Chercheur dans le domaine des arts plastiques et particulièrement chasseur de figures et d'images appartenant à notre patrimoine, nous avons été sollicités par une découverte récente dans le sud de notre pays et plus particulièrement à Redeyef (à quelque 3km au Nord de Redeyef). Cette découverte a retenu notre attention d'une manière telle que nous ne pouvions pas ne pas réagir. Redeyef est connue comme une région du bassin minier (phosphate). Elle est vide, sèche, brulée par le soleil, située au Sud Ouest de notre pays et est accolée à l'Algérie. Personne ou à peu près personne ne croit que cette région était il y a quelques millions d'années l'une des régions les plus « civilisées » de la Tunisie surtout à travers les installations capsiennes du Wadi Redeyef. Ses productions artistiques sont multiples et plus particulièrement celles qui ont été découvertes récemment comme gravure rupestre du Jebel Douken Jfara. Douken Jfara vient enrichir les connaissances que nous avions de la préhistoire artistique de notre pays. Il est clair que l'art préhistorique en Afrique du Nord et plus particulièrement en Tunisie n'est pas passé par les mêmes manifestations par les quelles il est passé en Europe (Lascaux, Altamira). L'art rupestre de ces deux sites européens s'est développé pendant les périodes paléolithiques, tandis que l'art rupestre qui s'est développé en Tunisie n'est apparu que dans la période néolithique ou épipaléolithique.
Indépendamment du style pratiqué par la figuration de la préhistoire et indépendamment des stations de peinture rupestre découvertes à « Djebel Oueslat », à « Souar », d'autres sites ont été aussi découverts à « Redeyef », à Douken Jefara dans la région de Gafsa. Cette découverte enrichit notre connaissance de notre préhistoire et plus particulièrement de la gravure rupestre figurative découverte en 2010 dans cette région par Moussa Tababi. Ce site (Redeyef) est en cours d'évaluation archéologique, chronologique et stylistique. Il signifie que la Tunisie, à l'instar d'autres régions d'Afrique de Nord (Sud Ouest Algérien et Sud Marocain et même au Sahara), possède également le même patrimoine en gravure et en peinture rupestres datant probablement de la même période "néolithique" . Aujourd'hui, nous constatons que les gravures trouvées à Redeyef (Doukan Jefara) sont inédites et se déploient à travers trois espaces qui sont: premièrement, des gravures sur la paroi de la falaise. Deuxièmement, des gravures sur la paroi de l'abri et troisièmement, des gravures sur un rocher orné sur trois faces. Ces gravures sont des représentations des silhouettes humaines, d'animaux gravés d'une manière réaliste ou schématisée et des formes géométriques parfois non identifiables et abstraites. Il s'agit de gravures à lignes continues et profondes. Elles traduisent bien la richesse de la région de Gafsa comme site préhistorique surtout en gravures rupestres. Elles traduisent aussi que cette région a atteint lors du Capsien et du néolithique un degré très élevé de civilisation et d'art figuratif. Elle peut signifier aussi que d'autres sites de peintures ou de gravures figuratives pourraient être découverts dans la région. Reste qu'un effort important de recherche est nécessaire pour inventorier d'une manière exhaustive tous les sites non encore fouillés dans la région et dans toute la Tunisie.
« Souar »
La peinture rupestre de Souar en Tunisie est située au Sud de Zaghouan dans la région d'Elfahs. Il s'agit de peintures figuratives d'êtres humains et d'animaux réalisées sur des rochers à l'air libre. Le versant Sud de Djebel Ammar est rempli d'empreintes de main en pochoir, le versant Nord déploie des peintures rupestres représentant des figurations humaines et animales diverses. Dans l'une des peintures se voit une représentation d'un homme debout face à un Mouflon. Dans une deuxième représentation (peinture ocre rouge) se montre un homme étendu exagérément longitudinal. La représentation animale est plus réaliste et arrive à même à mettre en valeur une sorte de volume (clair-obscur).
« Djebel Oueslat »
Ain Jloula (Lucilius en latin) peinture rupestre datée de néolithique y en fait l'objet à partir de 1911 de plusieurs études et publications. L'exemple le plus frappant de cet art est l'art de Djebel Oueslet, cet art de la bidimentionnalité monumental a été découvert sur les collines abruptes d'Ain Jloula. Nonobstant l'influence de la peinture rupestre Saharienne, cet art s'est exprimé dans une grande richesse chromatique et avec un traitement graphique très original. L'article de madame Nabila Abdeljaouad, très récent nous parle de cette découverte inouïe d'une peinture rupestre de Djebel Oueslet faite en 1911 déjà par M. H. Roux. Cette peinture ressemble beaucoup à la peinture rupestre du Tassili dans sa phase des « têtes rondes » Bubaline et celui des Bovidés. En fait, La peinture rupestre en Tunisie n'a jamais été jusqu'à nos jours étudiée d'une manière exhaustive. Les découvertes récentes montrent que les peintures rupestres en Tunisie sont nombreuses et qu'elles font partie de l'ensemble de ces réalisations du néolithique qui se sont répandues dans toute l'Afrique du Nord préhistorique et dans tout le Sahara (Maroc, Algérie (Sud Ouest), Mauritanie, Tassili, Tchad, Mali, Niger, Fezzan,...etc). Karima Refai (Chercheur et enseignante à L'ISBA Nabeul)