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Chronique des arts: L'artiste plasticienne franco-tunisienne, Sonia Said, expose à Paris
Publié dans Le Temps le 24 - 06 - 2018

Sonia Said est une artiste franco-tunisienne née en France, mais qui a été éveillée aux arts plastiques à l'Institut Supérieur des Beaux-Arts de Tunis ou ISBAT. Cette double appartenance n'a jamais dérangé Sonia, au contraire, elle l'assume et trouve même que cette hybridité n'est pas nécessairement source de déséquilibre et d'anormalité, elle pourrait même être à l'origine d'une créativité certaine.
Sonia Said ne cherche pas non plus à atteindre l'équilibre coûte que coûte. Une trop grande quiétude formelle ne l'inspire pas, elle travaille dans l'incertitude et trouve que cela est potentiellement créateur. La pratique artistique qu'elle développe surtout dans ses toiles ne cherche pas à effacer les dichotomies, les différences, les oppositions... au contraire.
Sonia Said fréquente les signes et les symboles, les lignes et les couleurs avec leurs mouvements, leurs touches spécifiques, leurs trajectoires étalées ou ramassées... Elle trace les dédales des dessins, crée des formes rondes, des voulûtes, des droites, des infinités de lignes, des bulles, des ballons... Elle ne rechigne pas à figurer la forme et se plaît à réaliser des figurations humaines ou animalières en dehors des normes classiques ou même modernes, quelque fois à peine esquissées ou même géométriques. Elle sait également travailler la couleur, elle arrive même à dépasser la planéité des couleurs vers leur différenciation, leur volume.
Sur le plan esthétique, Sonia Said rejoint en apparence les pratiques contemporaines de l'art telles qu'elles se déroulent dans cette période post-moderne en France, surtout au début de ce XXIème siècle. Elle prend ses distances par rapport à tous les formalismes et surtout par rapport à ces nouveaux formalismes du lettrisme, de la calligraphie arabe et de l'arabesque, en Tunisie. Mais, elle se place également dans ses figurations, assez loin de toutes les représentations orientalistes ou néo-orientalistes. Sonia se place à égale distance du passé, qu'il soit issu du passé de l'académisme ou de celui de la tradition picturale ‘arabo-musulmane'.
Elle a choisi délibérément de nager entre deux eaux, et c'est son choix.
La peinture qu'elle développe n'est pas une peinture historique, ni narrative, et si elle rencontre l'histoire, cette rencontre n'est que fortuite, voir arbitraire.
Sonia n'a pas fait la grosse tête pour devenir peintre, elle l'est devenue simplement, en ces temps de la postmodernité, et ne se réfère apparemment qu'à son expérience esthétique personnelle et à ses propres impulsions et motivations, d'où l'intérêt de sa démarche.
C'est pour cela qu'elle développe une peinture fondée sur des démarches essentiellement personnelles, presque introspectives et intimistes, sans se référer à des modèles ou à des orientations idéologiques, mais se laisse guider par ses propres choix.
Tout au plus l'artiste sollicite-t-elle des modes d'expression d'ordre éclectique qui ne mobilise pas des positions esthétiques tranchées.
Malgré ses recherches très contemporanéistes, les installations qu'elle développe ne sont pas éphémères, elles sont plutôt effectives, sont accrochées concrètement aux murs et ne disparaissent pas à la lumière. Elles continuent à se référer au réel, à la couleur, à la représentation, à la ligne, à la verticalité, à l'horizontalité, se jouent du trop sérieux, restent vagabondes et ludiques, infinies, et refusent toujours cependant de revenir au jeu de la lumière et de l'ombre, se place au niveau des graphismes sans épaisseur, fantasques, gestuels, très rarement créateurs de perspective.
Les toiles, franchement abstraites, réduisent leur composition à des oppositions fugaces entre des couleurs violentes.
A travers tout cela, Sonia essaye d'établir et de créer en souplesse son système pictural où l'abstraction, la figuration, le symbolisme expressionniste et l'hybridité continuent à se jouer de toutes les catégories distinctives.
Le système figuratif auquel Sonia se réfère va de la suspension de formes géométriques aux formes circulaires, et même aux projections mécaniques brutes, toutes indécises. Les silhouettes fragiles, presque ludiques, ‘maladroites', presque naïves, sont suspendues et voisinent les représentations d'insectes, les formes zoomorphes, expressionnistes et les extravagances ne négligent pas les silhouettes de scarabées, d'oiseaux, de poissons, d'hippocampes, à peine esquissées.
Une grande variété iconographique s'installe dans l'hybridité et le fantasme nous rappelle ainsi la mémoire de nos imaginaires d'enfant, sans rivages et sans limites.
Sonia adopte le monde et le laisse l'interpréter, elle ne fait que rendre visible ce monde.
L'univers peint de Sonia Said est projeté comme espace énigmatique incertain, mais en quête d'une représentation neuve, voir inédite.
Est-ce cela le système pictural auquel aspire Sonia Said ? Peu importe la réponse, c'est la démarche qui compte.
Celle justement qui permet à l'artiste de consigner ce qui fait l'époque, aujourd'hui et maintenant, de cette peinture légère, frivole, ludique, qui ne refuse pas d'être elle-même éclectique et qui fait du désordre qui l'habite sa propre grandeur.
Sonia sort donc des sentiers battus de la joliesse de la peinture, des pseudos engagements conceptuels passéistes, du modernisme tranquille. Elle se jette dans la contemporanéité picturale actuelle, concrète et quotidienne sans faire de compromis.
Elle déroute le spectateur que nous sommes. Nous, qui sommes habitués à trouver le sens d'un certain acte de peindre.
En fin de compte, que cherche Sonia Said à dire à travers toute cette expérience ? Le projet d'exposition que Sonia se prépare à monter à Paris pourrait constituer une réponse à cette question.
Cette exposition personnelle compte toujours des tableaux et semble sur le plan pictural amplifier toute sa démarche antérieure et ceci du point de vue des couleurs dominantes, des formes invoquées et des éléments représentés.
Sonia garde le tableau comme réceptacle essentiel de sa démarche, elle y élabore un fond en général bleu ‘aquatique' sur lequel se construit une scénographie mouvementée d'éléments hybrides de toutes sortes, d'insectes aux mille pattes, de représentations sous forme de silhouettes d'autres animaux, d'hippocampes, surtout d'un nombre incalculable de représentations de petits ou gros poissons et d'yeux éparpillés sur la scène picturale, que nous ne saurions identifier.
L'hybridité octroie à la scénographie un caractère fantastique, qui ajoute à la peinture de Sonia Said une dimension poétique et lyrique. Sa peinture reste à la limite de cette peinture truculente et liée à une vision intime des choses.
La peinture de Sonia Said gagne en systématique et développe déjà un monde plastique propre à elle, même s'il est encore en filigrane... ou encore en pointillé. Son maintien confirmera les choix et les démarches proposés par Sonia Said.
L'émergence de ce système pictural sera significative parce qu'elle représente une sorte de convergence artistique culturelle imparable et recherchée par les temps qui courent pour maintenir le pont entre un art concret, ‘'bien en chair' et lié à la vie et un art des installations, des temps éphémères ou virtuels.
Cette convergence est maintenue dans les tableaux de Sonia Said, elle continue à donner à son art une ‘matérialité' et un ancrage qui la rendent proche de l'art actuel.
Le tableau, en tant que fenêtre sur le monde, continue chez Sonia Said à être ouvert sur lui-même avec ses vacarmes, ses odeurs et ses senteurs.
Sonia Said saura-t-elle réconcilier le monde de nos certitudes matérielles et celui des incertitudes de nos options et de ces modes passagères ?


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