Des citoyens ont commencé à s'inquiéter, sérieusement, ces derniers jours, de voir renaître de ses cendres chez les Tunisiens la propension au culte de la personnalité et favoriser, une nouvelle fois, les dérives despotiques. Car, c'est le culte de la personnalité qui a encouragé l'instauration de la dictature, en Tunisie, par l'ancien président déchu, et son maintien durant les 23 dernières années, nous ont-ils dit. «Il est à craindre que le culte de la personnalité inoculé aux Tunisiens par Bourguiba, depuis l'indépendance, et cultivé à l'extrême par son successeur Ben Ali, ne vienne, de nouveau, entraver l'aboutissement du processus démocratique enclenché par la Révolution », nous a indiqué un ancien enseignant devenu libraire, en donnant pour preuve, à son avis, l'instrumentalisation des moyens d'information dans cette direction. «L'accent est mis, aujourd'hui, particulièrement, sur l'amélioration de l'image de marque de certains corps de métiers comme la police, les forces de sécurité ou encore l'armée, dans des termes confinant à l'admiration et au culte », a-t-il dit. Un autre citoyen nous a signalé avoir constaté dans la ville de la Goulette que la façade du siège d'une ancienne cellule du RCD comportait encore la plaque commémorative relative à la date de la pose de la première pierre de cette cellule, et sur laquelle on peut lire : « Par la grâce de Dieu, le membre du bureau politique, Mr Béji Caïd Essebsi, a posé la première pierre de cette cellule le 26 octobre 1986.(Mais là, notre concitoyen s'emmêle les pinceaux : à l'époque c'était encore le PSD ! Mais c'est du tout comme…)'' Toutes les autres marques ont été enlevées, à part cette inscription gravée sur une pierre marbrée. «Est-ce parce qu'il s'agit de Béji Caïd Essebsi, actuel Premier ministre du gouvernement provisoire, qu'on n'a pas enlevé cette plaque, ou un simple d'oubli », s'est demandé notre interlocuteur. Or, le siège de la cellule en question abrite actuellement le Conseil local de la Révolution de la Goulette. Il est vrai que la façade du siège d'une autre ancienne cellule du RCD dans la même ville comporte encore une plaque similaire où il est écrit « Parti libéral constitutionnel tunisien, cellule de la Goulette ». « Face à ce qui se passe d'inattendu, en ce moment, on a la profonde impression que la Révolution du 14 janvier est inachevée », a affirmé un commentateur rencontré à l'avenue Habib Bourguiba, à Tunis, soulignant que le spectre du culte de la personnalité plane toujours, et derrière lui, la dictature. Il nous a montré les slogans révolutionnaires écrits sur les murs de cette avenue par «les premiers manifestants purs et durs de la Révolution, en particulier le slogan révolutionnaire «Dégage ! ». « Les premiers révolutionnaires appelaient à une régénération du pays et de l'Etat en les débarrassant des réactionnaires, exploitants, opportunistes, flatteurs et nostalgiques de la répression et du despotisme de tout bord », a-t-il souligné. «Or, a-t-il ajouté, les efforts sont orientés, aujourd'hui, vers le rétablissement et la réhabilitation.''