La Fête de l'arbre: Un investissement stratégique dans la durabilité de la vie sur terre    Nouvelles directives de Washington : votre état de santé pourrait vous priver du visa américain    Enseignement en Tunisie: une seule séance?    Kais Saied charge l'ingénieur Ali Ben Hammoud de trouver des solutions à la crise environnementale de Gabès    Le moringa: Un arbre parfait pour la nutrition, la santé et l'environnement    Météo : fortes pluies et vents puissants attendus sur plusieurs régions    Ras Jedir : près de 1,5 million de dinars en devises saisis dans une tentative de contrebande    Justice tunisienne : 1 600 millions pour lancer les bracelets électroniques    Budget économique 2026: Cinq grands choix nationaux    Louis Schweitzer, ancien PDG de Renault, est mort à 83 ans    Les hormones: ces messagères invisibles qui orientent nos jugements intellectuels à notre insu    Tunisie : Le budget de la Culture progresse de 8 % en 2026    L'Université de la Manouba organise la 12è édition du symposium interdisciplinaire "Nature/Culture"    Qui est Ghazala Hashmi, la musulmane qui défie l'Amérique ?    Qui est le nouvel ambassadeur de Palestine en Tunisie, Rami Farouk Qaddoumi    216 Capital investit dans Deplike : la startup à l'origine de l'app Chordie AI ou le Duolingo pour guitare    Météo en Tunisie : pluies éparses, températures en baisse    Secousse tellurique en Tunisie enregistrée à Goubellat, gouvernorat de Béja    Slaheddine Belaïd : Comment faire oublier Bourguiba    Derby de la capitale : l'Espérance exige des arbitres étrangers pour éviter la polémique    Networking Event – Green Forward : Promouvoir une économie vert et circulaire en Méditerranée    L'innovation durable d'Epson au service de la région META-CWA    Avec Kia, roulez plus, dépensez moins    Météo en Tunisie : ciel nuageux, pluies attendues fin de journée au nord    Syrine Chaalala et Mohamed Gastli propulsent la Tunisie au cœur de la révolution des protéines d'insecte    Hafida Ben Rejeb Latta: Une fille de Kairouan    Suspension du Bureau tunisien de l'OMCT pour un mois : les activités à l'arrêt    Le Prix Goncourt 2025 remporté par Laurent Mauvignier pour son roman La Maison vide    Je n'étais plus la Ministre du Bonheur'' : la confession bouleversante d'Ons Jabeur''    Les billets du Derby désormais disponibles au Guichet    La Tunisie prépare une réduction du nombre d'établissements publics pour plus d'efficacité    La plus grande centrale solaire photovoltaïque de Tunisie bientôt opérationnelle à Sbikha    Voyager en Tunisie, trésors archéologiques et douceur de vivre : un héritage fascinant à découvrir selon GEO    Zohran Mamdani crée la surprise et s'empare de la mairie de New York    Elyes Ghariani: Comment la résolution sur le Sahara occidental peut débloquer l'avenir de la région    Mondher Khaled: Le paradigme de la post-vérité sous la présidence de Donald Trump    Congrès mondial de la JCI : la Poste Tunisienne émet un timbre poste à l'occasion    Attirant plus de 250 000 visiteurs par an, la bibliothèque régionale d'Ariana fait peau neuve    Le CSS ramène un point du Bardo : Un énorme sentiment de gâchis    Ligue 1 – 11e Journée – EST-CAB (2-0) : L'Espérance domine et gagne    New York en alerte : décès de deux personnes suite à de fortes précipitations    Taekwondo : la Tunisie s'impose parmi les quatre meilleures nations    Lettre manuscrite de l'Emir du Koweït au président Kaïs Saïed    Le "Djerba Music Land" en lice pour les Heavent Festival Awards 2025: Une reconnaissance internationale pour le festival emblématique de l'île des rêves    Match Espérance de Tunis vs Club Bizertin : où regarder le match de la ligue 1 tunisienne du 30 octobre    Kharjet Sidi Ali Azzouz : bientôt inscrite au patrimoine culturel immatériel    Wafa Masghouni sacrée championne du monde de taekwondo des -60 kg en Chine    Ciné Jamil El Menzah 6 ferme définitivement ses portes    







Merci d'avoir signalé!
Cette image sera automatiquement bloquée après qu'elle soit signalée par plusieurs personnes.



«Une aiguille nue», par Nuruddin Farah
Publié dans Le Temps le 13 - 06 - 2020

Condamné à l'exil pendant de nombreuses années, le romancier somalien Nuruddin Farah a élevé à travers son œuvre magistrale d'une quinzaine de romans et d'essais un monument émouvant à la mémoire de son pays natal plongé dans une guerre civile interminable.
La Somalie, le « pays qui est dans ma tête » était déjà le protagoniste de son premier grand roman « Une aiguille nue », paru en 1976. Inspiré d'« Ulysse », ce roman raconte un récit joycien de pérégrinations dans les rues de Mogadiscio, sur fond d'amours perdus et de réflexions sur les heurs et malheurs d'une société somalienne à la dérive. Un classique des lettres africaines post-indépendance à découvrir ou redécouvrir.
Un roman joycien
A « naked needle », traduit en français sous le titre d'Une aiguille nue, est l'un des premiers grands romans sous la plume de l'écrivain somalien Nuruddin Farah. Auteur aujourd'hui d'une quinzaine d'ouvrages de fiction et d'essais, récipiendaire de nombreux prix littéraires à travers le monde, Farah est considéré comme l'un des écrivains anglophones les plus importants de notre temps.
C'est en 1970 que Farah publie son premier roman intitulé Née de la côte d'Adam (Hatier, 1987). On y trouve une dénonciation en règle de la société patriarcale somalienne, à travers le destin d'une jeune adolescente condamnée à un mariage forcé. Dans la foulée, le romancier publia, en 1976, son second roman A Naked Needle. C'est un récit très moderne et expérimental qui raconte un jour dans la vie de son protagoniste, sur le modèle d'Ulysse de James Joyce. D'où ce qualificatif de « roman joycien ».
Un roman politique
Ce roman a défrayé la chronique lors de sa parution en 1976. En fait, ce livre qui propose au premier plan une chronique amoureuse, est aussi un roman politique. L'histoire que Farah raconte a pour cadre la fin de la démocratie en Somalie avec l'installation d'un régime militaire, après le coup d'Etat du 21 octobre 1969 perpétré par le général Siyaad Barré. Tout en donnant à voir les espoirs incertains suscités par cette révolution d'inspiration marxiste-léniniste qui avait secoué le pays après l'indépendance, le roman se signale à l'attention par sa mise en scène ironique de l'aliénation et la décadence de la classe dirigeante somalienne. L'auteur pointe également du doigt la corruption et le népotisme ambiants.
Tout cela n'était pas, comme on peut l'imaginer, du goût des censeurs du régime qui avaient ce jeune écrivain subversif à l'œil depuis plusieurs années. L'éditeur de Farah avait différé la publication d'Une aiguille nue pour éviter des ennuis à l'auteur. Or les ennuis vont commencer dès le lendemain de la publication du livre en 1976. On peut dire que du jour au lendemain le monde de Nuruddin Farah s'était effondré !
L'écrivain se trouvait à l'époque à l'étranger. Le jour où il devait prendre son avion à Rome pour rentrer au pays, il reçut un coup de fil de son frère aîné lui annonçant que son livre avait été saisi et mis à l'index par le régime. Il était désormais ‘persona non grata' dans son propre pays. Selon son entourage, le dictateur Siyaad Barré aurait juré de le réduire en charpie s'il osait remettre les pieds en Somalie. « Oublie la Somalie et tiens- la pour morte et enterrée : ce pays n'existe plus pour toi », tels furent les derniers conseils du grand frère. « Nuruddin Farah n'oubliera jamais ces quelques secondes qui ont fait de lui un éternel errant, une icône de l'écrivain en exil », a raconté l'écrivain djiboutien Abdourahman Waberi dans sa préface à la version française du roman incriminé. Paradoxalement, c'est peut-être cet exil qui va durer 22 ans, qui a fait de Farah cet immense écrivain qu'il est devenu.
Un roman intellectuel et impressionniste
Il n'y a rien dans ce roman qui méritait cette censure injustifiable. D'ailleurs, l'écrivain lui-même a longtemps refusé que son livre soit réédité, estimant qu'il ne constituait pas une réponse adéquate « au défi redoutable posé par un régime tyrannique ».
Pour les critiques, c'était un livre avant tout littéraire, « Une aiguille nue est le premier grand roman d'introspection venant d'Afrique» a-t-on pu lire dans les journaux. Son originalité réside dans sa narration en « stream of consciousness », technique du flux de conscience empruntée à James Joyce, mêlant la pensée intime du personnage principal et les événements rapportés.
Le roman raconte les déambulations du protagoniste Koschin, à travers un espace qui est à la fois mental et géographique. En attendant l'arrivée de sa fiancée anglaise, Nancy, à qui il avait fait autrefois la promesse de l'épouser, le héros erre dans les rues de la capitale, Mogadiscio d'avant la guerre civile. Le récit des amours et des désamours de Koschin est ponctué de constats ironiques et caustiques sur les mœurs de la « privilendgenttzia », la classe dirigeante somalienne aliénée et corrompue.
Roman intellectuel et impressionniste, Une aiguille nue préfigure déjà cette narration à mi-chemin, entre nostalgie et subversion, qui est devenue la marque de fabrique de la fiction de Nuruddin Farah.
Une aiguille nue, de Nuruddin Farah, a été traduit de l'anglais par les éditions L'or des fous.


Cliquez ici pour lire l'article depuis sa source.