La famille du défunt lui retire sa procuration Une conférence de presse a été organisée hier par le comité de défense du martyr Chokri Belaïd, à la « Maison de l'avocat » Boulevard Bab Bénat, au cours de laquelle, les membres dudit comité, à savoir , l'Ordre national des avocats, la Ligue Tunisienne des droits de l'Homme, et l'UGTT, sont intervenus afin d'essayer de jeter davantage de lumière sur ce meurtre qui constitue le premier crime politique depuis 1952, date où fut abattu, presque dans les mêmes conditions, le militant syndicaliste Farhat Hached. Ce comité est composé de deux porte-parole (MMe Faouzi BenMrad et Nizar Snoussi, 3 coordinateurs, un comité juridique et un comité d'information. Selon Me Anouar Basti, membre du comité, 113 avocats se sont proposés pour la défense du martyr. Me Abdessatar Ben Moussa président de la LTDH a annoncé qu'il a pris des contacts avec les différentes instances internationales et les organisations internationales de défense des droits de l'Homme, telles que l'Union des avocats arabes ou certains barreaux arabes et européens en vue de la création d'une instance internationale composée de plusieurs personnalités afin de soutenir l'enquête sur cet acte barbare et inhumain. De son côté le frère de la victime n'y est pas allé par quatre chemin, au cours de sa brève intervention. Il a soutenu qu'il accuse le parti d'Ennahdha, ouvertement et sans aucune équivoque. Déclarations fracassantes ? Cet avocat et porte-parole officiel du comité, avait promis de faire lors de cette conférence des déclarations fracassantes en révélant certains éléments en rapport avec l'affaire. Il avait tout d'abord commencé par critiquer la démarche du juge d'instruction qui n'avait pas, précisa-t-il, entendu la famille de la victime, dont notamment son épouse et son père. Il avait par la suite émis des critiques concernant la procédure, l'enquête ayant été confiée par le juge d'instruction à la brigade criminelle, alors qu'il s'agit d'un crime terroriste. C'est à la brigade anti-terroriste de prendre en charge l'enquête, avait-il souligné. Or il avait auparavant déclaré, que la loi anti-terroriste, qui est une création de Ben Ali, doit nécessairement disparaître C'est une loi qui justifie la torture sous toutes ses formes, avait-il notamment précisé. Par ailleurs Me Ben Mrad a déclaré qu'il a été contacté téléphoniquement par un individu lequel l'a informé de l'entrée sur le sol tunisien de trois personnes venues d'Algérie. C'était la veille de l'assassinat de Chokri Belaïd. Ajoutant que ces mêmes personnes sont reparties, un jour après le crime, comme elles sont rentrées. Evidemment, c'est un Tunisien qui les a aidées à s'évader de la frontière algérienne à Kasserine. Me Ben Mrad a ajouté qu'il demanda au juge d'instruction d'entendre l'informateur en question. Le juge a refusé, puis il a accepté de l'entendre seul et sans la présence d'aucun avocat. L'histoire s'est arrêtée là, car une discussion houleuse s'ensuivit entre lui et certains de ses confrères qui n'avaient pas apprécié qu'il fasse des révélations, risquant par là même de porter atteinte au secret de l'instruction et d'altérer la bonne marche de l'enquête. Les membres du comité qui sont résolus à déployer tous les moyens pour la défense de la victime, tels que Me Mokhtar Trifi ou Me Mohamed Jmour du Watad unifié, sont unanimes à le penser afin d'agir de manière sensée et concrète. Le frère de la victime a indiqué que la famille du défunt a décidé, suite à certaines des déclarations, pouvant nuire à la bonne marche de l'enquête, de retirer sa procuration à Me Ben Mrad qui fait de cette affaire, une question personnelle, déclarant entre autres : « Je ne fais pas confiance au juge d'instruction ». Déclaration jugée gratuite et mal placée selon la famille de la victime, ainsi que certains avocats de la défense. En fait, Me Ben Mrad n'a fait que tourner autour du pot, et son intervention était plutôt un fiasco, car il n'a rien apporté de concret, selon l'avis de la plupart des observateurs.
Ahmed NEMLAGHI
Communiqué du Syndicat des Magistrats Tunisiens Le comité administratif du syndicat des Magistrats Tunisiens, réuni ce jour, vendredi 22 février à son siège social au palais de Justice à Tunis, et ayant pris connaissance des déclarations faites lors de la conférence de presse organisée par l'ordre national des avocats, sur l'affaire de l'assassinat de Chokri Belaïd : 1) Dénonce toutes les déclarations de nature à mettre en doute l'indépendance de la magistrature nationale, ainsi que son honnêteté et sa capacité à rechercher la vérité sur les circonstances de l'assassinat en question. 2) Considère que les déclarations du nommé Faouzi Ben Mrad, entrent dans le cadre du chantage et des actes douteux et irresponsables qui sont de nature à semer la discorde, dans pareille conjoncture, où il est plutôt opportun de conjuguer les efforts afin d'éviter les dérapages dangereux pouvant ébranler le pays. 3) Considère que ces déclarations sont de nature à porter atteinte au principe du secret de l'instruction, et à altérer la recherche de la vérité, outre le fait d'affecter l'intégrité de la magistrature et son indépendance. 4) Assure de son soutien tous les confrères qui rencontrent de pareils dépassements, constituant une atteinte à l'indépendance de la magistrature et une ingérence inhabituelle dans son domaine. 5) Rappelle sa position rejetant tous les actes et les pratiques de nature à semer le doute dans l'honnêteté des juges et leur capacité, pour le seul but d'affaiblir la magistrature de façon à l'empêcher de contribuer à la consolidation de la stabilité du pays et à la réussite de la transition démocratique.