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Ce garçon calme, doux, tranquille...
Portrait : Oussama Mallouli, le magique
Publié dans Le Temps le 09 - 04 - 2007

Il y'a des hommes promis à un destin exceptionnel. Ils sont nés sous une bonne étoile, couvés par les anges, aimés des Dieux, comme diraient les Grecs et vénérés par leurs pairs.
Oussama Mallouli fait sans aucun doute partie de cette race rarissime.
Il n'a pas attendu ces 23 ans pour sceller son sort comme un authentique grand. La consécration mondiale n'est q'un aboutissement inévitable de l'histoire d'une jeune vie déjà frappée par le sceau du génie.
Médaillé d'or et d'argent dans un championnat du monde, étudiant brillant en 5ème année d'ingéniorat en informatique au U.S.A, jeune homme beau au sourire lumineux où apparaît toute la splendeur d'une âme limpide et fils exemplaire pour des parents, oh combien fière, mais souffrant terriblement de son éloignement.
Tous ceux qui l'ont connu de près et qu'on a contactés s'accordent à dire qu'il n'a pas de défauts.
Nageur respecté, Champion adulé, fils adoré, frère révéré mais homme terriblement esseulé.
Á Melbourne, une idole est sans doute née mais cet exploit ne révèle nullement les souffrances endurées. Les médailles reluisantes sur le large torse du nageur ont leur revers qui trouve ses racines dans l'histoire d'une existence racontée avec émoi par des personnes chères à son cœur.

L'histoire de sa vie : études et natation !
Tout dans la maison des Mallouli porte l'empreinte indélébile de l'enfant chéri de la famille ; de ses photos agrandis recouvrant les murs, aux coupures de journaux anciennes et actuelles louant les performances du champion en passant par ses médailles exposées et les petits portraits trônant ostentatoirement sur les différentes tables du salon.
Pourtant, à l'ère où on « fabriquait » des champions, Khedija Mallouli orientait ses 3 fils vers la natation par simple précaution : « nous habitons près de la mer et je paniquais à chaque fois que j'entendais les sirènes des ambulances retentir. J'avais une peur viscérale des accidents pouvant survenir, nous raconte t'elle. J'ai, alors emmené mes trois gosses à la piscine de la Marsa. Oussama avait à peine deux ans et il barbotait joyeusement dans le petit bassin. L'eau était manifestement son élément de prédilection. Samia Achour en sait quelque chose puisqu'elle prenait plaisir à s'occuper de lui. C'était un bébé d'un abord agréable, jamais brailleur, toujours rieur. Déjà sa naissance apportait beaucoup de bonheur au foyer bien que nous ayons deux garçons ; Ons et Moeness. Nous déménagions dans notre villa et plein de belles choses nous arrivait en cette année 1984 ».
Trois garçons sensiblement du même âge à élever en plus d'une fille (Rawiya), n'était pas considérés comme une mission difficile pour ces parents très différents dans leur approche éducative mais si complémentaire.
« Leur père était très sévère et à cheval sur la discipline. J'étais plutôt souple et préférait l'approche pédagogique. J'étais institutrice et tenait à ce que mes enfants soient dans mon cours pour les classes impairs qui étaient la base (1er, 3èm et 5ème année). Et ainsi fut- il !
Oussama ne nous a posé aucun problème pour son éducation. Il était docile, doux, obéissant, affectueux et très brillant dans ses études. Par contre il avait la bougeotte et de l'énergie à revendre. Ses frères l'adorait et s'occupaient de lui ». Confirmation immédiate de Ons, l'aîné de la maison : « Oussama possède une nature aimable. Nous l'adorons et nos retrouvailles sont toujours des plus chaleureuses. Rien n'a changé. Il reste le petit frère chéri ».
Enfance normale pour une famille simple qui vivait le quotidien. Sauf que les performances du petit prodige à l'A.S.M ne passaient plus inaperçues à tel enseigne qu'on lui donna le surnom « d'Oussama record ». Ces excellents résultats scolaires allaient de pair avec ses progrès fulgurants à la piscine. Les entraîneurs se relayaient ; Mohamed Arif, Abderrazek Ben Jmiî, Mounir Sahli et Mouldi Dahmen, auquel le nageur semble vouer des sentiments tout particuliers. Il fut très vite sélectionné par Samir Bouchleghem et pris en main par Mongi Chabir pendant 3ans. Ce dernier ne tarit pas d'éloges à son encontre : « c'est un ravissement de travailler avec Oussama. Ce garçon est doté de capacités intellectuelles énormes. Il s'adapte à n'importe quel milieu ou groupe et gagne rapidement l'amour et le respect. Il a une éducation parfaite, jamais de paroles ou de gestes déplacés. En un clin d'œil, il établit des contacts avec son environnement immédiat. Il est très stable, tendre, sensible aux problèmes des autres. Le mérite revient très certainement au milieu familial soudé auquel il appartient. Quand on était en stage en France, sa mère lui envoyait 12 exercices de math à faire en un seul jour et il ne dormait pas avant de les avoir tous effectués. Le réceptionniste se plaignait de cette femme qui lui bouffait tous les rouleaux de fax qu'il mettait ! Il avait déjà l'étoffe d'un champion. Il lui a suffit de monter sur le plateau de l'élite en 2005 pour entrer dans la cour des grands car il n'a rien à leur envier ».
Ainsi fut l'hommage poignant du dernier entraîneur tunisien d'Oussama car le jeune adolescent quittait à 14 ans le pays et mettait le cap sur Font Romeux dans un lycée de sport et études.

L'isolement et la douleur de l'éloignement
Jean Rostand disait : « être adulte, c'est être seul ». Les deux années passées dans ce centre isolé et en très haute altitude, furent sans aucun doute les plus pénibles pour le champion en herbe. Il dut apprendre et de bien cruelle manière la douleur de l'éloignement, la souffrance de l'abandon du giron familial, le supplice de la solitude, l'atrocité du racisme, la déchirante mélancolie et le mal du pays. Il avait à peine 14 ans mais plus le temps de savourer les doux tourments de l'adolescence. Il devait déjà faire face à son destin d'homme.
« Il pleurait constamment, se rappelle tristement sa mère. Je l'appelais régulièrement pour le réconforter et me déplaçais quand ça devenait insupportable. Je prenais une chambre à côté de la sienne mais au milieu de la nuit il venait poser son matelas au pied de mon lit. Il se plaignait des propos racistes que ses jeunes camarades proféraient à l'égard des arabes. Je le consolais comme je pouvais et l'incitais à s'occuper uniquement de ses études et son sport. Au bout de deux ans, il n'en pouvait plus. Il avait effectué ses propres recherches et dénicher un lycée à Marseille. Il nous a juste téléphoné pour nous informer de sa décision d'y terminer ses études secondaires »
Le jeunot s'est définitivement pris en charge ! Désormais, il programme son propre parcours, trace sa voie et prend tout seul ses décisions.
Avec son entraîneur français, Marc Shoubert il prend une tout autre dimension, celle des graines des champions. Il le surnommera « Ouss, le magique » pour sa rigueur et son application méticuleuse des consignes. Les quatre années qu'il passait au lycée « Rempart » étaient du pur bonheur. Quand on connaît la proximité de cette région de la Tunisie et les similitudes qui les lient, on comprend aisément son enchantement.
Après le bac, Los Angeles accueillera Ouss et encore une fois, la patrie est bien loin. Pour passer à un pallier supérieur, il fallait être réglé comme une horloge. L'ambition ne peut être assouvie qu'au prix de très gros sacrifices : « il était absent physiquement de toutes nos fêtes, des Aïd, des évènements tristes aussi et de notre existence, relate son père. Je crois que je n'ai pas eu assez de temps pour le connaître suffisamment, pour suivre son évolution et voir au quotidien les transformations qui surviennent dans sa personne et sa vie. Ceci m'afflige au plus haut point ».

Les prémonitions d'une mère
Qu'elle est pénible, qu'elle est dur la route qui mène à la réussite et à la gloire. Entre la vie de sportif de haut niveau et la vie tout court, il y'a un choix à faire et il n'est pas évident. Renoncer à l'amitié et à l'amour : « Oussama ne s'est jamais assez attardé quelque part pour s'y faire des amis, déclare Khadija Mallouli. C'est un garçon très timide. Les jalousies et les envies mettent des fois sa sensibilité à rude épreuve mais le transfigure, le plus souvent et lui développe sa rage de vaincre. Quand à l'amour, il est trop tôt pour y songer. Il es, certes très sollicité mais affirme vouloir se marier avec une tunisienne quand le moment sera venu. Le haut niveau exige un rythme d'entraînement infernal. Ses journées sont chargées à la limite de l'inhumain ».
Mais au bout, il y'a des records à réaliser et battre, des compétitions à gagner, des podiums à escalader, des médailles à mettre autour de son cou et tant d'honneurs à récolter. Que peuvent espérer de plus des parents ?
« Néanmoins, si c'était à refaire, je ne le referai pas, entonne la mère d'Oussama, mortifiée. J'ai trop longtemps été privé de mon fils. Il nous manque à tous terriblement. Je ne veux pas échanger mon garçon contre un champion de natation. Je suis beaucoup plus fière de son parcours universitaire que de son statut de champion du monde. Je souhaite qu'il mette un terme à sa carrière de nageur alors qu'il est sur la plus haute marche du podium pour entamer une vie professionnelle. Mais je redoute l'après carrière. Je me projette un peu dans l'avenir et mille interrogations me brûle l'esprit, la plus importante est ; saura t'il gérer le vide laissé par la natation ? »
Pour le moment, il savoure plutôt le succès et la popularité et plonge dans la préparation des J.O de Pékin 2008. Toute la nation est derrière lui l'encourageant à aller de l'avant, insouciante des angoisses légitimes d'une mère qui a vu son bébé lui échapper et indifférente à la souffrance manifeste d'un père privé de sa progéniture.
Mais ceci fait aussi partie du sacrifice car « Ouss le magique » n'est plus uniquement le fils de Hedi et Khadija Mallouli. Chacun de nous sent qu'il a des droits sur cet enfant du pays, ce magnifique champion, ce pourvoyeur en rêves pour les âmes desséchées, cette icône et ce héros national.
Grâce à lui, à Melbourne en Australie, le drapeau du petit pays flottait haut dans le ciel et les représentants de multiples nations se sont levés pour saluer l'hymne de la Tunisie.
« Oussama record » ou « Ouss, le magique » est désormais « la torpille tunisienne », tel que l'a baptisé le groupe Karoui&Karoui. Des casquettes, des tee-shirts et des stylos porte son effigie.
De champion notoire, il est élevé au rang de star.
Et voilà que c'est par la natation que notre bonheur arrive. Pourvue que ça dure !


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