Vue la conjoncture politique de l'époque, Béji Caïd Essebsi a réussi, en 2014, à remporter l'élection présidentielle et à en faire en sorte que son mouvement, Nidaa Tounes, soit le gagneur des législatives et ce grâce un grand capital sympathie qu'il a cumulé depuis son retour sur la scène politique nationale en 2011. En effet, il a habitué ses sympathisants à des discours et à une façon de parler qui leur rappelaient les vieux discours de feu Habib Bourguiba et leur procuraient une certaine rassurance perdue. Toutefois, et depuis son ascension à la magistrature suprême, l'ancien président de Nidaa Tounes a dû changer de ton pour adopter les discours officiels et politiquement correctes. Toutefois, ses nouvelles fonctions ne l'ont pas empêché de déraper de temps en temps. A titre de rappel il avait insulté – à l'occasion de la marche internationale contre le terrorisme organisée, en mars 2015, au Bardo – un journaliste Français et, plus récemment, il s'est gratuitement attaqué à deux journalistes Tunisiens qui couvraient le triste accident de train de Djbel Jloud. Que cela soit à cause de la première ou de la seconde raison, le président de la République est en perte de vitesse, du moins, au niveau des sondages d'opinion. Cela expliquerait peut-être ses deux récentes interventions médiatiques. La première a eu lieu à l'occasion de la nouvelle année et la seconde au cours d'une interview accordée aux quotidiens La Presse et Al Chourouk. Lors de son discours de vœux adressés aux Tunisiens, le président de la République a opté pour un format relativement long – à peu près quinze minutes de parole – où il est revenu sur presque tous les dossiers de l'actualité avec un langage simple, en dialecte tunisien et, surtout, en employant les figures de styles qui lui sont propres. En quinze minutes, Béji Caïd Essebsi a réussi à décrire presque toute la situation générale du pays en offrant aux Tunisiens ce qu'ils souhaitent tant : l'espoir. Bien qu'il ait gardé le même ton pour les deux entretiens, le président de la République a été amené à parler de quelques sujets qui fâchent. Le premier concerne bien évidemment le chaos dans lequel baigne Nidaa Tounes depuis bientôt deux ans. Essayant de garder sa neutralité, BCE n'a cependant pas réussi à le faire : en évoquant le comité de sauvetage (dirigé par son ancien directeur de cabinet, Ridha Belhadj), il s'est demandé si les dirigeants de ce comité cherchent à sauver le mouvement ou leurs propres personnes. En tout cas, et pour Béji Caïd Essebsi, toutes les parties prenantes aux conflits du Nidaa sont responsables et Hafedh, son fils, ne vient pas de la planète mars (une expression déjà entendue auparavant...). Pour ses relations avec le chef d'Ennahdha, Rached Ghannouchi, BCE a assuré qu'ils cohabitent dans un respect total et mutuel et que cela ne veut pas pour autant dire qu'ils ont, chacun, renoncé à leurs principes et à leur ligne éditoriale. Pour le reste, Béji Caïd Essebsi a tenté de faire bonne figure et de garder un style inspirant, optimiste et rassurant, à la bonne vieille méthode qui était celle de Bourguiba...