La ville d'Akouda, située à dix kilomètres de la Perle du Sahel Sousse, a enfanté un bon nombre d'hommes de lettres et de sciences. Nous en citons particulièrement Salem Ben Hmida ,"le philosophe du Sahel", Rajah Ibrahim, son fils Hafedh Ibrahim, Ahmed Somayia (qui rendit d'énormes services aux Tunisiens lorsqu'il était chef de service à l'hôpital musulman de Paris, devenu hôpital Avicenne) et autre Ali Ladhari ,l'un des premiers ophtalmologues tunisiens ayant également présidé l'Etoile sportive du Sahel au début des années trente. A cette pléiade d'hommes ayant servi la Tunisie avec beaucoup de passion et de fierté, nous joignons Ibrahim Ben Hmida Lakoudi, l'un des pionniers du théâtre en Tunisie. C'est à ce dernier que sera dédiée la manifestation culturelle qui sera organisée, du 6 au 9 décembre , par la maison de la culture d'Akouda sous l'égide du commissariat régional à la culture de Sousse. Il s'agit de la deuxième session des "journées théâtrales Ibrahim Lakoudi".
Avant d'étaler le programme de cette manifestation, nous trouvons judicieux de présenter cette personnalité du monde du théâtre tunisien à nos lecteurs. D'ailleurs, Mohamed Boudhina et surtout Moncef Charfeddine ont rendu, à travers leurs livres, un vibrant hommage à cette personnalité théâtrale tunisienne.
Ibrahim Lakoudi, qui appartenait à l'une des familles les plus huppées d'Akouda, est né en 1890. C'est à la mosquée Ezzeitouna, à Tunis, qu'il avait choisi de faire ses études .C'est là qu'il avait fait la connaissance des membres de la troupe théâtrale "Echahama" à laquelle il adhéra. En compagnie d'Ahmed Bouleymane et autres compagnons de route, il s'en sépara assez rapidement. Ce groupe dissident va former l'ensemble théâtral "Al Adaab" et c'est à Ibrahim Lakoudi que fut confiée la direction artistique. En 1911, il campa le rôle principal dans la pièce "Salaheddine El Ayoubi". Les cheikhs de la Zeitouna n'apprécièrent guère que l'un de leurs disciples fasse de "l'interdit". C'est ainsi que notre artiste fut tout simplement écarté de l'enseignement zeitounien alors qu'il s'apprêtait à passer l'examen d'"Ettatouii".
En 1913, Lakoudi réintégra "Echahama" mais il dut déchanter avec le déclenchement de la première guerre mondiale. C'était sans compter avec son amour pour le quatrième art puisqu'il arriva à former une petite troupe qui joua des pièces dans les maisons et les huileries du Sahel. Juste après la guerre, il retrouva "Al Adaab" et le rôle du pharaon dans "l'opéra Aida".
Il eut la chance de travailler avec le célèbre artiste égyptien George Abiadh dans "Attamthil El Arabi". Mais en 1929, il fut écarté de cette troupe, en compagnie notamment de Jalaleddine Naccache et Belhassen Ben Chadli, pour avoir demandé une augmentation de leur salaire mensuel. C'est alors qu'il décida de mettre sur pied une nouvelle formation théâtrale portant le nom de "IBrahim Lakoudi" qui présentera le 31 mai 1930 "Salaheddine El Ayoubi"(Saladin) avec quelques interventions musicales de Fadhila Khitmi entre les différents actes. Parmi les autres œuvres théâtrales jouées par cette nouvelle troupe , nous citons "Majnoun Leila", "Antar","Outail"(présentée à Tunis et à Sousse) et "Intiquam El Mahraja "(la vengeance du Maharadjah), écrite par le célèbre artiste égyptien Youssef Wahbi ; (ce dernier en a fait un film où il joua aux côtés d' Amina Rizq).
Quelque temps après, I.Lakoudi retrouva "Attamthil El Arabi" pour s'occuper de la formation des actrices en insistant particulièrement sur le bon usage de la langue arabe. Lorsque Mustapha Sfar proposa l'unification des différentes troupes et associations théâtrales en une seule dénommée "L'union théâtrale", Lakoudi occupa le poste d'adjoint du directeur artistique Béchir Methenni. Il y resta jusqu'à sa mort, le 6 novembre 1942, en pleine deuxième guerre mondiale. Ainsi, les journées théâtrales Ibrahim Lakoudi constituent une reconnaissance largement méritée d'une ville (Akouda) à l'un de ses militants. La seconde session de cette manifestation culturelle, qui rentre dans le cadre du mois du théâtre de la maison de la culture d'Akouda, comporte un programme fait de présentation de pièces de théâtre, d'une table ronde et d'ateliers. En voici le programme détaillé :
-Le 6 décembre : la pièce "Skontri" de la société du théâtre de la ville de Nabeul (de Abdessatar Seghaier). -Le 7 décembre : la pièce "Elli yehseb wahdou" de la société "Roua" de Sousse (de Mohamed Ali Said) - Le 8 décembre : table ronde sur le thème "Brahim Lakoudi , un symbole sur le chemin de la création " avec la participation d' hommes et femmes de théâtre et autres férus de culture . - Le 9 décembre : la pièce "Mouzakarat cheb majnoun "de la société "Brouva" de Tunis (de Moez Achouri). Toutes les présentations auront lieu à la maison de culture d'Akouda à partir de 18 heures. Par ailleurs, des ateliers relatifs au métier d'acteur auront lieu du 6 au 9 décembre à partir de 10 heures. Hassen