L'événement est passé presque inaperçu, trois semaines auparavant et mérite qu'on s'y arrête. La « Karraka » de la Goulette était délivrée d'un envahissement des squatteurs qui l'avaient changée, en toute liberté, en lieu d'habitation de fortune ! Au lendemain de la révolution de 2011. Le ministre des affaires culturelles et le gouverneur de Tunis étaient sur les lieux pour constater les dégâts, in situ. Un vrai massacre commis froidement par des personnes qui ignorent la valeur historique de ce monument. Des mesures nécessaires ont été prises pour que la « Karraka », qui date du seizième siècle, retrouve son aura et sa fonction d'espace culturel comme elle le fut durant des décennies. Elle accueillait, en effet et durant de longues années, le festival méditerranéen du théâtre et le festival d'été de la Goulette. Pour cela, des études techniques sont en train d'être réalisées pour entamer les travaux inhérents à sa sauvegarde et sa restauration. Et on doit s'estimer heureux que les remparts n'aient pas été détruits par les occupants. Par contre, des constructions anarchiques sont venues se greffer au paysage. Des nids de pigeon symétriques qui ont servi de logis pour des dizaines de familles qui en ont été délogées. Le geste est salutaire, car sur d'autres lieux, rien n'a été entrepris, à l'image des Jardins de Kheireddine, jouxtant le Palais Kheireddine, Musée de la Ville de Tunis. Et là, l'anachronisme sourie toujours. Car la Municipalité de Tunis s'est vue privée d'un lieu qui lui appartient pourtant et à travers elle, le Festival de la Médina qui y donnait des spectacles durant le mois de Ramadan. Un pas est aujourd'hui franchi pour que nos lieux historiques ne soient plus renvoyés aux calendes grecques. Et faut-il rappeler que la première restauration de la « Karraka » avait eu lieu au milieu des années quatre vingt du siècle dernier, quand un musée du bélier y avait été créé par feu Ali Saied et que des combats de béliomachie y avaient été organisés aux alentours, pour faire revivre ce sport spécifique aux quartiers populaires. Ce dernier avait abandonné son projet, n'ayant pu trouver, au fil des années, les encouragements nécessaires pour la pérennité de son projet. Il avait même eu l'intention, comme il nous l'avait confié, de reloger son musée dans un pays européen ! Aujourd'hui, la Karraka a retrouvé ses droits à une vie décente. Elle appartient à l'Etat et au peuple tunisien, en général. Attendons de voir sa résurrection totale. L'avenir lui appartient, désormais.