L'une est l'approche dynamique nécessaire au développement de l'économie moderne. L'autre, un jeu d'acrobatie qui peut mener au vedettariat comme aux plus grandes catastrophes boursières. L'on sait que dans un marché donné, la chaîne de la production et des échanges est solidaire. Encourager par des crédits, des subventions ou des détaxes des secteurs primaires de l'économie, énergie, agriculture, métallurgie, c'est créer en aval une demande impliquant la plupart des autres secteurs, en sorte que toute l'économie s'en trouve dopée. Ce rôle initiateur d'anticipation revient à l'Etat dans un système dirigiste, aux institutions financières privées, dans un système libéral. En pratique, il y a coordination entre le privé et l'Etat, ce dernier intervenant essentiellement par ses directives et le taux de base de la Banque Centrale. Cette anticipation est génératrice d'inflation primaire se répercutant négativement sur le pouvoir d'achat salarial, mais vite rattrapée par les arrangements sociaux et surtout, à moyen terme, par l'augmentation de l'offre de biens de consommation. Le processus exige de la rigueur statistique et beaucoup de sagesse. C'est d'en avoir manqué que sont dues les crises qui ont périodiquement jalonné l'économie mondiale depuis la révolution industrielle. De nombreux facteurs de perversion sont à l'origine de la gravité de ces crises : complaisance bancaire, spéculation outrancière, mais le plus important est en ce qu'elles sont génératrices de leur propre anticipation. Il suffit d'une première chute boursière significative et de quelques commentaires d'agents économiques ou responsables politiques pour que la marche arrière s'emballe. On s'apercevra, par exemple, comme dans les années 30, qu'un jeune homme sans poids financier est parvenu à contrôler des dizaines de corporations. Grâce seulement à une chaîne de complaisances. Plus près de nous, on verra un spéculateur provoquer une crise majeure en Asie. Le F.M.I a été créé pour prévenir les effets dévastateurs de telles crises. On l'a vu intervenir énergiquement en Amérique latine. La création du G.7 n'a pas d'autre explication. Le capitalisme débridé des siècles derniers a montré ses limites. Le dirigisme d'Etat a fait faillite en Europe et en Afrique. Reste le capitalisme dirigé. F.M.I et G.7 lui devaient assurer semblait la pérennité. Le résultat semblait certain, sans toutefois jusqu'à prémunir contre les dérives " mineures " qui se produisent ça et là : crédits hypothécaires à risque aux U.S.A., enfoncement de la Société Générale en France, pour ne citer que les dernières. Que faire ? Presque rien, car la réglementation prudentielle est en place. Que peut-on contre le facteur humain ? L'économie moderne ne peut se développer qu'entraînée par ces locomotives qui parfois déraillent. Anticipation et locomotives, d'accord. Mais que dire de la spéculation boursière effrénée qui simule et virtualise tout, au gré d'agents dont le rôle semble être de spéculer pour spéculer, faussant offres et demandes réelles, prix et jusqu'aux prévisions d'Etat ? Le jeu boursier est nécessaire pour la bonne modulation des échanges. Pas au point de tolérer que son côté spéculatif atteigne 98% de son volume. Comme mesure dissuasive on a avancé l'idée d'une taxe sur les transactions. Le problème semble être plus complexe. Il faudra plus d'une banque centrale et plus d'un Etat pour concevoir un garde-fou à cette porte majeure de la dérive. Cela, on le savait, mais l'accumulation des profits était telle quelque part qu'on a laissé faire. On fait signe de se reprendre, mais est-il encore temps ?