La HAICA (haute autorité indépendante de la communication audiovisuelle), vient de publier un rapport qui en dit long sur les mutations que connaît le paysage médiatique et les implications sur le moyen et le long terme sur le paysage politique. En effet, nous apprenons que petit à petit, Ennahdha fait son nid et qu'elle accapare 24,5% de présence dans le paysage médiatique audiovisuel, de très loin devant Nida Tounès relégué à 16% à peine et le Front populaire à hauteur de 12,5%, que faut-il en déduire ! La stratégie de la centrale islamiste est en train de porter ses fruits et de creuser un véritable trou dans une citadelle, autrefois hostile aux islamistes, qu'est la scène médiatique. On est bien loin de cette « presse de la honte » (Sahafet, ou Iîlam Al Aâr) écorchée vive par cette banderole immense accrochée aux murs du « Sheraton » et cette tente de mobilisation permanente de jour et de nuit avec un sit-in de la junte des « barbus nationaux », de toutes les périphéries de Tunis ! Ghannouchi, d'abord, puis Lotfi Zitoune, son fils spirituel et son premier conseiller politique, ont fait un virage de 180 degrés, avec la presse devenue « l'amie » inconditionnelle des islamistes « réformateurs » et nouvellement promoteurs d'une Tunisie « civile et démocratique » avec « référentiel islamique » séparant la prédication de l'activité partisane. Un programme difficilement déchiffrable pour les communs des mortels que nous sommes et pour les musulmans sans histoires comme ma mère et mon père, qui ont fait le haj et observé leurs prières, mais sans jamais imposer quoi que ce soit à leurs enfants ni à leurs voisins. La tactique a été admirable de lucidité et de réalisme. Les nouveaux ténors de Ennahdha ont commencé par cibler les « grandes gueules » parmi les modernisants rationnalistes, les « ilmaniines », comme on les appelle du côté de la « Choura » de Montplaisir, pour soit les rendre au silence, soit les pousser à moins d'animosité à l'égard des islamistes. Un travail de contact permanent où le tact a été mêlé à une sorte de diplomatie « fraternisante » et apaisée, a été opéré de la façon la plus discrète, mais aussi la plus efficace. Après tout que demande le peuple ! Un parti islamiste libéral qui évoluerait vers les valeurs de la démocratie chrétienne en Europe mais où Jésus cèderait la place à notre Prophète vénéré Mohamed (SAWASALM) ! Or, sans arriver à ce stade aussi tranché de séparation de la politique de la religion, Ennahdha, a donné des signes d'évolution appréciable en la matière, bien que cette approche de séparer la prédication (Adaâwa) de l'activité partisane ne convainc personne et il faut être un naïf bien taré par la croire ! Par ailleurs, on s'est attelé, à infiltrer le paysage audiovisuel et même de la presse écrite par les « amis » et sympathisants du parti islamiste. Ceci était déjà très visible et très perceptible sur les chaînes de T.V nationales. Mais, un saut qualitatif a été fait en direction des chaînes jadis « rebelles » à la pénétration islamiste politique. D'où ces revirements spectaculaires de chaînes comme « Nesma » et « El Hiwar Ettounsi », où les programmes sensibles sont noyautés systématiquement par la présence des propagandistes d'Ennahdha et dérivés. Ça ne rate jamais et aucun débat à ce jour politique social, économique et bien sûr identitaire, sur ces chaînes n'a enregistré l'absence d'un « porte-parole » nahdhaoui ou assimilé. C'est l'encadrement parfait de ces débats éreintants et qui commencent à subir l'érosion du déjà vu, entendu, et du revu et réentendu ! Pour ma part, je ne peux que tirer le chapeau aux architectes de la pénétration médiatique d'Ennahdha. Rendons à César ce qui est à César ! Reste au parti islamiste, le grand défi de la reconquête du pouvoir à l'horizon 2020. L'atout médiatique est déjà une percée dans ce sens, mais les islamistes peuvent déjà compter sur un support non négligeable : L'erreur des adversaires. En effet, si le pays continue à subir la décomposition du « Nida » et le harcèlement syndical et politique de la « Rue », les Tunisiens excédés, voteront Ennahdha à coup sûr, en 2020, surtout, si celle-ci continue sa politique de charme et son approche libérale, identitaire et économique ! Une « Nahdha » libérée du carcan de la « Chariaâ » rétrograde et contraignante, une Nahdha qui ne fait plus peur aux Tunisiennes et aux Tunisiens attachés à l'Islam libéral et modéré de leurs ancêtres et aux acquis de la modernisation bourguibienne, sera très dur à battre en 2020... ça, je peux, dès maintenant, vous l'assurer ! La lassitude des Tunisiens... Messieurs les agitateurs de tout bord... c'est votre pire ennemi... Et les Tunisiens en ont ras le bol de vos fantasmes ! K.G