Par Khaled Guezmir - Si nous essayons de limiter la démocratie à sa plus simple expression nous retiendrons essentiellement les vecteurs sans lesquelles elle ne peut pas exister ! Le premier c'est le « contre-pouvoir » de la liberté de presse et d'expression qui prend la forme du plasma sanguin, irrigue le corps social tout entier et lui permet l'oxygénation nécessaire à la vie. Tous les régimes autoritaires et dictatoriaux qui veulent se maintenir au pouvoir par le contrôle social veulent l'asphyxier. La Révolution a beau faire trembler les bases de l'absolutisme, il revient au galop, dès qu'un parti dominant s'installe au pouvoir avec l'objectif de viser la durée à tout prix ! Deuxième vecteur : La séparation des pouvoirs. Or, avec le régime d'assemblée que nous vivons en ce moment et où la parti dominant est majoritaire à plus des deux tiers avec les partis périphériques, c'est tout simplement la confusion absolue des pouvoirs. On fait passer les lois qu'on veut et quand on veut ! On a beau parler de la volonté populaire qu'il faut bien sûr accepter et respecter, mais le résultat est là et la démocratie devient tout simplement une « illusion d'optique ». Le législatif et l'exécutif ne font qu'un et la faute n'est pas celle du peuple des citoyens mais celle du « peuple des votants » ! A ce propos, le peuple des citoyens devrait exiger à l'avenir que les partis candidats aux magistratures suprêmes de l'Etat, indiquent clairement leurs intentions quant à la conception du modèle « culturel » qu'ils veulent édifier et construire une fois au pouvoir. Je dis cela parce que le parti dominant, aujourd'hui, n'a jamais dit au peuple des citoyens qu'il avait l'intention « d'islamiser » les institutions, les ministères, les gouvernorats, les ambassades etc… en un mot l'Etat ! Bien au contraire au vu du programme, le parti « Ennahdha » candidat à la direction de l'Etat s'est présenté comme un parti « civil » (et non religieux), démocratique et respectueux des règles de base de la démocratie politique telle qu'elle est pratiquée en Occident. La campagne électorale d'Ennahdha n'a jamais été axée sur « l'islamisation » de l'Etat et de la société et beaucoup de « citoyens votants » on pris cela pour des promesses fermes et irrévocables… Maintenant ils ont du déchanter et c'est pour cela qu'il faut exiger à l'avenir lors des prochaines élections prévues en 3013… ! (excusez l'erreur de frappe, il s'agit bien de 2013), donc, exiger des partis, des programmes clairs à ce niveau, à savoir celui de l'identité et au mode de vie qu'on veut imposer aux Tunisiens par la suite. Le dernier vecteur c'est l'alternance pacifique et démocratique au pouvoir. Là, l'opposition est confrontée non seulement à son destin mais son effritement et sa faiblesse ne peuvent qu'encourager les tentations absolutistes des partis victorieux avec de larges majorités. La dernière élection présidentielle française peut constituer pour nous « peuple des citoyens » un vrai laboratoire de science politique. Ceux qui rejoindront parmi nous le « peuple des votants » doivent comprendre pourquoi M. Hollande président, populaire et sympathique, pourtant, élu après un certain ras-le-bol des Français à l'égard du « style monarchique de Sarkozy », ne peut pas devenir un dictateur ! C'est tout simplement qu'il a été élu à 51,7% et non à 70% et plus ! Et malgré cela le débat électoral entre les deux hommes a été clair et net quant au modèle social et culturel que chacun veut donner à la France dans les cinq ans à venir. Alors que dire d'Ennahdha chez nous qui veut remodeler la société et la culture de notre peuple pour la prochaine « éternité », sans nous avertir ! Feu, ma mère aurait dit : « « Ya sidi warrini kbal ma tokhtobni ! ». Notre exigence première c'est de savoir et d'aller aux urnes en conséquence de cause. C'est pour cela qu'il faut bien scruter les programmes électoraux des partis à l'avenir pour bien comprendre à quelle sauce nous allons être mangés pour les décennies à venir ! Quant à l'opposition qui n'arrête pas de se désunir pour s'unir, nous verrons demain, comment elle risque l'implosion et avec elle de briser l'élan démocratique de ce pays ! Et là, elle n'aura que ce qu'elle a mérité depuis le 23 octobre dernier.