C'était dans une ambiance chaleureuse et bon enfant que le Club Idhafet de la Maison de la Culture Ali Ben Ayed d'Hammam-Lif a organisé une rencontre littéraire avec le romancier et le nouvelliste tunisien Hassen Nasr autour de son dernier livre « Créatures ailées » qui a reçu la Mention Spéciale du Jury de Comar 2010. Hassen Nasr qui a commencé à écrire depuis la fin des années cinquante a publié plusieurs nouvelles dans les revues littéraires de l'époque, puis il s'est fait distinguer par son fameux recueil de nouvelles « Layali Al Matar » paru en 1967. Il publia plus tard son roman « Dahalise Al lail » en 1977, qui eut également un succès aussi éclatant. En 1985, il publia un nouveau recueil de nouvelles, intitulé « Les 52 nuits », suivi par le roman « Khobz Al Ardh » (1985). Suivirent ensuite d'autres livres tels que : « Assahar wa Aljorh » (1989), « Khouyoul Al Fejr », « Dar Al Bacha » (1994) et « Sijillet Ra's Al Dik » (2001). Il s'arrêta d'écrire pendant plusieurs années pour revenir enfin en 2010 avec un nouveau roman «Créatures ailées ». Etaient présents à cette rencontre, plusieurs écrivains et poètes tunisiens ainsi que des hommes de lettres et de culture. D'abord, une étude critique de l'œuvre de l'écrivain intitulée « Particularités dans l'écriture de Hassen Nasr à partir de son roman Créatures ailées » par Dr Ibtissem Oueslati. Elle présenta sommairement le parcours littéraire du romancier et enchaîna avec l'analyse de son dernier roman en soulignant que « le texte est venu sous forme de mosaïque, loin des règles classiques générales et strictes recommandées par les théoriciens du genre romanesque, dont l'auteur s'est complètement écarté pour adopter une nouvelle stratégie tout à fait différente en vue d'apporter une nouvelle forme d'écriture et une autre vision du roman… Aussi a-t-il eu recours à de nouveaux outils et d'autres formes d'expression pour rompre avec les anciennes approches devenues stériles.» Elle a mis en exergue les techniques d'écriture adoptées par le romancier qui a réussi à tisser admirablement la trame de son histoire. « Créatures ailées », a-t-elle conclu, est un grand projet de Hassan Nasr, c'est aussi un nouveau modèle d'écriture qui reflète la vision de son auteur. Ce roman vise à se libérer des contraintes imposées par les modèles traditionnels afin d'édifier un nouveau roman arabe authentique qui doit prendre des dimensions civilisationnelles universelles. Quant à Hassen Nasr, il a répondu à toutes les questions posées par les assistants. Il a ainsi parlé de son parcours littéraire, notamment du nouveau genre dans lequel il s'est illustré en Tunisie et dans le monde arabe. Il a souligné le manque d'intérêt accordé aux écrivains en Tunisie et aux œuvres littéraires, à telle enseigne qu'il croyait toujours écrire pour soi-même ou pour ses amis passionnés de littérature, en l'absence d'un lectorat important et assidu. Pourquoi écrit-on ? Comment écrit-on ? Pour qui écrit-on ? Telles étaient les questions auxquelles a répondu Hassen Nasr qui voit dans l'écriture un acte existentiel par lequel il aspire à une vie meilleure, à un monde différent, un homme nouveau et moderne. « Mon rêve est de vivre dans un monde sain au sens large du terme, a-t-il déclaré, mais le grand malheur de l'écrivain est que ses écrits n'aient pas d'écho auprès des masses… Je n'aspire pas à un autre monde céleste : l'essentiel est de savoir vivre dans le présent, dans un monde sans cesse renouvelable qui place l'homme et les valeurs humaines au-dessus de tout.» Il a également démontré l'importance de l'espace et du temps, deux éléments essentiels dans la vie de l'homme. La notion du temps et de l'espace demeure, selon l'écrivain, encore mal conceptualisée par la majorité des gens, notamment chez les populations arabes. « Le temps et l'espace sont la conscience de l'Histoire, a-t-il indiqué, la valeur de ces deux notions réside dans l'existence de l'homme à tel temps et à tel espace et dans son évolution dans un cadre spatio-temporel bien déterminé » Hassen Nasr a enfin parlé d'un nouveau genre littéraire qu'est la « nouvelle très courte » dont il est le pionnier en Tunisie et dans le monde arabe dès les années soixante quand il réalisa un grand nombre de courtes nouvelles qu'il avait réunies dans un livre intitulé « 52 nuits ». Il a expliqué les caractéristiques de la nouvelle-flash qui pourrait surgir d'un état d'âme, d'un événement, d'un regard ou d'un sentiment. Ce genre littéraire est en expansion sur la scène arabe et internationale et occupe de plus en plus une place prépondérante parmi les autres genres classiques.