«La deuxième Fatiha»*, le livre édifiant de Yadh Ben Achour avait quelque chose de prémonitoire : il ne savait pas qu'il serait confronté à l'exigence d'une troisième « Fatiha » ne serait-ce que pour bénir une constituante qui risque d'être mort-née. Et- ironie du sort – ceux qui hypothèquent « la Fatiha » l'ont abandonné à son sort. « La troisième Fatiha », Yadh Ben Achour la prononcera (la rédigera) peut-être bien seul, cruel refuge d'un réformateur qui espère contribuer à la naissance d'une démocratie ! Le grand constitutionnaliste qu'il est sait parfaitement que la démocratie a plusieurs définitions, plusieurs modèles ; qu'elle ne pourrait se sentir sécurisée sous la charpente constitutionnelle – et qu'elle n'y sera d'ailleurs jamais en sécurité – parce que, justement, une constitution peut sanctifier un modèle démocratique mais ne sacralise pas pour autant la démocratie. Cela Yadh Ben Achour a beau l'expliquer au sein d'une Instance qui est en train de se rapetisser à vue d'œil ; boudée par ceux qui confondent Coran et démocratie et, désormais, banalisée par le retour en force des orthodoxies marxistes – léninistes (n'est-ce pas Hamma Hammami), par le chantage des partis de droite (forts de l'appui de beaucoup d'hommes d'affaires) et par les louvoieries opportunistes des centristes, naturellement adeptes du roi caméléon. .. et en tous les cas très ouverts aux Rcédistes Depuis le 14 Janvier et à ce jour, après huit mois de luttes, de ferveurs aussi, Yadh Ben Achour se reconnaît de moins en moins dans un paysage devenu surréaliste. Il continue d'affirmer que la Haute Instance est le miroir de la société tunisienne avec ses classes, les multiples facettes de son intelligentsia et ses idéologies. Nous souhaiterions tout autant que le futur immédiat lui donne raison. Qu'il regarde autour de lui néanmoins : c'est désormais un homme seul et qu'on se permet d'accuser de compromis sinon de compromissions, juste parce qu'il essaie de tempérer des ardeurs un peu trop « révolutionnaires ». S'il échoue à mener à terme le processus, le miroir dont il parle se révèlera être un miroir aux alouettes. Raouf KHALSI *«La deuxième Fatiha», ouvrage de Yadh Ben Achour paru le 11 mai 20011 Rachid Bouhamed [email protected] amad salem [email protected]