Posséder un petit nid bien à soi est désormais un doux rêve peu accessible sous nos latitudes. En dépit du ralentissement de la croissance économique, les prix de l'immobilier ont poursuivi leur envolée. Selon les estimations de la Chambre syndicale nationale des promoteurs immobiliers, rattachée à l'Union Tunisienne de l'Industrie, du Commerce et de l'Artisanat (UTICA), les prix de l'immobilier ont augmenté d'environ 8% % en moyenne par an au cours des cinq dernières années en 2013. Le prix moyen du mètre carré pour les appartements neufs et anciens a atteint 1501 dinars dans le gouvernorat de Tunis, d'après les dernières données du site spécialisé Argus Immo relatives au mois d'avril 2017. De façon, générale les prix ont particulièrement flambée dans les villes situées sur les côtes Nord et Ouest du pays. Ainsi le prix moyen du mètre carré pour les appartements a atteint 1381 dinars à l'Ariana, 1043 dinars à Ben Arous, 1265 dinars à Nabeul et 1259 à Sousse, selon la même source. Au niveau des régions intérieurs et dans le Sud du pays, les prix sont beaucoup plus doux. Le prix du moyen mètre carré n'est, en revanche, que de 514 dinars à Sidi Bouzid, 685dinars au Kef, 785 dinars à Kasserine et 638 dinars à Gabès. Dans certains quartiers huppés de la capitale, comme les Berges du Lac, la Cité Ennasr ou encore la Marsa, les prix du mètre carré d'un appartement de haut standing varient entre 2300 et 4000 dinars. Conséquence : les prix de l'immobilier sont devenus très déconnectés du pouvoir d'achat des citoyens. Une récente étude réalisée par le ministère de l'Equipement a révélé le ratio global prix du logement/revenu annuel du ménage est de 11,7 à l'échelle nationale. En d'autres termes, chaque ménage doit dépenser en moyenne 11,7 fois l'équivalent de son revenu annuel pour acquérir un logement. Ce ratio cache, cependant, de fortes disparités entre les régions. Dans la région du Grand Tunis, le ratio prix du logement/revenu annuel s'élève à entre 16,7% et 20%. Ce ratio n'est cependant que de 14,6% au Nord-est, et de 9,8% au Sud-ouest. Le ratio moyen du prix du logement par rapport au revenu du ménage pour lequel l'accessibilité au logement est jugée bonne est un ratio de 1 à 5, c'est-à-dire que le ménage investit en moyenne dans l'acquisition de son logement l'équivalent de 1 à 5 fois l'équivalent de son revenu annuel. Méventes Les promoteurs immobiliers s'accordent actuellement à dire que le secteur traverse une mauvaise passe. Environ 25% des biens immobiliers neufs en Tunisie ne trouvent pas des acquéreurs, d'après les estimations de la Chambre syndicale nationale des promoteurs immobiliers. Le stock total de logements invendus dépasse actuellement les 500.000 unités à l'échelle nationale, en raison notamment d'une inadéquation entre l'offre et la demande. La majorité des promoteurs opèrent en effet dans les grandes villes côtières et produisent plutôt des logements de haut standing à hauteur de 65%, des logements économiques (33%) et presque pas de logements sociaux (2%). D'autre part, les principales institutions publiques intervenant dans le secteur, en l'occurrence l' l'Agence Foncière de l'Habitat (AFH), la Société Nationale Immobilière de Tunisie (SNIT) et la Société de Promotion des Logements Sociaux (SPROLS) peinent à satisfaire la demande pour les logements sociaux et économiques. Les promoteurs immobiliers expliquent la douloureuse distorsion entre les prix pratiqués et le pouvoir d'achat des ménages par la hausse des prix des terrains constructibles, l'augmentation du coût de la main d'œuvre et la révision à la hausse des prix des matériaux de construction, les promoteurs dénoncent l'envolée des prix des terrains constructibles. Afin de redynamiser le marché et d'améliorer l'accès au logement, les promoteurs immobiliers suggèrent la baisse du taux d'autofinancement exigé par les banques de 20 % à 10 % de la valeur du logement. Ils appellent aussi les banques à prolonger la durée de remboursement de 20 ans à 30 ans, et à augmenter la base de calcul de la capacité d'emprunt remboursement à 50 % des revenus de l'emprunteur au lieu de 40 % seulement actuellement. Les experts recommandent, par ailleurs de consolider le rôle des opérateurs publics intervenant dans le secteur de l'habitat et redéfinir le rôle de l'Etat d'une fonction de tutelle à une fonction d'Etat actionnaire. Ils proposent aussi d'imposer aux promoteurs privés la réservation d'un quota minimum de logements sociaux et économiques.