Il est le type même du fonctionnaire modèle, avec sa calvitie assez prononcée, malgré les quelques mèches de cheveux qui lui cachent à peine le crâne. Ses lunettes " fond de bouteille " suppléant sa forte myopie,laissent apparaître un regard mystérieux ,et un personnage moitié fourbe moitié niais. Ce quadragénaire, père de famille ayant gravi les échelons, est devenu inspecteur en titre. Ce n'est pas d'un inspecteur de police qu'il s'agit, ni d'un inspecteur des finances non plus. Son travail consiste à intervenir dans le domaine social en général afin de régler des litiges entre employeurs et salariés. Il a qualité de ce fait de se déplacer dans les usines et procéder à de multiples inspections pour vérifier si la législation du travail est respectée et appliquée. Il est de ce fait à même de dresser des procès verbaux pour constater des infractions éventuelles et infliger des contraventions. Il lui est loisible également d'attraire le contrevenant devant la justice. Cependant il a qualité d'intervenir en amiable compositeur, en cas de litige entre employeurs et salariés au cours de la phase gracieuse. Son rôle est de ce fait assez délicat voire parfois bien embarrassant. C'est le cas lorsqu'il y a faute des deux parties en litige. Un travailleur qui ne respecte pas les consignes de sécurité peut se trouver victime d'un accident du travail. Mais il peut arriver que l'employeur ne respecte pas de son côté la procédure imposée prévue par la législation en vigueur. Un arrangement amiable est-il possible dans ce cas ? Oui si les deux parties se mettent d'accord.Mais dans tout arrangement de ce genre il faut des concessions réciproques. Bref la tâche de cet inspecteur n'est pas du tout aisée. Il ne faut surtout pas qu'il cède à la tentation ou au chantage. Au sein de sa famille, les choses vont plutôt bon bien, et son épouse plus ou moins exigeante ne se rend peut-être pas compte des difficultés qu'endure son mari au travail. Fonctionnaire de son côté, elle est absorbée par le travail qu'elle fait , mais qui n'a rien à voir avec celui de son mari. Elle n'a aucun souci car elle se contente d'appliquer strictement les instructions de ses supérieurs hiérarchiques. Entre-temps les dépenses ne cessent d'augmenter, avec les enfants qui vont à l'école et dont il faut s'occuper comme il se doit et leur assurer un climat adéquat, et les dépenses quotidiennes du ménage qui sont supportées par les deux époux. Cependant, ce père de famille aime bien avoir quelques moments de loisir également, et un minimum de confort. D'autant plus qu'il commence à être fatigué par ce rythme fou qu'il mène au travail. Cependant il a commencé à avoir beaucoup de relations, surtout dans le domaine des affaires. C'est surtout avec un chef d'entreprise qu'il a un lien d'amitié de plus en plus étoffé. C'est à l'occasion d'une inspection à l'entreprise que cet homme dirige, qu'ils ont fait connaissance. Cela a commencé avec un salarié qui a demandé l'intervention de l'inspection du travail. C'est à cette occasion que l'inspecteur a jugé de l'opportunité de se déplacer afin de s'enquérir des doléances sur les lieux. Bref, c'est une amitié qui va se tisser entre cet homme d'affaires et l'inspecteur, et qui va malheureusement se terminer mal pour ce dernier. A priori il n'y a rien de mal à cette amitié, puisque l'inspecteur était de bonne foi. Mais le litige qui survint au sein de l'entreprise de cet homme d'affaires, va tout changer, et impliquer l'inspecteur dans une affaire de corruption. Victime d'un accident du travail, l'un des travailleurs va dénoncer l'employeur en prétendant que celui-ci n'avait pas pris les mesures de sécurité nécessaires afin d'éviter un tel accident. L'inspecteur est chargé d'une enquête et c'est là que commencent ses déboires. Entre-temps, et à peine son rapport remis à qui de droit, , il est pris en flagrant délit de corruption. En effet, le chef d'entreprise se présente le jour des faits au poste de police pour les aviser que l'inspecteur exige la somme de 200 dinars afin de ne pas l'impliquer dans son rapport d'inspection.Il ajoute qu'il a été d'accord pour lui remettre la somme convenue et qu'il a pris rendez-vous avec lui pour l'après-midi. Les agents de la brigade criminelle ont contacté les supérieurs hiérarchiques de l'inspecteur, après avoir informé le parquet des faits et pris l'ordre d'intervenir immédiatement. Dans un casier au bureau de l'inspecteur les 200 dinars ont été trouvés dans une enveloppe. L'inspecteur imperturbable, donne une autre version des faits, en déclarant que cet argent lui a été remis à titre de prêt par l'homme d'affaire, devenu son ami. Cependant, son rapport d'inspection n'est pas du tout partial, puis qu'il fait remarquer que ce chef d'entreprise n'a pas pris toutes les consignes de sécurité nécessaires afin d'éviter l'accident de travail en question. C'est un point qui milite en sa faveur, mais qu'est-ce qui prouve que l'argent constitue un prêt et non un " pot-de-vin " ? Le voilà devant le tribunal, lui qui n'a jamais commis aucune incartade, et s'est toujours comporté de manière correcte et honnête. Son épouse est venu témoigner qu'il n'a jamais voulu recevoir le moindre cadeau des chefs d'entreprises, serait-ce un paquet de sucrerie. " Il est tellement méfiant et il a peur même de son ombre, n'a-t-elle pas cessé de répéter à la barre " Le chef d'entreprise a déclaré de son côté que l'inspecteur l'avait convoqué une première fois à son bureau pour lui faire du chantage et lui demander cette somme à titre de pot-de-vin afin de changer la teneur du rapport d'inspection. C'est la raison pour laquelle explique-t-il il lui a fait croire qu'il a acquiescé à sa demande. Au deuxième rendez-vous fixé à son bureau également il lui remit la somme demandée, après avoir relevé le numéro des billets et c'est ainsi que l'inspecteur a été pris en flagrant délit. Mais comment expliquer alors que le rapport déjà remis n'est pas en faveur de l'homme d'affaires. L'inspecteur ne peut pas quand même se contredire ultérieurement. S'agit-il plutôt d'une vengeance de la part de cet homme d'affaires roué ? Le mystère reste entier, bien que l'inspecteur ait été condamné à une peine de prison, la décision du juge étant tributaire des éléments existant au dossier et des présomptions, qui en l'occurrence ne sont pas en la faveur de l'accusé. Celui-ci, a été d'une façon ou d'une autre piégé, soit par sa tentation s'il était véreux, ou par un homme d'affaires retors et rusé.