Le ministre de l'Education a récemment indiqué que des mesures draconiennes ont été prises en coordination avec les partenaires sociaux, les forces de l'ordre et l'armée nationale pour prévenir d'éventuels dépassements au cours du passage des épreuves comptant pour l'examen du bac 2011 qui auront lieu du 09 au 16 juin. Ainsi, une commission commune entre les ministères de l'Education, de l'Intérieur et de la Défense nationale a été créée en vue de coordonner la protection des centres d'examen, de dépôts et de collecte des épreuves. De telles mesures assureront sans doute la protection des centres d'examens contre toute invasion ou attaque provenant de l'extérieur des établissements, d'autant plus que pas mal de comités locaux pour la protection de la Révolution se sont déclarés prêts à participer à cette surveillance aux côtés des forces de l'ordre et de l'armée nationale en vue de faire réussir cet examen national. Cette mobilisation générale, ô combien bénéfique, est à louer certes ; mais a-t-on pensé à ce qui pourrait survenir à l'intérieur des centres d'examens, dans les salles d'examens ? A-t-on pensé à améliorer les conditions du travail des candidats et des enseignants-surveillants, lesquelles conditions étaient à l'origine d'un bon nombre d'incidents survenus en salles d'examens lors des sessions précédentes ? Quelles mesures pour la fraude high-tech ? En effet, l'un des problèmes récurrents à l'examen du bac est celui de la fraude ou la tentative de fraude lors des épreuves ; une pratique qui devient depuis quelques années de plus en plus sophistiquée, faisant recours aux nouveaux procédés high-tech. Chaque année, on dénombre des centaines de tricheurs parmi les candidats au bac, et ce, malgré la mise en garde sur les conséquences néfastes de ce délit et les mesures préventives ou cœrcitives en vigueur. Pour ne citer qu'un seul exemple, le Ministère de l'Education a recensé 385 cas de fraude à l'examen lors du bac 2009 et parmi ces candidats coupables une soixantaine ont été suspendus pour cinq ans. Le chiffre était si alarmant que dès l'année 2010, le Ministère de tutelle a pris de nouvelles mesures pour consolider sa lutte contre la fraude high-tech en adoptant un programme de brouillage des téléphones portables grâce à la collaboration de deux fournisseurs de téléphonie mobile. Malheureusement, cette solution n'a pas été bien appliquée dans tous les centres d'examens pour des raisons techniques et certains candidats, orfèvres en la matière, ont pu l'échapper belle à cette surveillance technologique et se sont reportés sur les méthodes traditionnelles (papiers dissimulés sur le corps, écriture sur la table, échange de feuilles ou de paroles…). Ce phénomène, connu d'ailleurs dans le monde entier, a pourtant ses prétextes d'abord chez les fraudeurs qui se plaignent toujours des programmes trop chargés et du grand manque de temps pour réviser et pour qui la fraude à l'examen est vécue comme un défi à relever étant convaincus que c'est le moyen le moins fatigant et le plus court pour atteindre leur but : réussir au bac, la clé pour l'université. Côté enseignant, les raisons qui poussent à tricher aux examens sont multiples : d'abord, le manque d'organisation et de méthode dans le travail des élèves qui ont souvent tendance à apprendre tout par cœur, c'est que la plupart de nos élèves se sont habitués à ce bourrage de crânes depuis l'école primaire et, à la longue, ils ne peuvent s'en débarrasser. Ensuite, les conditions mêmes dans lesquelles on passe les examens trimestriels (devoirs de contrôle et de synthèse) sont susceptibles d'inciter les élèves à la fraude, vu la surcharge des classes. Même lors des épreuves du bac, on compte généralement 20 candidats par salle, ce qui est un nombre assez élevé pour donner l'occasion aux fraudeurs de commettre leurs délits. Certains professeurs chargés de la surveillance au bac pensent que ce nombre doit être réduit pour avoir entre 12 et 15 candidats par salle d'examen, ce qui facilitera la tâche aux surveillants et minimisera la tentative de fraude parmi les candidats. Par ailleurs, certains enseignants-surveillants sont pour l'interdiction pure et simple d'introduire les téléphones portables en salle d'examen, pour remédier à toute défaillance de la surveillance technologique introduite depuis l'année dernière qui, en principe, devait bloquer tous les réseaux de téléphonie mobile dans tous les centres d'examens, mais qui n'a pas fait ses preuves. L'autre thèse – qui reste à vérifier – consiste à impliquer les professeurs chargés de la surveillance des épreuves qui pourraient se montrer plus tolérants et plus permissifs qu'il ne faut envers les candidats dont certains profitent de la situation pour exécuter leurs stratagèmes de fraude, ne serait-ce que par des soufflements de réponses ou d'échanges de papiers entre les candidats. Ces mêmes surveillants, en agissant de la sorte, entendent créer une atmosphère de détente et de décontraction chez les candidats pour qu'ils se concentrent tranquillement sur leur copie. Mais encore faut-il qu'ils soient bien compris par tous les candidats. C'est pourquoi, en de telles circonstances, il ne faut pas trop pousser la tolérance. En revanche, un surveillant arrogant, strict et intransigeant pourrait influer sur l'état psychologique des candidats et provoquer peut-être diverses réactions inattendues de la part de certains candidats déjà sur leurs nerfs. Par ailleurs, les chefs des centres d'examens se plaignent du taux d'absentéisme un peu élevé enregistré ces dernières années parmi les professeurs surveillants, ce qui pourrait entraver le bon déroulement des épreuves, surtout quand le nombre des absents dépasse celui des professeurs suppléants. Et l'état psychologique des candidats ? Les épreuves du bac de cette année se dérouleront sans doute dans des circonstances particulières dans la mesure où l'année scolaire 2010/2011 a été marquée par des événements aussi bien importants qu'imprévus causés par la Révolution (vacances supplémentaires, attaques violentes contre les établissements scolaires et le personnel administratif et enseignant, grèves des élèves, mesures prises par le ministère en vue d'alléger les programmes et rectifier le calendrier du contrôle continu…) Ajoutons à cela l'état psychologique de la majorité des candidats qui viennent de vivre la Révolution dans toutes ses étapes, passant par des jours exceptionnels dont ils n'avaient jamais rêvé ! Aussi peut-on dire que certains élèves candidats au bac sont encore sous l'effet du choc ; d'autres ont perdu le goût des études, vu les différents arrêts des cours observés dans plusieurs établissements depuis le 14 janvier, et ils semblent lâcher prise. D'autres encore, bousculés par le temps et malgré l'allègement de certains programmes, ont dû sacrifier des matières au profit d'autres quitte à rater la première session pour mieux se préparer à la seconde. La majorité des candidats que nous avons rencontrés s'attendent à ce que les épreuves de cette année soient à la portée et que la direction des examens prenne en considération les conditions anormales qui ont marqué cette année scolaire. Ils sont unanimes à avouer qu'ils sont psychologiquement perturbés mais qu'ils sont malgré tout prêts à affronter cet examen avec enthousiasme. De même, certains nous ont exprimé leur souhait de voir un taux de réussite plus élevé que les années dernières : « Nous sommes les candidats au premier bac de l'après-révolution ! », ont-ils souligné.