• Pas de projet fédérateur mais pluôt un faisceau de vindictes • Il se peut que les un s'allient avec Ennahdha et les autres avec Caïd Essebsi
Des efforts se poursuivent afin de rassembler les forces modernistes et progressistes. Ainsi, le parti Républicain a concrétisé une union entre le Pati Démocrate Progressiste (PDP) avec Afek Tounes et d'autres petits partis et des personnalités nationales, en dépit des retraits qui ont suivi sa création. La Voie Démocratique et Sociale (VDS) est née d'une fusion entre Ettajdid, le Parti du Travail Tunisien (PTT) et les indépendants de l'ancien Pôle Démocrate Moderniste (PDM). L'initiative de Béji Caïd Essebsi, l'Appel de Tunisie se projette comme un parti non classique qui serait ouvert et a l'ambition de ratisser large. Où en est-on avec les forces qui se proclament de Gauche ? Pourquoi tardent-elles à s'unir ? Le feraient-elles bientôt ?
Mohamed Kilani, secrétaire général du Parti Socialiste de Gauche (PSG) fait le constat amer de l'absence de projet d'union. « Chaque partie se suffit à elle-même. Elle a une ligne et des orientations générales et agit dans l'individualité sans autre considération autres. Il n'existe pas de véritable projet d'union. Il y a eu dernièrement des tentatives dans la famille des Patriotes qui n'ont échoué ». Il explique cet échec par le fait que la question centrale n'a pas été posée. Il s'agit de faire le bilan de l'action de la Gauche qui n'a pas été abordé de façon rationnelle et constructive. « Le bilan a été fait de façon sentimentale ». Avec l'échec dans l'établissement du bilan du passé, la lecture du présent est fausse. Par ailleurs, existe des divergences dans les références à utiliser. « La Gauche n'a pas de référence théorique propre. Elle n'a pu construire cette théorie. Elle s'est contentée de copier dogmatiquement l'étranger et les autres expériences. Ce qui a produit des divergences consécutives aux différences des expériences à l'échelle internationale. La Gauche n'a pas sa propre identité. Elle reste encore dans l'infantilisme ». La réalité a beaucoup changé. Elle impose la prise de positions concrètes. « La Gauche s'est cantonnée dans une posture contestataire et n'a pu se muer en une force de proposition, une force alternative ». Mohamed Kilani va plus loin et pense que la Gauche va encore rater d'autres occasions. « Elle est incapable de procéder à une lecture vitale et exhaustive des résultats des élections présidentielles en Egypte où la Gauche a voté pour le mouvement islamiste, afin de lutter contre les symboles de l'ancien régime », dit –il. Aujourd'hui, des forces de Gauche s'opposent à l'initiative de Béji Caïd Essebsi. « Elles devraient se poser la question cruciale : quelle République voulons-nous ? Veut-on qu'elle soit démocratique ou quelle reste dictatoriale ? Le projet de société n'est pas posé. Les leaders de la Gauche ont des problèmes avec le RCD, l'ancien pouvoir...Ils ne posent pas le problème en termes de Sciences politiques, mais en termes subjectifs », ajoute notre interlocuteur. Le résultat ? « Une frange de la Gauche peut se rallier à Ennahdha, une autre rejoindra les rangs des libéraux, ou se placera avec les Nationalistes arabes. Pour s'unir entre eux, il faut attendre. Ils refusent tout esprit d'accord minimum. Entre eux, ils s'entretuent. C'est la réalité amère. Parler de l'unité de la Gauche est illusoire ».
De son côté Me Chokri Bellaïd, leader du Mouvement des Patriotes Démocrates se montre plutôt optimiste. Il rappelle que « la Gauche a longtemps vécu sous la répression et les procès. Elle a joué un rôle capital du 17 décembre au 14 janvier. Elle vient de quitter la clandestinité. Les discussions au sein de la Gauche se font de façon sûre et rassurante. Pour la Gauche patriote et démocrate, des pas sérieux ont été faits vers le congrès d'unification dont les travaux se dérouleront du 31 août au 2 septembre prochain. Pour l'ensemble de la Gauche, un large front politique sera créé ». Des pourparlers sont en cours avec le Parti du Travail Patriote Démocrate (PTPD) et le Parti Ouvrier Communiste de Tunisie (PCOT). Des efforts sont fournis en vu des prochaines élections et au delà. « Il s'agit d'une Gauche militante qui se présente comme une alternative. Nous dévoilerons notre programme prochainement. L'opération d'unification avance, alors les divisions se multiplient chez les libéraux et les centristes », précise Me Chokri Bellaïd en ajoutant que « tout se fait sans tapage médiatique. Nous avons tiré les leçons des expériences passées. Nous avons fait notre auto critique. Nous ne rejetons pas nos erreurs sur les autres. Nous préparons nos approches à soumettre au peuple ». Il est certain que la Gauche est en mesure, si elle s'unit à l'échelle nationale et régionale, de battre en brèche la bipolarisation entre une Droite sous couverture religieuse et une Droite libérale. Pour lui le vrai clivage existe entre les forces révolutionnaires et celles qui sont contre la Révolution. « Nous ne nous mettrons pas sous le parapluie de Si El Béji, car nous considérons qu'il n'y a pas de différence fondamentale entre ce qu'il propose et ce que fait la Troïka ».