Faux tropismes d'une instance censée être celle de la réalisation des objectifs de la révolution, de la réforme politique et de la transition démocratique : la visite du Premier ministre n'a pas enlevé une épine du pied des membres de cette commission car les réponses de Caïd Essebsi étaient jugées « évasives » pour ne pas dire « laconiques et sommaires ». En bon tribun, ayant par-dessus tout toujours le mot pour rire Caïd Essebsi a comme d'habitude tiré son épingle du jeu, même si des questions posées sont restées en suspens. « Un Etat dans un Etat ? Je ne suis pas au courant qu'une main cachée dirige le gouvernement. Les Snipers ? Celui qui en a vu un, qu'il me le ramène. » dit-il pour se dérober parfois, mais surtout pour donner la réplique quand il s'agit de questions infondées. « Mais vous êtes responsables et vos questions doivent être posées en connaissance de cause » fait remarquer Béji Caïd Essebsi qui n'a pas lésiné à écouter toutes les doléances des intervenants parmi celles qui ont caressé dans le sens du poil le gouvernement ou celles encore qui étaient carrément très critiques voire même satiriques. Retour du CPR Il y a lieu de remarquer, pour commencer, que le CPR le parti de Moncef Marzouki a retrouvé le chemin de la Haute instance après l'avoir boudé pour quelques temps. Ennahdha qui n'a pas rebroussé chemin a brillé par son absence des travaux de la Haute instance. Et comme les absents ont toujours tort, les représentants du parti de Rached Ghannouchi auront raté l'occasion de dire ce qu'ils avaient à dire. Alors que d'autres parties, ayant pris la parole, ont raté l'occasion de se taire. Les débats stériles sur la place de la femme dans la société ou encore les vieilles querelles idéologiques entre islamistes et laïcs ont retrouvé, en effet, leur place à l'ordre du jour de cette réunion pour détourner le débat vers des questions dont le moins qu'on puisse dire qu'elles sont secondaires dans un pays en phase de transition. Et c'est là que le bât blesse : car la nomination du Secrétaire d'Etat aux affaires étrangères a suscité l'indignation de bon nombre d'assistants à cette réunion surtout que le débat sur la non normalisation avec l'Etat hébreu se fait des plus houleux ces derniers temps. L'employé de l'Etat en question était dans un temps récent le responsable du bureau des relations tuniso-israélienne établi à Tel Aviv. « Mais c'est un employé de l'Etat. » répond Caied Essebssi en expliquant que celui-ci ne peut pas refuser un poste qu'on lui a demandé d'occuper au risque d'être limogé. Mohamed Goumani du Parti de la réforme et du développement a dans ce même ordre d'idées montré que des anciens Rcédistes continuent à tenir les rênes de plusieurs secteurs névralgiques dans notre pays comme le ministère de l'équipement et la Haute instance de la communication. Sans oublier la question incontournable de la traque aux responsables des crimes dont les victimes étaient des citoyens tunisiens. On a reproché en ce sens, la lenteur des procès de condamnation engagés contre les assassins. BCE y répond en invoquant le cas des 27 ministres incarcérés et en expliquant que les choses avancent lentement mais sûrement. « Des commissions planchent sur ces dossiers et le gouvernement ne peut pas y intervenir tout comme dans le cas des affaires qui relèvent des prérogatives de la magistrature. » dit-il. Et les martyrs ? Cela ne semble pas avoir convaincu l'assistance. Car avant même que la séance ne commence l'avocate Lamia Ferhani la présidente de l'Association martyrs et blessés de la Révolution qui compte parmi les leurs un martyr (son frère) a quitté la salle en annonçant son retrait de la Haute instance, se révoltant contre « un déni de justice » à son égard. Lamia Ferhani qu'on a retrouvé dans les coulisses n'en revient pas : les membres de la Haute Instance l'ayant désignée en effet, par la voie du vote, parmi les quatre personnalités indépendantes pour poser des questions à BCE, elle s'est retrouvée écartée à son insu ! C'est toute la question. Il faut dire que BCE a fait de son mieux pour répondre à un flux de questions déroutantes parfois même absurdes. Il a même répondu à d'autres qu'on ne lui a pas posées. Comme celle liée à l'économie tunisienne qui a du mal à retrouver l'élan de ses premiers pas afin de remettre en route une société en panne. Caïd Essebsi montre du doigt des sit-in et des grèves intempestives parfois sauvages ayant bloqué les rouages de notre économie. Chiffres à l'appui il tire la sonnette d'alarme et responsabilise toutes les parties responsables de ces faits dont notamment l'UGTT. Il a même montré son mécontentement quant à la formation de syndicats le mois de février dernier au lendemain du départ du gouvernement Ghannouchi. « Si les policiers observent un sit-in qui va assurer la sécurité du pays ? » se demande-t-il. Et les solutions Monsieur le premier ministre? Dorra Mahfoudh, une ‘'personnalité nationale'' a bien, avant évoqué la question de la transparence, que le gouvernement de transition doit observer. « Dans le rapport du G8, la démagogie était de mise, puisque vous prétendez que l'on peut créer 110 000 emplois par an, chose qu'on ne peut en aucun cas mettre en pratique. Et vous vous projetez dans l'avenir d'ici l'an 2016 alors que votre gouvernement est transitoire. » dit-elle. A quoi bon la critique, effectivement, si le gouvernement est provisoire et que ses fonctions prendront fin le 23 octobre prochain. BCE qui prête le flanc aux critiques n'en demeure pas moins attentif. Caïd Essebsi qui prête attention aux uns et aux autres s'est retrouvé parfois, pour des questions purement techniques, dans l'impossibilité de comprendre « Mais je vous écoute très mal » dit-il. La question de l'intervenant portait sur la réforme du système de la sécurité où règne la gabegie et sur l'affaire Sémir Fériani qui campe dans la prison depuis un mois et demi. En attendant d'avoir des réponses précises et visibles à ces questions, BCE peut s'offrir les suggestions de Abdellaziz Ayeb une ‘'personnalité nationale ‘' qui de bon conseils avance « Vous n'avez pas besoin de gens pour avoir raison mais pour être raisonnable. » Entendu.