La 16è édition du Festival de la chanson arabe a débuté mardi dernier à Tunis, avec la participation de plusieurs artistes de 13 pays arabes, dont le Maroc représenté notamment par les chanteurs : Said El Maghribi et Salma Alaoui. La cérémonie d'ouverture de cette édition a été marquée par l'organisation d'une rencontre sur les changements que connaît le monde arabe et leur impact sur la chanson arabe, qui a été animée par des artistes, des poètes et des experts en musique à l'instar de Mohamed Lassaâd Kriaâ, directeur du Centre méditerranéen de la musique Ennejma Ezzahra, Ahmed Gaâbour, compositeur et chanteur engagé palestinien, Zine Essafi, compositeur et chanteur engagé, Mustapha Ibrahim, musicien égyptien et le chanteur Raouf Abdelmajid. Cette rencontre a été une occasion pour débattre de la réalité de la chanson arabe, de la chanson dite "engagée" et de l'ampleur de son développement afin qu'elle accompagne les changements politiques et sociaux que connait la région. Prenant la parole Mohamed Lassaâd Kriaâ a évoqué, au cours de son intervention académique, l'histoire de la musique arabe en remontant au début du 20ème siècle marqué par la personnalité du compositeur et chanteur égyptien Sayed Derouiche qui constituait à lui seul une école à part entière. Les années 30, Mohamed Abdelawaheb, disciple de Sayed Derouiche, entreprend une révolution dans la musique arabe en introduisant des instruments occidentaux ce qui était pour les puristes un véritable cataclysme. Cette époque coïncidait avec la naissance des radios dans les pays arabes ce qui a permis la diffusion à grande échelle de la musique et la chanson arabe. Dans les années 50, Kriaâ a rappelé les révolutions, qui ont permis aux pays arabes d'accéder à leur indépendance, ont fait émerger la musique patriotique. Dans le même temps les radios nationales ont créé leurs propres troupes de musique et ont participé à la production de la chanson. Des commissions de sélection étaient formées pour le choix des meilleures voix et les musiciens les plus doués. Ces commissions présidées par des bureaucrates ont souvent fait fausse route. Le chanteur égyptien Abdelhalim Hafedh a été rejeté par ces commissions et a trouvé sa voie et son succès hors les institutions officielles. Dans les années 70, le marché de la musique s'est métamorphosé avec l'arrivée des privés et les progrès technologiques. Mais généralement, dans les révolutions, la musique de variété s'éclipse au profit de la musique alternative et engagée. Pour sa part, Ahmed Gaâbour estime que la chanson arabe de variété n'est pas absente et qu'elle existe quelles que soient les circonstances. « La joie différée reviendra bientôt » a-t-il indiqué en substance. Autrefois, la musique était fabriquée par des artistes alors que de nos jours, elle est entre les mains des sociétés de production ce qui influe sur sa qualité. Pour Zine Safi, la chanson engagée a beaucoup pâti de la politique. Tandis que Raouf Abdelmajid considère que le « Tarab » a subi le contre coup de l'évolution technologique qui a fait perdre au chant son âme. Mustapha Ibrahim pense que la musique doit épouser le rythme de l'époque « Il faut épouser son temps et en étant davantage attaché à la réalité ». Toujours est-il le débat reste ouvert. Le programme de ce festival de trois jours, initié par l'Union des Radios Arabes (ASBU) en collaboration avec les institutions de la Radio et de la Télévision tunisiennes, qui ne fait pas appel aux grandes stars de la chanson arabe, se veut une occasion d'encourager les jeunes talents à plus de créativité.