Le Conseil de l'Europe, le ministère de la Fonction Publique et de la Gouvernance et l'Instance nationale de lutte contre la corruption (INLUCC) ont organisé conjointement, hier à Tunis, un colloque au cours duquel ils ont présenté les résultats du diagnostic du cadre législatif et institutionnel anti-corruption de la Tunisie. Environ 70 recommandations ont été formulées par les experts nationaux et ceux du Conseil de l'Europe dans le cadre du diagnostic anti-corruption. Diagnostic présenté en présence de médias, de parlementaires, de diplomates et de personnalités de haut niveau,à sqavoir MM. Abid Briki, Ministre de la Fonction Publique et de la Gouvernance, ChawkiTabib, Président de l'INLUCC et Ivan Koedjikov, représentant du Conseil de l'Europe. Pour les panélistes un tel diagnostic vise à renforcer le système anti-corruption de la Tunisie et couvre une panoplie de thématiques dont notamment : la police, les marchés publics, le système judiciaire, les parlementaires et le financement des partis politiques et des campagnes électorales, le droit pénal, la confiscation et les immunités à l'égard des enquêtes, poursuites et sanctions de corruption ou encore la coopération interinstitutionnelle et internationale. Contexte et objectif du diagnostic La préparation du diagnostic général du cadre législatif et institutionnel anti-corruption fait partie de l'une des principales activités du Projet «Promotion de la bonne gouvernance, lutte contre la corruption, le blanchiment d'argent et le terrorisme» (Projet SNAC 2-Tunisie) qui, rappelons-le, est mené dans le cadre du Programme Vers une gouvernance démocratique renforcée dans le Sud de la Méditerranée» (Programme Sud 2), financé par l'Union européenne et mis en œuvre par le Conseil de l'Europe. Le processus de préparation a fait l'objet de plusieurs ateliers depuis 2015, durant lesquels les autorités tunisiennes, les experts nationaux et le GRECO (Groupe d'Etats contre la corruption, Conseil de l'Europe) ont établi une feuille de route pour la suite du processus de diagnostic. Et c'est mardi dernier que les recommandations et les conclusions ont fait l'objet d'un débat. Le diagnostic vise non seulement à analyser la conformité du cadre actuel anti-corruption avec les standards internationaux - en particulier les standards du Conseil de l'Europe-, mais aussi à contribuer au renforcement des capacités institutionnelles et à l'identification des mesures concrètes pour renforcer le système de prévention et de lutte contre la corruption en Tunisie. Situation du cadre institutionnel Le rapport de recommandations du GRECO a d'abord évoqué la nécessité de doter l'INLUCC des ressources nécessaires et suffisantes (financières et humaines) pour lui permettre de s'acquitter de ses missions avec efficacité et s'assurer qu'elle fonctionne en toute indépendance, d'encourager et de soutenir les besoins d'expertise et de spécialisation du personnel de l'INLUCC et de rendre opérationnels les organes de l'Instance tels que prévus par la loi. Le diagnostic appelle, notamment à mettre en œuvre la disposition de l'article 130 de la Constitution en adoptant la loi organisant l'Instance de la bonne gouvernance et de la lutte contre la corruption (IBOGOLUCC). Les autorités ont été invitées à associer davantage les entreprises dans la prévention et la lutte contre la corruption, en prenant en considération les législations étrangères récentes de prévention de la corruption au sein même des entreprises. Un appel a été de même lancé au gouvernement tunisien à accélérer le processus de la mise en place de la Cour constitutionnelle, de donner les moyens nécessaires permettant son fonctionnement adéquat ; et de garantir son indépendance et son impartialité effectives Par ailleurs et afin de prévenir contre la corruption dans le corps des magistrats, le rapport a insisté sur la nécessité de revoir le dispositif de déclarations de patrimoine applicable aux juges et aux procureurs, la mise en œuvre des textes législatifs qui garantissent la séparation effective des pouvoirs et de la mise en place d'un Conseil Supérieur de la Magistrature qui soit indépendant et autonome. Prévention de la corruption au sein des forces de sécurité intérieure Le secteur de la sécurité intérieure a été également examiné. Il a été recommandé à ce propos de réévaluer les règles relatives au recrutement et à la promotion des forces de sécurité intérieure en clarifiant et réduisant les prérogatives trop larges et discrétionnaires et en assurant la cohérence et le respect des critères fondés sur le niveau et la compétence selon des procédures objectives et transparentes. Appliquer des tests d'intégrité et des contrôles de vérification des antécédents lors des procédures de recrutement et de promotion des agents des forces de sécurité intérieure ont été aussi suggérés D'autre part et afin d'améliorer la transparence des activités des forces de sécurité, les experts insistent sur la mise en place de mesures appropriées, d'introduire des lignes directrices professionnelles régissant les rapports avec les médias et de prendre des mesures visant à rendre compte de la gestion du budget par objectif sur la base des programmes arrêtés par le Ministère de l'intérieur. Administration publique et corruption Le rapport a inclus des recommandations relatives à la lutte contre la corruption dans le secteur public. A cet effet, les experts appellent à la mise en place de l'Instance d'accès à l'information ; de dispenser une formation aux fonctionnaires responsables de l'accès à l'information et à leurs adjoints chargés de répondre aux demandes d'information en vertu de la nouvelle loi et d'engager la responsabilité des fonctionnaires en cas de non-respect des exigences de la loi susmentionnée. Le gouvernement tunisien a été aussi appelé à promouvoir le droit d'accès à l'information pour le grand public et la société civile. Le rapport final adopté sera rendu public à l'issue d'un commun accord le Conseil de l'Europe et le gouvernement.