Roger Lemerre a déclaré (avant-hier), qu'il avait en tête la sélection qui ira au Ghana. Euphémisme ! Où voulez-vous qu'elle soit ! Ce n'est pas un reproche. Nous respectons sa stature de sélectionneur ; continuerons de croire qu'il rééditera quelques « exploits » de la CAN 2004 et que, de toutes les manières, il ne veut pas quitter la Tunisie sur un échec. Il espère même être reconduit, juin prochain. Si les résultats sont là, pourquoi pas au fait. A moins d'être un Moëz Driss ou un Calderon qui remercient leurs entraîneurs respectifs au lendemain d'un titre de champion, Tahar Sioud et ses adjoints privilégieront, le plus logiquement du monde, la logique des résultats. Mais ce ne sont là que des raisonnements spéculatifs. L'erreur – notre erreur à nous aussi - c'est d'avoir fait de Roger Lemerre le nœud gordien de cette trame d'incompréhensions, d'outrances autour de la sélection. Pour une fois, Slim Chiboub qui met tout en perspective et analyse le fond et la forme des choses, s'en est tenu à un raisonnement rhétorique : « Il y a manipulation, dit-il, du public ». En filigrane, il laisse entendre que les médias y sont pour quelque chose. Mais c'est quand même une responsabilité partagée. Il y a, sans doute, l'effet Jaziri, protagoniste d'un lynchage dans les règles du pauvre Maâloul. De son côté, Maâloul qui a toujours eu des réponses à tout, n'a pas assumé (personnellement) le choix de l'exclure et a renvoyé un joueur bouillonnant à... Lemerre. Si seulement le sélectionneur national avait eu quelques phrases pour expliquer ce choix, toute cette tempête ne se serait pas soulevée. Pourquoi n'a-t-on pas révélé les frasques de Jaziri ? Un monsieur qui parle avec autant d'agressivité devant dix millions de téléspectateurs, serait logiquement capable d'actes tout aussi démesurés. L'entraîneur national a-t-il le droit d'avoir des épanchements affectifs ? Particulièrement, en faveur de Santos ? Oui et non. On sait que les entraîneurs aiment jusqu'à la vénération et détestent jusqu'à la haine. Les joueurs aussi. Lemerre a failli édifier un sanctuaire pour Hatem Trabelsi : quel retour d'investissement ? Aucun. Il n'est guère de Tunisien capable de ne pas aimer la sélection. Il suffirait d'un petit retour de flamme et cette CAN, tous les Tunisiens la vivront dans l'ivresse des joies indicibles. Mais, au fond d'eux-mêmes, les Tunisiens, savent que cette équipe est capable d'aller loin. A bien des égards - et nous l'écrivions hier – elle est peut-être plus compétitive de celle de la CAN 2004. Nous savons aussi que Lemerre est chanceux : chaque fois, la providence lui fait don du sauveur. Du messie. Lors de la CAN de Tunis, ce fut Santos. Cette fois c'est Chikhaoui. Et c'est, sans doute, autour de Chikhaoui que cette équipe doit être rebâtie. Lors d'un interview à notre journal, Bilardo, alors sélectionneur de l'Argentine, déclara ceci : « Le meilleur système de jeu ? Maradona plus 10 ». Lemerre devrait méditer là-dessus.