La quatrième chambre criminelle du tribunal de 1ère instance de Tunis a entamé la saison judiciaire par le traitement de l'affaire dans laquelle 16 personnes ont péri aux larges des côtes de la Marsa et de Sidi Bou Saïd. Cette affaire a connu, à l'époque, trop d'ampleur pour la tristesse qu'elle a laissée chez plusieurs familles qui ont vu leurs progénitures les quitter à jamais. Des jeunes qui espéraient atteindre l'Europe par les côtes italiennes dans l'espoir de trouver vie meilleure. C'est au cours d'une journée du mois de Janvier de l'année dernière qu'une information est parvenue aux autorités policières de la ville de la Marsa notifiant qu'un chalutier prénommé « Syrine » a péri au large. Il y avait à son bord 30 jeunes Tunisiens candidats à l'émigration clandestine. De suite les dispositions urgentes ont été entreprises par la conjugaison des efforts de plusieurs unités de la police, de la protection civile ainsi que des garde_ côtes. Plusieurs jeunes embarqués ont essayé de rejoindre la côte de la banlieue nord à la nage, ils ont été ainsi sauvés et transférés dans les hôpitaux pour recevoir les soins nécessaires. L'épave du chalutier a été également trouvée. Il s'est avéré qu'il appartenait à une dame résidente à la Marsa qui a déclaré ignorer tout de cette affaire. Son mari a déclaré qu'il a informé à temps les autorités quand il s'est rendu compte que le chalutier a été volé. Plusieurs cadavres de jeunes qui ont péri au large ont été transférés à la morgue pour les autopsies. Les médecins légistes ont pu ainsi affirmer qu'ils sont décédés par noyade. L'enquête a démarré par l'interrogatoire des jeunes qui ont été sauvés et qui ont été considérés par les enquêteurs comme étant des témoins et victimes à la fois. Ils ont rapporté aux auxiliaires de la justice qu'ils ont remis à une personne assez connue pour ses antécédents dans le domaine de l'émigration clandestine et qui réside à la Marsa des sommes qui varient entre 1200 Dinars pour quelques uns et 2000 Dinars pour d'autres. Cet individu les a rassemblés (30 Jeunes) dans la forêt de Gammarth à proximité des côtes et les a transférés sur une petite embarcation jusqu'au chalutier qui était ancré un peu au large. Dès qu'ils ont entamé le voyage, le capitaine de bord s'est rendu compte qu'il y avait une surcharge et que vu les conditions atmosphériques il lui était impossible de continuer à naviguer. Il a appelé le responsable du groupe et l'a informé de la situation. Ce dernier s'est empressé de lui demander de faire demi tour. Malheureusement, vu la quantité d'eau qui s'est infiltrée à l'intérieur du chalutier les jeunes se sont jetés dans l'eau afin d'essayer de rejoindre les côtes à la nage. Quelques uns ont pu être sauvés mais plusieurs ont péri dont le capitaine. L'enquête a abouti à l'implication de six personnes. Quatre parmi eux ont été arrêtés. Deux sont demeurés en fuite mais grâce à la vigilance des enquêteurs, ils finiront par être appréhendés et incarcérés. Le rapport de fin d'enquête stipule que les six personnes sont impliquées dans la constitution d'un réseau dans le but d'aider des personnes à quitter le territoire Tunisien d'une manière illicite. Ils les embarquent et les amènent jusqu'aux côtes italiennes moyennant les sommes déjà indiquées. C'est donc dans une salle de tribunal archi comble que le procès a démarré. Le juge a lu l'acte d'accusation puis a procédé à l'interrogatoire des accusés. Le premier a déclaré qu'il a déjà quitté le territoire Tunisien d'une manière illicite en 2002 aidé en cela par un des deux inculpés en fuite et qui est connu en banlieue nord. Il a déclaré qu'il est arrivé à rejoindre les côtes italiennes mais très vite il a été appréhendé par les policiers italiens et a été ré acheminé en Tunisie. Il a nié toute implication dans cette affaire. Le deuxième a déclaré qu'il est marin de métier. Il a informé le juge qu'il est propriétaire d'une petite embarcation qu'il utilise pour la pêche. Il a déclaré qu'il a été contacté par l'inculpé principal en fuite. Ce dernier lui a demandé de lui vendre sa barque pour l'équivalent de la somme de 10.OOO Dinars. Il a déclaré avoir refusé. En ce qui concerne cette affaire il a déclaré n'avoir aucune idée et n'a jamais participé ni de près ni de loin. Le troisième inculpé a déclaré qu'il était candidat à l'émigration clandestine. Il a payé à l'inculpé en fuite la somme de 1200 Dinars. Le jour du départ il a été convoqué à rejoindre le groupe. Mais quand il a vu le nombre important de jeunes il les a conseillé de ne pas partir car cela risquerait d'être dangereux. Il a déclaré être innocent. Le juge lui a fait savoir qu'il a reconnu avoir encaissé de l'argent de quelques jeunes, il s'est rétracté en déclarant que ses aveux ont été donnés sous la contrainte. Le quatrième inculpé a déclaré également qu'il a déjà quitté le territoire d'une manière illicite et que c'est l'accusé principal en fuite qui l'a aidé. Il a déclaré qu'il voulait repartir. Il a déclaré n'avoir joué aucun rôle dans cette affaire. Les avocats des quatre inculpés ont été unanimes pour demander l'acquittement de leurs clients. Ils ont déclaré qu'ils sont également victimes puisqu'ils ont été eux même candidats à l'émigration clandestine et ont payé les sommes demandées à l'accusé principal et qui est en fuite. Après les délibérations, le tribunal a décidé de reporter l'affaire à la fin du mois d'octobre. Les juges ont demandé un complément d'enquête.