Par Khaled GUEZMIR - «Ennahdha» premier parti de la Tunisie post-révolutionnaire ! Voilà qui est fait ! Une journée mémorable, celle de ce 23 octobre 2011, où les Tunisiens toutes régions et toutes conditions confondues ont démontré qu'ils peuvent être disciplinés, faire la queue dignement sans agressivité ni comportement inspiré par le système « D » des 23 dernières années et dire librement ce qu'ils ont à dire à nos futurs gouvernants. Du coup, le peuple dans une bonne majorité a voulu affirmer sa « sanction » contre les élites « modernisatrices » qui n'ont pas su arrêter à temps la dérive totalitaire du système de Ben Ali. En votant « Ennahdha » ils ont exprimé clairement leur désir de moraliser une fois pour toute la vie politique mais aussi la vie économique et le monde des affaires. Quatre heures d'attente dans une queue interminable m'ont permis de « bavarder » avec certains de nos compatriotes jeunes et moins jeunes et le message était clair cinglant et sans appel : On en a marre des voyous et de la politique, de Ben Ali qui a écoeuré toute la société tunisienne pour les années et même les siècles à venir. La « modernisation » et ses élites corrompues qui se sont associées à son projet soit de fait ou par « lâcheté », ont été déclassées par un peuple qui réclame une certaine « piété » bienfaitrice reposante et apaisée. L'un de ces jeunes maîtrisard, courtois et bien dans sa peau, m'a expliqué pourquoi il vote « Nahdha »…Oui, me dit-il poliment, comme pour s'excuser de bien faire : « Je vote pour ceux qui craignent Dieu » (Yekhafou Rabbi) ? Puis, il ajoute : « Ben Ali, sa bande et ses proches ne craignaient pas Dieu et ils ont ruiné notre pays et ses rêves pour un monde meilleur. La corruption doit cesser et l'Etat tunisien doit appartenir à tous les Tunisiens et plus jamais à un seul homme quelque soit son génie ou son mérite » (fin de citation) ! Ce discours c'est un peu l'appel des classes moyennes et populaires qui en ont ras-le-bol de la « modernisation » des bandes mafieuses qui se sont approprié le pays et ses finances. Elles veulent un retour aux valeurs fondamentales du peuple tunisien attaché à la voie du juste milieu (Al Wassatiya wal Iîtidal) et à la solidarité entre les catégories sociales et les régions. Les oubliés du progrès qui voyaient avec envie et désarroi, défiler devant leurs yeux, ces dernières années, la nouvelle classe bien, minoritaire et infime de ces nouveaux riches, mafieux et arrogants, proches du pouvoir et collés à es intérêts, ont exprimé d'abord leur révolte à partir de décembre 2010, dans les hautes steppes du pays, puis maintenant, leurs espoirs de moraliser la vie publique et la répartition plus juste de la croissance économique entre les différentes catégories sociales et les régions. La « sanction » est bien là, mais il faut bien se garder de croire comme l'affirment certains « perdants » que la Tunisie roule vers « l'inconnu » ! A notre avis, il faut relativiser les choses et s'armer de courage et de patience. Les acquis de la bonne modernisation sont là, intangibles, parce que synonymes de progrès et de bien être au niveau de la qualité de la vie des Tunisiens. Personne ne peut nier les percées énormes de la Tunisie sur tous les plans depuis l'indépendance et les archives photographiques de 1956, en témoignent. Mais, la sagesse et la raison obligent, aujourd'hui, à faire l'autocritique générale honnête et sereine des dérapages de certaines élites dirigeantes qui ont gouverné le pays pendant les 20 dernières années faisant prévaloir leurs intérêts personnels sur ceux de la communauté toute entière. L'Islam modéré n'a jamais été l'ennemi du progrès, bien au contraire. Le tout, c'est de l'adapter au rythme de la terre, de le dépoussiérer de ses extrêmes et d'en faire un outil précieux de remodélisation de la modernisation en l'orientant vers le bien-être solidaire et fraternel ! Cette nouvelle démarche est de la plus haute importance pour nous tous, l'amour et l'intérêt supérieurs de la nation appellent les Tunisiens plus que jamais à faire prévaloir la raison et la volonté d'aller de l'avant. La démocratie se construit aussi et surtout par le travail, la discipline et le droit à la différence.