie de gestion islamiste directe. En vérité, il faut remonter aux années quatre-vingt du siècle passé, quand les obscurantistes ont réussi à ouvrir une brèche dans le système Ben Ali, qui, au prétexte de couper l'herbe sous les pieds des «Frérots», a consenti à introduire l'appel à la prière à la Radiotélévision et fermé les yeux sur la prolifération du qamis et de la barbe chez les «dhoukours» et du hijab chez les «inaths», pour désigner les deux sexes par leurs attributs charaïques. Ces concessions tactiques, faites un peu partout dans le monde arabe, ont conduit à de cuisantes défaites stratégiques.
Il revient à l'économiste, au sociologue, au psychologue, au psychiatre, chacun en sa spécialité, d'évaluer les dégâts et de proposer les remèdes appropriés. Moi, je fais partie des maîtres de langue. Ce que je constate, c'est que nous sommes de moins en moins outillés pour raisonner, pour convaincre et pour participer au dialogue des cultures. Outre notre déficit en matière de sens, le pouvoir sectaire qui s'est emparé du pays a quasiment détruit notre aptitude à l'universel. En Europe, la situation, due au comportement séparatiste de nos immigrés, est dramatique. Le vivre-ensemble, que seule la laïcité occidentale préconise et assure, est bigotement décliné par les conquérants de Lampedusa.
Mais, il convient de le noter, c'est cette même Europe laïque qui nous a vendu le Printemps dit arabe et vanté un islam compatible avec la modernité, alors même qu'elle a fait, à ses dépens, le constat que la majorité des musulmans qui y vivent se sont montrés irrémédiablement réfractaires à toute forme de gouvernance rationnelle. Ses anthropologues l'expliquent sans ambages : la demande de Dieu évacue la démocratie.
La démocratie islamique est un songe occidental plus pernicieux que le mensonge de Colin Powell à l'ONU, à propos des armes irakiennes de destruction massive.
Les Frères musulmans sont bousculés dans la plupart des pays arabes. En France, en Grande-Bretagne, en Allemagne, au Benelux, l'Organisation est toujours au mieux de sa forme. L'UOIF continue de développer son juteux commerce halal, et aux croyants qui font leurs prières dans les rues et parfois sur l'autoroute d'instiller la conviction qu'ils sont, aux yeux du Seigneur, supérieurs aux mécréants qui les hébergent.
En Tunisie, Cheikh Rached crâne encore, tout en sachant qu'Ennahdha est en perte de vitesse, en raison du bilan calamiteux de sa gestion, ses nuisances, ses malversations, ses manipulations. Mais il peut compter sur l'ancrage endémique d'un islamisme nourri de mythes, de fausses lectures, de prescriptions apocryphes.
Mars me rappelle à ses échéances. Le mardi 8, célébration de la Journée internationale des femmes, selon l'appellation officielle des Nations unies, et autrement appelée Journée internationale des droits des femmes. Cette manifestation perdure. La lutte continue.
Tout au long du XXe siècle, le monde arabe, dans sa partie utile, du moins, le Maghreb et le Mashreq, la lutte a été âpre. De l'initiateur égyptien Qacem Amin au libérateur Habib Bourguiba, en passant par Tahar Haddad, le martyr de la cause, sans oublier ces femmes arabes courageuses qui avaient rejeté le voile, en tant que harem ambulant, ce long combat était connu sous le nom de Ma'rakat al-soufour wa l-hijab (bataille du dévoilement et du voile). Car, on ne le répètera jamais assez, le mouvement féministe arabe a été d'abord une véhémente revendication du droit à la visibilité.
Aujourd'hui, nos vénérables savants, nos ulémas, nos Copernic, nos Galilée, ès ablutions, campent sur leurs positions : les femmes musulmanes ne manquent de rien. Maudits soient les déviants qui suivent les kuffars, débaucheurs de leurs femmes impudiques.
Que fêtons-nous, le dimanche 20 mars ? Quelle indépendance ? La situation en appelle à la décence. La Tunisie est perdue de dettes, Shylock est à ses trousses. Un ami me disait, hier encore: il nous faut un autre Bourguiba pour libérer la patrie de sa propre progéniture. Moi, je me remémorais mon Aragon :
Rien n'est jamais acquis à l'homme. La vie est un étrange et douloureux divorce...
Et puisque le printemps des poètes est là, même si le cœur n'y est pas, chantons:
Quel cadeau qu'un refrain en des temps sans romance
Peu propice est le vent au voilier de nos vœux
J'attends la fine ouïe pour passer aux aveux
Il est dur de finir là où tout recommence


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