Une promenade attrayante et facile ? A une cinquantaine de kilomètres de la capitale : les pentes Sud du Jebel Sidi Zid, boisées et giboyeuses, cachant une nécropole – à haouanet – très curieuse. Pique-nique, sous les pins, assuré et petite randonnée pour les amateurs. Environnement dégradé Aller au Jebel Sidi Zid est aussi facile qu'intéressant. Le plus simple, à notre avis, consiste à emprunter l'autoroute vers Sousse et en sortir à la bretelle du Mornag, en face d'énormes carrières abandonnées qui éventrent le flanc Ouest du Bou Kornine. Les millions de visiteurs étrangers qui se rendent à Hammamet, passent par là. A quand une loi qui oblige les entrepreneurs à réhabiliter le site dont ils ont tiré profit ? Pourquoi les bénéfices seraient-ils « privés » alors que les nuisances sont « publiques » ? Après la traversée du bourg de Mornag, on emprunte la route C. 35 qui va vers Bou Ficha. C'était, encore récemment une toute petite voie étroite et sinueuse, peut-être un peu dangereuse pour les amateurs de vitesse mais tellement pittoresque ! Elle serpentait dans une région vallonnée, boisée et fleurie, parfois en bordure de la vallée de l'Oued Zid et pendant un grand moment le long des forêts qui tapissent le Jebel Sidi Zid. Hélas, elle a été « élargie », sans grande justification économique et il faudra aux nombreuses familles qui l'empruntaient, dès les premiers beaux jours, pour venir pique-niquer dans les sous-bois, attendre bien longtemps avant que la Nature ait effacé les stigmates de cette transformation. Cependant personne ne pourra jamais plus restituer à la Tunisie la splendeur du Jebel Ressas. Quels impératifs exigent qu'un des plus beaux « géants », chargé d'Histoire, situé à quelques kilomètres de la Capitale, soit irrémédiablement détruit ? La défense de l'Environnement, d'un paysage dont nous venons de vanter les charmes – et dont les citadins ont absolument besoin ! – ne serait-il qu'un vain mot ? Nous ne pouvons y croire. Nous dépassons les pentes boisées du Jebel Sidi Zid bordant le côté gauche de la route, la vallée de l'Oued s'élargit dans la plaine. Dans une dernière grande courbe, il faut ralentir et guetter, sur la gauche, l'entrée d'une grande voie, mi-route, mi-piste très carrossable, qui s'amorce juste avant des pans de murs antiques qui dépassent du talus. C'est le lieu-dit Ksar Soudane. On peut emprunter la « piste » et laisser les véhicules sous la surveillance des exploitants de la ferme toute proche. Vestiges mystérieux Pourquoi ce site s'appelle-t-il le « fortin noir » ? Une maison coloniale, laissée à l'abandon et livrée au pillage, interroge le passant. Puisqu'elle fait partie du Patrimoine, pourquoi n'a-t-elle pas été « attribuée » à ... un citoyen qui s'en serait sûrement contenté ? Si elle doit « disparaître », pourquoi masque-t-elle encore des vestiges antiques connus ? Ils sont encore en partie dissimulés par un tertre parsemé de morceaux de superbes colonnes torses en marbre. A voir leur diamètre, elles devaient avoir 5 à 6 mètres de longueur ! Appartenaient-elles au « bâtiment » voisin qui ressemble au podium d'un temple ? Il recouvre une crypte profonde qu'un escalier remanié permet d'atteindre. Les énormes blocs de pierre taillée des murs laissent supposer qu'ils devaient supporter un bâtiment important et lourd. Des « corbeaux » de pierre qui dépassent des murs de la plus importante des deux salles de la crypte suggèrent qu'il y avait un « plafond » à une certaine hauteur. Ce bâtiment semble bien mystérieux même aux archéologues qui l'ont fouillé et nettoyé, il y a quelques années. « L'établissement » antique de Ksar Soudane devait avoir une certaine importance puisqu'il était alimenté en eau par un petit aqueduc dont les vestiges bordent encore la « voie » que l'on va suivre durant 2 à 3 kilomètres, à pied pour les randonneurs, en voiture pour les autres. Ils pourront laisser leur véhicule à l'ombre des eucalyptus plantés autour du captage. A proximité se dresse le marabout dans lequel repose Sidi Zid et, sur le bas de la pente, des ruines éparses signalent encore qu'un petit bourg a été construit là dans l'Antiquité. Serait-ce ses habitants qui ont fait creuser leur sépulture dans les pentes de la vallée voisine ? Les tombeaux rupestres méconnus A l'extrémité de la piste, l'entrée d'une vallée boisée est « gardée » par une hanout : un tombeau rupestre préromain. Le site des haouanet s'étend sur les deux pentes. Il faut grimper, un peu, pour aller découvrir les haouanet dans les sous-bois de lentisques, de cistes et de genets, parfumés par de grosses touffes de thym et de romarin. Au sommet des collines, les pins, les cyprès et les thuyas se mettent à murmurer dès que le souffle d'une brise tiède les caresse. Ces haouanet ont été « étudiées » dès le début du XXème siècle. Il y a une vingtaine d'années, les chercheurs de l'Institut du Patrimoine avaient affirmé : « Par la variété de leurs motifs sculptés et leur aménagement, ces haouanet constituent un groupe dont l'originalité mérite d'être soulignée. Cet ensemble représente, à coup sûr, une importante étape dans l'évolution des croyances qui s'y rattachent ... » Près d'une trentaine de tombeaux sont creusés dans une roche assez friable que l'érosion abîme beaucoup. Certains, particulièrement intéressants, sont difficiles à trouver car ils sont complètement dissimulés par la végétation. Ils sont caractérisés par la présence, dans certains d'entre eux, de lits, aux pieds sculptés, dotés d'oreillers destinés ... au repos des morts. D'autres sont ornés, à l'intérieur, de sculptures représentant des serpents et une tête de taureau. Une petite fosse a parfois été creusée dans le « fond » du hanout entre les « lits ». Etait-elle destinée à recevoir les ossements des morts précédemment inhumés dans ces sépultures qui nous semblent avoir été réemployées ? Déposait-on dans ces petites fosses les restes d'animaux ou ... des personnages de « rang inférieur » ? La « façade » de certains haouanet a été « décorée » d'un « signe de Tanit », d'une tête d'homme, d'une tête de taureau dont les cornes et le front en relief forment une « niche ». L'entrée d'un tombeau était encadrée par deux « Sphinx » sculptés. Ils sont actuellement en très mauvais état. La découverte des haouanet peut durer autant de temps que la curiosité l'exigera. Si on part à pied de Ksar Soudane et qu'on emporte son « casse-croûte », on peut pique-niquer où l'on souhaite. Ces sépultures qui sont certainement sur le territoire carthaginois, datent probablement des V-IVème siècles avant J.C. Même si l'on est arrivé en voiture, on peut, après s'être restauré, aller visiter le marabout dédié à Sidi Zid. On peut aussi entreprendre une autre randonnée, plus ou moins longue, en empruntant la grande piste forestière qui part de la vallée à gauche du site antique ruiné et qui grimpe en lacet à travers la forêt. Elle sinue ensuite dans le Jebel. On y découvre d'autres vestiges antiques importants. Une autre approche du Jebel Sidi Zid est possible. On rentre en voiture dans le village de Oued Zit. On demande où se trouve l'ancienne grande maison coloniale, abandonnée elle aussi. On va, si l'on veut, y jeter un coup d'œil. Quel dommage qu'on abandonne ces bâtiments magnifiques qui parsèment les campagnes du pays. Ils font partie du patrimoine. Ils pourraient certainement servir à ... Nous pensons à la « Villa Roja » dans le Cap Bon. Bien entretenue, elle sert de centre d'hébergement de vacances à des enfants défavorisés. On repère le long de la petite rue qui conduit à la maison coloniale, l'amorce d'une petite route de campagne goudronnée qui amène jusqu'au marabout de Sidi Zid. On le voit parfaitement depuis le village. Qu'on y aille à pied ou en voiture, le site des haouanet de Sidi Zid et les bois qui l'entourent forment un objectif intéressant pour une promenade de printemps quand la campagne verte et fleurie est magnifique ou d'automne quand la fraîcheur de la forêt fait oublier les ardeurs du soleil estival.