La Tunisie est, certes, 4ème producteur mondial d'huile d'olive et l'un des premiers exportateurs. Mais, le produit tunisien est quasiment inconnu auprès des consommateurs européens, des deux Amériques et de l'Asie. En effet, moins de 2% de l'exportation sont conditionnés. La majeure partie est exportée à l'état vrac. Elle est, souvent, transformée ou mélangée à d'autres huiles et écoulée sous différentes appellations. La situation est d'autant plus inquiétante que l'oléiculture est en train de gagner de nouveaux territoires pour répondre à une demande d'huile d'olive de plus en plus pressante à l'échelle internationale. Ainsi, et au moment où de nouveaux concurrents émergent, telles la Syrie (46 millions d'oliviers), la Turquie (83 millions d'oliviers), la lointaine Australie et, surtout, l'Argentine ; rien n'est entrepris en Tunisie pour développer l'oléiculture locale et renforcer le positionnement de l'huile d'olive tunisienne sur la scène internationale. Pire encore, le secteur souffre de problèmes latents et évidents qui attendent des réponses : la campagne oléicole est longue (plus de quatre mois contre 2,5 mois pour l'Espagne et l'Italie) ; les olives attendent six jours, avant de passer à la trituration, contre 2,5 jours pour les deux principaux concurrents ; la qualité n'y est pas toujours de mise, car, et à l'exception de l'Office de l'huile, la majorité écrasante des huileries tunisiennes ne disposent pas d'unités d'analyse et de contrôle. En effet, et bien que les Européens - le principal marché de l'huile d'olive tunisienne - apprécient l'huile extra vierge, elle ne figure que dans une proportion d'environ 25% de la production totale tunisienne contre 75% pour les producteurs de l'Union européenne. Ces faiblesses risquent de perdurer si l'on continue à fonctionner au même rythme, avec les mêmes réflexes et le même personnel. Car, et concernant justement ce dernier point, la Tunisie, qui possède un des plus vieux vergers du monde, ne dispose, jusqu'à aujourd'hui, d'aucun centre de formation dans les métiers d'oléiculture.
Les difficultés de conditionnement La promotion de l'huile d'olive conditionnée en Tunisie se place, désormais, comme une option stratégique, en raison de l'importance de la concurrence sur le marché international et l'avance considérable prise par certains pays étrangers concurrents. Ainsi, et selon les prévisions, la part d'huile d'olive conditionnée par rapport à la quantité totale exportée, devrait passer de 1,5 % actuellement à 10 % en 2011, soit une progression annuelle de deux points à partir de 2007. Autrement exprimée, la part d'huile d'olive conditionnée passerait de 2.000 tonnes en 2007 à 13.000 tonnes en 2011. Les unités de conditionnement, actuellement actives, sont au nombre de 24 et possèdent une capacité de 15.000 tonnes mais ne produisent, aujourd'hui, que moins de 2000 tonnes d'huile conditionnée. C'est dire le peu d'en- train pour le conditionnement d'huile faute de positionnement sur les marchés. Pourtant, beaucoup de producteurs commencent à être hantés par le désir de se faire connaître sur le plan international et de conquérir des marchés au seul nom de la Tunisie. Certains ont exprimé le désir d'établir un AOC (Appellation d'origine contrôlée) et de donner au produit une appellation de terroir. Le salut de l'huile d'olive tunisienne passe par ce créneau, ainsi que par celui de l'huile bio, semble-t-il. Mais, cette recherche de qualité ne se passe pas sans difficultés.
Label de qualité D'ailleurs, cette situation a amené la mise en place d'une stratégie nationale axée sur les volets quantitatif et qualitatif pour promouvoir le secteur et mieux se positionner sur les marchés extérieurs, mais pour les professionnels certains points de cette stratégie mériteraient quelques réflexions. Car ses résultats tardent à se concrétiser comme le souligne Mounir, un oléiculteur de la région de Sfax qui produit 45 % de l'huile d'olive tunisienne et qui dispose de plus de la moitié de l'infrastructure nationale du trituration. Ce professionnel soulève les énormes retards accusés par la Tunisie en matière d'institution de label de qualité : « Alors que chez nous, on attend encore le vote de la loi sur le label de qualité ainsi que les décrets d'application y afférents. Au Maroc, une politique de plantation et de différenciation est entreprise tous azimuts. Le Chili, un producteur, sans envergure ni tradition dans le domaine nous a dépassés du point de vue promotion de ses marques et plus particulièrement en matière de conditionnement et de mise en bouteille avec l'impact que l'on sait quant à la maximisation de la valeur ajoutée. Sur un autre plan, la Tunisie compte un dégustateur unique agréé par le Conseil Oléicole International ( COI ), ce qui soulève des interrogations quant à la politique de formation de dégustateurs nationaux agréés à l'échelle mondiale. Nous avons également un seul laboratoire agréé par le COI, alors qu'en France, un tout petit producteur, sans image ( 04 mille tonnes d'huile d'olive, soit l'équivalent de la production d'une seule grosse huilerie à Sfax, ce qui implique les coûts de production les plus élevés du monde), on recense 04 dégustateurs et , au moins, 03 laboratoires agrées par le COI et surtout 07 appellations d'origine contrôlée et ce grâce à une stratégie de valorisation, bien ficelée, du produit français. ».