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Le Fleuve détourné
Publié dans Leaders le 15 - 02 - 2012

Souvenez-vous du 14 janvier de l'an dernier sur l'avenue Habib Bourguiba et des slogans scandés alors par tant de jeunes femmes et d'hommes de tous âges et conditions. Liberté et Egalité sociale étaient, avec le déjà célébrissime ‘'Dégage'', les mots d'ordre qui revenaient le plus souvent sur les lèvres des milliers de gens massés devant le Ministère de l'Intérieur. Remontons encore au fameux 17 décembre 2010 et à l'immolation par le feu de Mohamed Bouazizi à Sidi-Bouzid. Le sentiment d'une dignité bafouée, l'exigence de davantage de respect et le droit à un travail étaient à l'origine du geste fatal par lequel le martyr a donné le signal de la Révolution.
Or, à quoi assistons-nous aujourd'hui ? Plus d'un an après ces événements catalyseurs, quel visage présente notre pays ? Qu'est-ce qui préoccupe le plus nos concitoyens ? De quoi débattent-ils principalement ? Avons-nous vraiment gagné davantage en Liberté, Dignité et Egalité sociale ? Critiquer ouvertement nos gouvernants sans plus craindre autour de nous des oreilles indiscrètes suffit-il à nous rendre fiers de notre Révolution ? Nous exprimer librement sur les ondes et sur les sites sociaux à propos de l'actualité en pointant du doigt les responsables de notre mal être doit-il être considéré comme le but ultime pour lequel tout un peuple s'est soulevé ? Ces précieux acquis eux-mêmes ne nous semblent-ils pas déjà dangereusement menacés un an à peine seulement après qu'il nous a été donné d'y goûter ?
Agressions verbales et physiques violentes contre des journalistes et enseignants. Procès contre Nesma et menaces contre des artistes. Disciplines artistiques et enseignement de la philosophie déclarés haram ainsi que des cours perturbés dans des lycées et facultés par des éléments étrangers au monde enseignant comme aux facultés des Lettres de Sousse et de la Manouba, aux lycées d'Ettadhamen, Le Kram et Fatouma Bourguiba à Monastir ; tournée de conférences dans tout le pays d'un adepte déclaré de l'excision ; des salafistes actifs et déterminés qui tiennent le haut du pavé a Sidi-Bouzid et à Hergla, à Sejnane et à Jendouba ; Des armes qui parlent à Rouhia et à Bir Ali Ben Khlifa en laissant morts et blessés derrière elles ; un ministre de l'Enseignement Supérieur qui, au lieu de faire appliquer la loi, se dérobe à son devoir et se défausse sur le doyen de la Faculté de la Manouba qu'il incrimine d'avoir créé inutilement la crise du niqab alors que celui-ci ne cherchait qu'à préserver la saine relation pédagogique. Ce faisant, M. le Ministre accorde l'impunité à de dangereux fauteurs de troubles responsables de dégradations de biens publics et de voies de fait sur des fonctionnaires lors de l'exercice de leur fonction.
Voila le visage que la Tunisie présente aujourd'hui au monde après avoir offert une tout autre image de notre peuple au lendemain du 14 janvier 2011 ! Les libertés académiques sont en danger ! Nos établissements scolaires, nos enseignants et nos élèves au primaire et au secondaire sont en danger ! Les libertés de créer et d'informer sont en danger ! Les droits et libertés accordés par le Statut du code personnel, dont le système de l'adoption, sont en danger ! Les mères célibataires sont en danger ! Nos femmes, mères et sœurs non voilées, dans la rue, sont en danger !
Est-ce pour arriver à un pareil et triste bilan que nous avons chassé un vil dictateur ? Que fait le gouvernement, ministre de l'Intérieur en tête, pour faire appliquer les lois en vigueur et mettre hors d'état de nuire tous ces fanatiques religieux qui troublent chaque jour davantage l'ordre public ? Mais, au fait, y a-t-il réellement une sérieuse volonté politique de mettre fin à ces transgressions manifestes, quotidiennes et répétées de la loi ? A qui profitent finalement ces délits et crimes contre la nation dans son ensemble ? Ne cherche-t-on pas par cette conduite si déroutante à créer chez nos concitoyens une accoutumance progressive à une talibanisation de fait de la société tunisienne ? Le parti religieux au gouvernement n'encourage-t-il pas les salafistes réactionnaires et même fascistes par son silence complice, son laisser-faire et l'impunité qui en découle ? Les débats sur le niqab, l'excision, Persépolis et la liberté de création, ou encore les tortures de la géhenne dont nous menace M. Sadok Chourou, ne sont-ils pas pour le pouvoir en place pain béni ? N'occupent-ils pas l'opinion publique qui perd de vue, entre temps, les magouilles qui ont pour cadre le Palais du Bardo et l'hégémonie que prétendent exercer les députés du parti conservateur avec leurs complices du CPR et d'Ettakol qui ont laissé leur âme dans cette alliance ?
Bref, ne nous faudrait-il pas reconnaître, enfin, que la Révolution du 14 janvier est en passe de nous être confisquée ? Qu'aux idéaux de la Révolution on est en train d'en substituer d'autres, d'essence religieuse, étrangers à nos traditions et qui ont pour nom wahabisme, salafisme, niqab, excision, j'en passe et des meilleurs ? Il y a là une trahison que le romancier algérien Rachid Mimouni, évoquant la Révolution algérienne, a résumée par une métaphore : le fleuve détourné ! Accepterons-nous cette trahison de nos idéaux, ce viol de notre Révolution, cette confiscation de nos libertés et cette main mise sur notre Tunisie ouverte, moderne, tolérante, égalitaire et démocratique ?
M.R.B.
Professeur Université de Carthage
Auteur de Histoire de la littérature du Maghreb. Littérature francophone.


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