Dans une approche précédente intitulée " Ce qui devrait changer " parue sur nos colonnes le 21 octobre 2009, analysant les raisons de la petite tenue athlétique des joueurs du CSHL nous avons évoqué entre autres raisons l'absence de la séance de décrassage habituellement réservée tous les lendemains des matches aux joueurs pour permettre à leurs muscles de se débarrasser des toxines accumulées la veille. Un terme galvaudé au gré des uns et des autres mais sans appréhension exacte de sa portée par le plus clair des utilisateurs ! Que signifie ce terme décrassage ? En quoi consiste-t-il ? Quand faut-il y avoir recours ? Comment peut-on optimaliser son efficacité ?
Succinct rappel physiologique Pour comprendre les mécanismes de la fatigue générée par l'effort, il faut spécifier que nos muscles sont formés essentiellement de trois types de fibres musculaires entrant en action en fonction de l'exercice effectué. *Les fibres rouges à contraction lente de type 1 : ST (slow-twitch), qui fonctionnent en consommant de l'oxygène (aérobie) et qui sont très résistantes à la fatigue, à l'endurance ; marathon, courses à pieds au-delà des 800mètres. *Les fibres blanches à contraction rapide de type 2 : FT " b " (fast-twitch), elles ne consomment pas de l'oxygène (anaérobie), sont sollicitées dans les exercices explosifs et elles s'épuisent très rapidement ; sprint, smash, démarrage, plongeon, saut en extension, duel aérien, etc. *Les fibres intermédiaires FT " a " intermédiaires : jogging. Lors des exercices violents, brusques et explosifs, les fibres FT b entrent en jeu et travaillent sans oxygène, d'où l'accumulation à leur niveau d'un déchet classique : l'acide lactique. L'élévation du taux de cet acide provoque la fatigue musculaire, laquelle fatigue réduit l'intensité de l'activité par effet feed-back pour protéger le muscle du surmenage, du claquage.
Un horaire à revoir Le décrassage classiquement suivi le lendemain du match est une institution dans le milieu du football. Cette séance a pour finalité d'optimiser la récupération, réduire la fatigue et diminuer le risque de blessures tendino-musculaires. C'est en quelque sorte un véritable nettoyage de l'acide lactique accumulé dans les muscles notamment ceux des mollets et des cuisses pour les footballeurs. Mais des études récentes et suivies par certaines des plus grandes écoles et équipes de renommée préconisent la séance de décrassage juste après le coup de sifflet final de la rencontre et pour cause. Elles se basent sur le fait que notre corps et notre respiration commencent à évacuer cette substance toxique dès la fin du match. Douze heures après un exercice intense, toute trace de ce produit a pratiquement disparu des masses musculaires ; avec comme corollaire inéluctable, durant toute la nuit, l'acide a eu tout le loisir et toute la latitude de commettre ses méfaits sur l'organisme !
Comment s'y prendre ? Loin des protocoles de récupération sophistiqués, les méthodes les plus efficaces sont accessibles à tous les footballeurs. Dans le dessein d'éliminer au mieux l'acide lactique et éviter les courbatures, le décrassage " devrait " avoir lieu juste après le match. Un footing de 10 à 15' sur le terrain quelques instants après le coup de sifflet final est parfaitement indiqué. Ce qui permet à l'acide lactique d'être réellement brûlé avant qu'il n'exerce ses effets dévastateurs sur les muscles. Quelques étirements doux (stretching) sont envisageables. En hiver, le stretching devrait avoir lieu dans un milieu chaud, les vestiaires par exemple. Surtout ne point procéder par à-coups. Ces exercices consistent au fait à de simples postures. Laisser les muscles quelques secondes en position légèrement allongée. Ce qui permet aux fibres musculaires disloquées par l'effort de se réaligner peu à peu.
Difficilement réalisable Si sous d'autres cieux, les séances de décrassage juste au coup de sifflet final de l'arbitre sont facilement réalisables où le public local accepte généralement avec fair-play le verdict final sanctionnant les débats en applaudissant les 22 protagonistes, l'affaire se présente un tantinet différemment du côté de chez nous ! Vous imaginez à titre d'exemples non restrictifs l'Etoile battant le CA à El Menzah, l'USM triomphant de l'EST à Radès voire le CSHL disposant du CSS au Mhiri, vous concevez que les joueurs des clubs vainqueurs peuvent à la fin du match procéder tranquillement à leur petite séance de décrassage au sein d'un déluge de projectiles, de slogans orduriers des inconditionnels déversant toute leur colère sur l'adversaire, l'arbitre et vilipendant dans la foulée le président, le BD, le staff, les joueurs locaux ? Par ailleurs, les locaux perdants, ont hâte de disparaître de la circulation dans le dessein de ne point exacerber la colère de leurs supporters. Encore heureux qu'ils parviennent à regagner leurs vestiaires pour y rester indéfiniment cloîtrés le temps que les forces de l'ordre évacuent les supporters mécontents et maîtrisent la situation.
Les vertus du grand bain chaud Faute de pouvoir accéder au décrassage immédiatement après le match, le sportif peut optimiser sa micro régénération musculaire en se détendant une fois rentré chez lui dans un bain chaud à 40° pendant 20 bonnes minutes. Pas besoin ni d'un sauna, ni d'un hammam ni encore moins d'un jacuzzi. Juste bien caler le corps dans la baignoire et se laisser flotter dans les bras d'Archimède ! Ce faisant, les masses musculaires se relâchent parfaitement avec cette particularité d'une extrême importance : le cœur continue à leur amener beaucoup de sang contribuant de la sorte passivement à les épurer de leurs toxines. Faut-il signaler par ailleurs qu'après un effort intense, notre système de défense contre les agressions pathogènes, les microbes, est affaibli. Un bain chaud est de nature à réactiver et à donner un coup de fouet à nos globules blancs pour qu'ils redoublent de vigilance et s'attaquent aux germes donc aux infections. Le bon sens populaire nous l'aurait suggéré par ailleurs : " Un bon coup de chaud, évite un mauvais coup de froid "... Ne pas omettre de soumettre le corps à la fin du bain à une véritable douche écossaise de quelques secondes en surélevant les membres inférieurs. L'alternance chaud/froid provoque l'ouverture puis la fermeture des vaisseaux et le pompage des déchets. La surélévation des membres favorise leur évacuation.
Précautions à respecter Mais si d'aventure le décrassage du lendemain tient à cœur de certains, il serait préférable de moduler l'activité. Préconiser des contractions douces sources d'automassage profond. Eviter tant que faire se peut, les multiples bondissements du footing car chaque foulée achèverait de briser les fibres musculaires meurtries par la compétition et l'inflammation. Le vélo, la natation voire l'aqua-gym sont de loin préférables car elles sont indépendantes du poids du corps et ne le sollicitent guère.
L'Inutilité du massage ! Aucune étude n'a vraiment démontré l'efficacité de cette méthode. Il se produit autant de courbatures dans les cuisses massées que dans celles négligées selon certaines études. Le pétrissage manuel des courbatures est affreusement douloureux et la quantité de déchets musculaires passés dans le sang est sensiblement identique aussi bien chez les massés que chez les laissés pour compte. Tout juste un confort psychologique chez les bichonnés sans plus. Alors, pas de masseur à la disposition ; la douce moitié répugne à malaxer les quadriceps ; aucune gravité dans l'affaire : aller nager ou se faire couler un grand bain chaud !