. Un huissier notaire et des salafistes interviennent pour censurer des œuvres jugées impies, tandis que Néjib Chebbi, Ettakattol et Bochra Ben Hamida soutiennent l'exposition. . « Le flou artistique règne, jusque-là, parce qu'on n'a pas encore résolu des questions liées au religieux, au social et au politique dans notre société qui vit une période de transition non sans heurts. » avance Fawzi Bouaziz, sociologue. . « Celui qui se gausse de la divinité ou de la personne du Prophète tout en étant conscient de la gravité de ses actes est considéré « mécréant » par l'ensemble des ‘'Ulémas'' » déclare Sadok Arfaoui, conseiller du ministre des Affaires religieuses. . Le ministère de la Culture rappelle que la gestion de l'espace Al Abdellia ne relève pas de ses prérogatives et que l'exposition en question ne fait pas partie de son Agenda .
Une exposition jugée politiquement incorrecte est celle placardée sur les murs du palais d'Al Abdellia , où se tient comme à chaque année ‘'le printemps des arts'' depuis dimanche dernier. Les faits ont fait couler beaucoup d'encre et on a évité de justesse de faire couler du sang si les agents de la sécurité n'étaient pas intervenus à temps... Néjib et Issam Chebbi qui se sont déplacés sur les lieux, ainsi que d'autres personnalités qui se revendiquent du camp progressiste ont exprimé «leur indignation à l'égard de ceux qui se prennent pour tuteurs de la société et gardiens du temple de la bonne morale ». Le parti Ettakattol , dans un communiqué publié hier, a fini lui aussi, par se ranger du côté de ceux qui défendent la liberté d'expression » Mais est-ce au détriment de sa portée et/où de la manière dont on se prend pour traduire l'expression plastique ? « Il faut prendre en considération les connections entre le culturel, le social et le politique. Une exposition d'art comme celle qu'on a vu au Palais d'Al Abdellia doit être analysée non pas en tant que telle mais à la lumière de ce qui advient de notre société en phase de transition. Tout s'imbrique et on ne peut démêler le vrai du faux. Et c'est normal que l'on réagisse d'une certaine manière », nous dit Fawzi Bouaziz sociologue qui ajoute « le flou artistique règne parce qu'on n'a pas encore résolu des questions liées au religieux, au social et au politique. Tant que la constitution n'a pas tranché, rien ne changera à cette situation intenable caractérisée par la bipolarisation. La manipulation politique n'est pas à bannir. » Et c'est là que le bât blesse, et c'est ce qui a, a fortiori, provoqué la ‘'désolidarisation'' du ministère de la Culture de la manifestation qui rappelle que l'exposition et la gestion de l'espace Al Abdellia relève des prérogatives de l'Agence de la mise en valeur du patrimoine et de promotion culturelle et que l'autorisation de la tenir a été délivrée par la municipalité de la Marsa.
Flash Back
Mais que s'est-il passé au juste ? Et qu'est-ce qui a fait que le mauvais temps caractérise cette session du printemps des arts ? Tout a commencé lorsqu'un huissier notaire est venu pour exclure certaines œuvres qui posaient problème. Les choses ont dégénéré lorsqu'un groupe de salafistes s'est déplacé pour censurer de leurs propres mains quelques tableaux. Les accrochages verbaux entre artistes et salafistes étaient au rendez-vous. Les agents de la sécurité qui s'y trouvaient ont permis d'éviter le pire... La censure d'œuvres d'art a fini par provoquer un véritable coup de tonnerre dans le rang des défenseurs de la liberté d'expression qui ont vu en cela une atteinte aux libertés des uns et des autres et bien entendu une continuité d'un scénario qui a commencé avec Persepolis. Les conservateurs ont considéré l'exposition comme étant une provocation qui tente de semer la zizanie dans la société. « La présence du religieux pose problème dans notre société. On doit repenser la place du fait religieux que l'on perçoit d'une manière particulièrement crispée. Il faut donc envisager un vrai débat pour résoudre le problème à la source.» commente dans la foulée Fawzi Bouaziz. Cela nous ramène à repenser le rôle de l'art dans notre société et à la place de l'artiste. Est-ce qu'une œuvre d'art doit obligatoirement déranger ? Est-ce qu'un artiste doit bousculer le conventionnel pour mériter de sa fonction dans la société ? Encore est-il, est-ce que l'exposition d'Al Abdellia tient du purement artistique où est-ce tout simplement du mauvais goût ?
Rôle de l'art dans la société
La réponse à cette question nous a été donnée par Sadok Arfaoui, conseiller du ministre des Affaires religieuses qui nous explique que « le cosmos est l'œuvre idéale du Créateur suprême à qui rien n'a échappé. C'est un art palpable qu'on peut méditer. Pourquoi alors chercher ailleurs le laid quand on a le Beau de l'œuvre divine. » Notre interlocuteur tranche quant à l'atteinte à la divinité et à la personne du Prophète en nous rappelant des versets du Coran de la Sourate ‘'Attawba'' (Le repentir) pour caractériser les auteurs de ces œuvres d'art comme étant des hypocrites. « Dès lors que la représentation de la divinité et du Prophète n'est pas permise, on peut dire par extrapolation que les caricaturer est encore plus grave. C'est prohibé. L'ensemble des théologiens considère mécréante toute personne qui porte atteinte, d'une manière ou d'une autre, à la divinité ou à la personne du Prophète . Mais si l'auteur de cette atteinte le fait pour des raisons artistiques il faut lui expliquer que cela relève du prohibé. » commente-t-il. Et si cela relève du mauvais goût ? La réponse nous a été donnée, cette fois, par un internaute qui, pour critiquer l'exposition d'Al Abdellia parle de sa prochaine expression plastique « avec de la merde de rat, question de faire genre arriviste snobinard et puant ? Un chef d'œuvre non ? »