Les prérequis d'un embrassement général sont là : violence, Intifadha qui se propage au nord Ouest, marche à Tunis, et imminement, une manifestation de milliers de Silianais à Tunis même. Hier, la manifestation dans la capitale a été édifiante à plus d'un titre. D'abord elle était pacifiste, ce qui restitue toute leur noblesse aux revendications d'une région comptant depuis toujours parmi les laissés pour compte. Ensuite, elle distille un message de solidarité qui devrait interpeller le gouvernement. Le 17 décembre 2011, en effet, l'étincelle s'était déclenchée à Sidi Bouzid, embrasant Kasserine et d'autres régions avant de parvenir, dans un processus inexorable, à Tunis le 13 janvier, puis le 14, faisant ainsi tomber le régime de Ben Ali. Enfin et surtout, ces manifestations sont légitimées par cette formidable force de frappe historique qu'est l'UGTT. A ce propos, il convient de préciser un élément déterminant dans le processus de vie de la Centrale Syndicale. Aujourd'hui, elle est aussi partie prenante dans un modèle de société et cela fait qu'elle se cantonne plus dans son rôle contractuel comme l'ont toujours voulu tous les régimes et tous les gouvernements depuis l'indépendance. On ne comprend pas, dès lors, que les membres du gouvernement affichent une arrogance démesurée et à la limite inconsciente face à l'acuité du problème. On ne saurait justifier, ni expliquer d'ailleurs que la survie institutionnelle et politique d'un gouverneur fasse l'objet d'une rhétorique de point d'honneur malvenue et trop obstinée. Surtout, surtout, l'anathème jeté sur la Ligue des droits de l'homme, le Font Populaire, Nidaâ Tounès et, bien sûr l'UGTT, ressemble à une diversion politicienne. De sorte que, comme l'a si bien illustré le plateau de Moëz Ben Gharbia et comme l'a si bien dit Hamma Hammami, on occulte par le plus classique et le plus idiot des procédés, les vrais problèmes.