Mercredi 2 décembre, l'après-midi, France 2 diffusa successivement Les Ripoux et Ripoux contre ripoux, deux films français des années 1980 qui récoltèrent un énorme succès populaire et deux césars. Les deux longs-métrages sont des comédies sur la corruption dans le milieu policier. Dans le premier, l'inspecteur René Boisrond qui vit essentiellement de pots-de-vin et de commissions illicites en tous genres apprend les ficelles du « métier » à un jeune collègue novice (François Lesbuche) dont il fera un pourri de première classe. Dans le deuxième film, les manœuvres des deux flics sont démasquées et ces derniers sont remplacés par les inspecteurs Guy Brisson et Jean-Pierre Portal qui s'avèrent par la suite plus corrompus que leurs prédécesseurs. Après avoir regardé ces deux comédies policières, nous passâmes un bon bout de temps à nous demander pourquoi France 2 les avait passés ce mercredi-là. La chaîne suggère-t-elle un parallèle entre l'ère Sarkozy et celle de Hollande ? S'agit-il plus simplement d'amuser les Français en ces fêtes de Nouvel an, en leur proposant de rire de leur police nationale? Après tout, Claude Zidi (le réalisateur de la série des Ripoux) l'a souvent fait dans ses comédies très légères. En fin de compte, nous renonçâmes à penser aux raisons de France 2, pour nous concentrer sur les motifs qui amènent un Tunisien dont le pays est actuellement en délicate période transitoire, à passer plus de trois heures à regarder les deux films de Zidi. Les réponses sur lesquelles déboucha notre méditation sont très convaincantes. Pour ajouter du suspense à cet article, nous vous laissons un peu de temps jusqu'à ce que vous les deviniez tout seuls ! Olfa n'avait pas la tête d'un ripou ! Le même jour, mais il faisait nuit, nous suivîmes sur Hannibal TV l'interview de la blogueuse Olfa Riahi. Celle-ci pleura abondamment en faisant son mea culpa à l'adresse de la dame que ses révélations avaient impliquée dans l'affaire du « Sheratongate ». C'était pathétique, mais en même temps très édifiant quant à l'effronterie dont il faut s'armer en pareils contextes et dans le genre d'expérience journalistique choisi par la jeune et fragile collègue. De plus, lorsqu'on s'attaque à un gros morceau, notamment en politique, il faut s'attendre à toutes les conséquences –fâcheuses ou heureuses- que le coup peut entraîner. Sans vouloir verser dans un sexisme de mauvais aloi, nous pensons qu'Olfa s'y était prise avec le cœur d'une femelle, et la passion d'une sentimentale. D'ailleurs, c'est en partie par solidarité féminine (féministe même) que la pauvre blogueuse présenta ses excuses à la parente lésée du ministre des Affaires étrangères. Il y avait un peu trop d'honnêteté et de sincérité de la part d'Olfa Riahi. Un autre, plus culotté qu'elle, n'aurait pas versé la moindre larme, aurait tu toute fibre émotive de son corps et aurait sorti pour l'occasion toute la dose d'impassibilité et de cynisme dont il est pourvu. Nous croyions l'autre jour, en appréciant ses bravades sur Ettounssiya, que la jeune Olfa possédait la force de caractère et le flegme requis pour affronter ses vis-à-vis dans l'affaire du Sheraton. Or, et de son propre aveu, elle passa après les révélations une semaine extrêmement éprouvante sur le plan nerveux. Les séquelles de cette dure épreuve psychologique étaient encore visibles dans ses gestes et discours, mercredi en face de Faouzi Jerad, le journaliste d'Hannibal TV. Certes, elle donna par moments l'impression de surmonter ses faiblesses et de laisser transparaître dans sa voix le même ton de défi et de courage qu'elle arborait au début de l'affaire, mais nous la sentions beaucoup plus humaine, beaucoup plus « friable » qu'elle n'en avait l'air. C''est clair, elle n'avait pas la carrure ni le cœur d'un ripou ! D'ailleurs, « ripou » est masculin et n'a pas d'équivalent féminin ! Olfa ne donnait pas non plus l'air d'une arriviste sans foi ni loi, prête à toutes les volte-face pour aboutir à ses fins. Dieu sait pourtant, qu'en ce moment, bien des crabes (mâles et femelles) ont sorti la tête de l'eau et se sont déjà mis à aiguiser leurs pinces en vue d'un éventuel festin « révolutionnaire » ! Grimpeurs » d'hier et d'aujourd'hui En effet, après la « Révolution », nombreux sont les profiteurs de l'ancien régime qui ont très vite compris qu'il y avait un bon parti à tirer de la nouvelle ère. Nous les revîmes alors très tôt sur tous les écrans de télévision : journalistes amoureux de leurs tronches de cochons, universitaires à la langue pendue dont ils lècheraient le cul d'une guenon si leurs maîtres le leur demandaient, juristes en mal de gloire et de clients, « écrivains et analystes politiques » à deux sous, bref toute une horde de charognards qui, hier encore, flattaient le prince déchu et se courbaient devant sa fière épouse. Aujourd'hui, via les médias mis à leur disposition, ces faux-culs se retournent contre l'élite éclairée de la Tunisie, contre les laïques et les modernistes qu'ils accusent d'avoir perverti la société tunisienne et de ne pas vouloir répondre favorablement à la politique de la main tendue adoptée par Ennahdha et le Gouvernement. Hier encore, ces nouveaux crabes décrétaient l'échec lamentable des hommes de Hamadi Jebali et soutenaient l'urgence d'un remaniement ministériel. A propos de remaniement, il paraît que le prochain récompenserait quelques uns de ces flagorneurs nés avec lesquels nos chaînes de télévision nous ont si méthodiquement familiarisés. Le petit écran est en effet un bon tremplin pour les amateurs d'escalade politique. Mais les meilleurs « grimpeurs » doivent en même temps se distinguer dans l'art de ramper ! N'est pas « premier de cordée » qui veut !