Le Tribunal militaire Permanent de 1ère instance de Sfax a rendu son verdict, hier mardi 29 janvier 2013, à l'aube, dans l'affaire des martyrs et des blessés de Regueb (gouvernorat de Sidi Bouzid). En effet, c'est vers le coup de 02h45mn, et à l'issue de 09 heures de délibérations que le tribunal, présidé par le juge Mahmoud Faouzi Masmoudi a prononcé les peines suivantes : 10 ans d'emprisonnement à l'encontre du commandant Mourad Jouini, jugé en état d'arrestation, et 20 ans d'emprisonnement à l'encontre du lieutenant Bassem Akremi, condamné par contumace. Les deux anciens officiers de la sûreté nationale ont en outre été condamnés à verser des indemnisations financières au profit des familles des martyrs. Les deux co-accusés étaient traduits en justice pour répondre des délits d'homicide volontaire et de tentative d'homicide volontaire conformément aux dispositions des articles 59 et 205 du code pénal. Il leur est reproché d'avoir tiré sur des manifestants faisant 05 morts et 11 blessés, lors des émeutes de Rgueb, le dimanche 09 janvier 2011. Dans son réquisitoire, le Procureur de la République, colonel Ahmed Jbel, a conclu à la culpabilité des deux prévenus, sur la foi des nombreux témoignages à charge recueillis dans leur écrasante majorité auprès de membres du corps de la sûreté nationale. Selon l'acte d'accusation, les événements ont été déclenchés, le matin du 09 janvier 2011à la suite de l'agression perpétrée par le lieutenant Bassem Akremi, qui était en état d'ébriété, sur la personne d'un citoyen originaire de la région, ce qui a mis le feu aux poudres suscitant la colère et les protestations des habitants de la ville, devant le poste de police, et ce en dépit de l'intervention du commandant Mourad Jouini, pour apaiser les esprits. C'est alors que les agents de la sûreté nationale ont tiré des coups de feu aux alentours du siège de la délégation, faisant un premier martyr, en l'occurrence, Raouf Boukaddous. Après avoir levé le corps, les manifestants se sont retrouvés de nouveau face à face devant la mosquée avec les agents de la sécurité, qui ont tiré sur eux de nouveau touchant mortellement Mohamed jabli et blessant Zied Kraoui, Moncef Zini, Ameur Taggougui et Adel Chebbi. Par la suite, le lieutenant Bassem Akremi et sa compagnie n°32, qui s'étaient enfoncés dans la cité El Intilaka, ont tiré de nouveau sur des manifestants tuant Manel Bouallagui, Mouaâdh Khlifi et Nizar SLimi, et blessant également Atef Khlifi, Chadi Abidi, Nabil kadri ainsi que d'autres. En plus des témoignages, le réquisitoire du Procureur de la République a comporté d'autres preuves qu'on va retrouver dans l'argumentaire de l'avocat des parties civiles Me Rached Hafnaoui, à savoir les traces de balles dans les corps des victimes, la différence entre les quantités de munitions reçues et celles rendues aux services concernés par les prévenus, les tests et les expertises médicales et autres, les impacts de balles sur les têtes et les poitrines qui prouvent l'intention délibérée de donner la mort aux personnes visées ,etc.... Pour sa part, Me Hassen Ghodhbani, avocat de la défense s'est employé à démonter l'argumentaire à charge en affirmant qu'aucun témoignage n'avat attribué avec certitude l'acte de tuer à son client, le commandant Mourad Jouini. De plus, le dossier bâti sur des généralités est de surcroît truffé de contradictions. Concernant les témoignages à charge, Me Ghodhbani reproche aux avocats de la parte civile ainsi qu'au ministère public d'avoir opéré une sélection dans les documents constituant le dossier de l'affaire et les témoignages recueillis que ce soit auprès de sécuritaires ou de civils, ne citant que ceux qui servent leur argumentation. L'avocat de la défense a surtout présenté un argument massue : « Tous les témoins , y compris les proches des martyrs et des blessés, s'accordent à dire que les tirs sont les faits de snipers, ce qui explique que mon client n'a su qu'il y avait des victimes qu'après coup ayant reçu l'information à ce sujet de la part de tierces personnes. »