La deuxième période transitoire dans la transition démocratique a vu son deuxième épisode commencer avec les élections du 23 octobre et devra sans aucun doute définitivement s'achever solennellement par la mise en place des nouvelles institutions de la deuxième République. Mais vue la cadence avec laquelle se déroulent les travaux de la Constituante, le doute a pris le dessus sur l'euphorie qui a accompagné les premiers jours des élections. Ira-t-on à terme, comme vient de l'annoncer Mustapha Ben Jaâfar lors de la clôture des débats sur la loi de Finances complémentaire avant le 23 octobre prochain ? Ainsi pour le volet rédaction de la loi fondamentale de la prochaine République, le délai d'une année serait respecté. Qu'en sera-t-il des élections ? Hamadi Jébali, chef du Gouvernement provisoire avance la date du 30 mars prochain, sinon ce sera en été. Est-ce réalisable ? Les avis divergent. Ahmed Brahim, président de la Voie Démocratique et Sociale (VDS), un parti né de la fusion entre Ettajdid, le Parti du Travail Tunisien (PTT) et des indépendants du Pôle Démocrate Moderniste (PDM), pense que l'échéance du 23 octobre pour la rédaction de la Constitution va de soi. « Elle aurait dû être l'objet d'un engagement clair au niveau de la loi d'organisation provisoire des pouvoirs, pour fixer une date limite. Normalement l'ensemble des nouvelles institutions devait être fonctionnel en l'espace d'une année. La déclaration de Mustapha Ben Jâafar est une déclaration. Rien de plus. Il y a des déclarations diverses. C'est quelque chose de positif, pourvu que tout le monde s'engage à respecter cette date. Cela suppose un rétro planning. » Ce rétro planning n'a pas été fait. Il faut tout réussir avant l'automne. Quant à l'échéance des prochaines élections proposée par Hamadi Jébali pour le 30 mars 2013, Ahmed Brahim, est d'un autre avis pour dire qu'il faut au préalable mettre en place l'Instance chargée de superviser les élections. La moitié des non-inscrits devrait s'inscrire. Il croit que si la volonté politique réelle existe, il sera possible d'organiser ces élections. « C'est dans le camp du Gouvernement qu'il y a une résistance à la fixation d'une échéance définitive ». Le Doyen Sadok Bellaïd pense que la date du 23 octobre pour la rédaction de la Constitution peut être respectée, s'il n'y a pas de blocage politique. « Ce rendez-vous du 23 octobre, je l'ai réclamé depuis, plus d'une année. J'ai insisté là-dessus à plusieurs reprises. La rédaction de la Constitution pouvait se faire en trois ou six mois, douze mois net. Dans une conférence de presse avec mon ami Jawhar Ben Mbarek, nous avions dit qu'il y a des échéances et des défis. Plusieurs défis socio-économiques placent la Constituante dans l'obligation à mettre urgemment les bouchées doubles. On avait même parlé d'un référendum. La Constitution sera adoptée intra-muros ». Sadok Bellaïd appelle à ce que le travail nécessaire soit fait pour les prochaines élections, municipales, législatives et présidentielles. « Nous avons un véritable agenda très lourd. Ce sont des élections inévitables ». Concernant la deuxième échéance, celle des élections avancée par le Chef du gouvernement, pour le 20 mars 2013, le Doyen se montre sceptique. « Je doute fort que le mois de mars ou avril soient raisonnables pour les prochaines élections. On va enterrer une belle et honorable institution, l'Instance Supérieure Indépendante des Elections (ISIE), vendredi prochain. On va la remplacer par une institution qui prête à équivoque. La succession à l'ISIE demande du temps. Il faut une loi électorale avec ses différents volets, législatif, présidentiel et municipal. Il faut trouver le temps minimum nécessaire pour organiser ces élections. En plus, il faut espacer les échéances électorales par des délais raisonnables pour pouvoir souffler, ce qui est impossible à réaliser en l'espace de quelques mois. Nous sommes en présence d'une proposition double dont est irréalisable et l'autre difficilement réalisable. Le Gouvernement sait qu'on ne peut respecter les deux échéances à la fois. Il présente un paquet de deux choses dont une est réalisable, la rédaction de la Constitution pour estomper l'ardeur des gens. La seconde relève de l'irréalisable. Le Gouvernement pense que les gens vont mordre. Il s'agit là d'une véritable tromperie et une supercherie parce que tout le monde sait que personne n'est prêt. La Gauche est éparpillée. L'initiative de Béji Caïd Essebsi est bloquée. Des partis fusionnent pour se disloquer juste après. Un nouveau parti d'extrême droite vient d'être légalisé. Il va exiger d'avoir le même temps de préparation que les autres partis ». Sadok Bellaïd est persuadé qu'il s'agit d'une stratégie de tromperie, car « le Gouvernement est dépassé par les évènements ».