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«Après la grande mobilisation d'hier, nous innoverons nos moyens de lutte, les lieux des manifestations et les messages politiques»
Promenade du dimanche: Abderrazak Hammami, secrétaire général du Parti du Travail Patriotique et Démocratique
Publié dans Le Temps le 08 - 09 - 2013


Entretien conduit par Faouzi KSIBI
Il y a un bon moment que le compte à rebours est déclenché et la situation politique dans le pays reste inchangeable, ce qui accentue la crise et engage celui-ci dans une impasse. La Troïka campe sur ses positions initiales et traite ses adversaires politiques de putschistes et ce en dépit de la mobilisation générale du peuple et de l'opposition qui défilent coude à coude ; la dernière illustration en date de cette symbiose entre eux était celle d'hier à l'occasion de la commémoration du quarantième jour de l'assassinat de Mohamed Brahmi. Les partisans du martyr de la patrie et de la République sont, de leur côté, également déterminés et accusent l'autre camp d'ignorer la réalité du terrain et de négliger l'intérêt du pays.
Le bras de fer continue et aucune des deux parties ne semble se désister en faveur de l'autre comme si chacune d'elle voyait dans une telle concession un aveu d'échec. Qui a tort et qui a raison ? Et où va-t-on ? Telles sont les questions que nous avons posées à notre invité pour qu'il nous présente sa lecture de la situation.
-Le Temps : le dialogue entre l'opposition et la Troïka a-t-il des chances d'aboutir et la situation actuelle pourrait-elle connaître un déblocage dans les jours qui viennent, selon vous ?
-M Hammami : le dialogue c'est notre destin à tous pour faire sortir notre pays de la crise d'autant plus celle-ci est composée n'épargnant, pratiquement, aucun domaine et dont les manifestations sont nombreuses et se multiplient de jour en jour en économie comme aux niveaux social et sécuritaire où la violence et le terrorisme ont atteint leur paroxysme, puisqu'en presque deux mois on a perdu plusieurs de nos soldats et des agents de l'ordre ainsi que deux grands militants qui sont Chokri Belaid et Mohamed Brahmi dont l'assassinat a provoqué la déception et le courroux populaires. Cette vague déferlante des mécontents s'est accentuée davantage avec ce dernier crime et sonne le glas de l'ensemble du système issu du 23 octobre. Face à cette situation hyper critique, l'opposition nationale s'est constituée en front, le FSN, elle n'a pas d'autre alternative que de se ranger du côté du peuple pour réclamer la démission du gouvernement et la dissolution de l'ANC. De l'autre côté, la Troïka continue sa fuite en avant refusant de reconnaître son échec comme si elle vivait sur une autre planète opposant à tout dialogue ses fameuses lignes rouges à ne pas franchir et qui sont, comme vous le savez, toutes les institutions sans exception aucune y compris les dernières nominations dans l'administration. Donc, elle ne concède pas la moindre concession tout en continuant à simuler le contraire. Entre ces deux positions qui sont diamétralement opposées, nous avons la proposition des quatre organisations sociales, à savoir l'UGTT, l'UTICA, la commission nationale des avocats et la LTDH, qui vient trancher en vue de rapprocher les deux antagonistes. Malheureusement, la Troïka s'obstine et s'agrippe à sa position refusant, catégoriquement, toute initiative et tout arrangement pour désamorcer la crise et sauver le pays.
-Mais la Troïka ne cesse d'accuser l'opposition d'imposer des conditions inacceptables qui ne pourraient pas constituer une base pour un dialogue constructif.
-Ces accusations ne sont pas fondées, car l'opposition n'a nullement l'intention de se substituer à la Troïka et appelle à un gouvernement non partisan, c'est-à-dire impartial, qui sera chargé de préparer les conditions favorables pour la tenue des élections honnêtes, transparentes et libres, et elle est disposée à accepter une autre formule de la dissolution de l'ANC sans qu'elle ne soit pour autant immédiate. Alors que cette dernière refuse de présenter la démission de son gouvernement pour amorcer le dialogue comme elle refuse de dissoudre les LPR et continue ses nominations au sein de l'administration tunisienne faisant la sourde oreille aux appels réitérés de l'opposition d'arrêter ces désignations basées sur la loyauté et de revoir les précédentes. Voilà les conditions dans lesquelles le gouvernement de Ennahdha veut organiser les élections qui seraient ainsi du sur mesure. Elle ne veut pas voir la réalité d'en face en faisant fi du mouvement de la rue au cours de ce mois d'août exceptionnel, dans les annales de notre pays, où au moins 1 million de citoyens sont descendus les 6, 13, 24 et 31 pour manifester leur grogne. Le parti au pouvoir et ses partenaires dédaignent ces manifestations gigantesques et historiques et n'en tirent pas les conclusions qui s'imposent. Ils multiplient les atermoiements tout en variant les procédés qui constituent tous une mise en scène en vue de revenir à la position initiale, c'est-à-dire pas de dissolution du gouvernement avant le 23 octobre prochain. Donc, toutes les positions qu'ils ont exprimées étaient conçues juste pour gagner du temps pour nous faire revenir à la case départ. Cette obstination se répercutera négativement sur la situation dans le pays à tous les niveaux et envenimera la vie politique en transmettant un mauvais message aux acteurs de cette scène selon lequel il n'y a plus de réalisation des revendications au moyen du dialogue. Ce qui pousse toute opposition sérieuse à développer ses moyens de lutte pour obliger l'adversaire à revenir à la raison.
-Quel est le prochain pas du FSN et les horizons de la manifestation du 7 septembre.
-C'est un nouveau rendez-vous pour le peuple pour qu'il exprime son refus des assassinats politiques, de la situation d'insécurité qui s'installe dans notre pays et la poursuite de la crise galopante qui s'aggrave de jour en jour. Après cette grande mobilisation, nous innoverons nos moyens de lutte, les lieux des manifestations et les messages politiques qui comprendront deux volets : la dimension des contestations, du blasement et de la colère populaires et le refus catégorique des atermoiements interminables en vue d'amener la Troïka à écouter l'appel de la raison, d'une part ; notre attachement au caractère pacifique des manifestations et notre détermination à lutter contre tous ceux qui essaieraient de faire usage de la violence quelque soit leur camp d'appartenance, de l'autre. Les rentrées scolaire et universitaire sont pour bientôt et on espère que chacun vaquera à ses occupations, c'est pourquoi toutes les parties, le gouvernement en tête, doivent conjuguer leurs efforts en vue d'éteindre le torchon qui brûle.
-La Tunisie est en butte au terrorisme de tous bords. Comment vous appréhendez cette situation qui sévit dans notre pays?
-En fait, nous avons connu deux périodes ; la première est celle où on accusait d'exagération ceux qui tiraient la sirène d'alarme et qui essayaient de dessiller les yeux sur ce danger réel qui commençait à prendre de l'ampleur, où on présentait les terroristes qui s'installaient chez nous comme étant des jeunes qui faisaient du sport. La seconde est celle que nous vivons, actuellement, et qui se caractérise par la guerre contre ce terrorisme entreprise par notre armée et nos forces de l'ordre que nous saluons pour les efforts et les sacrifices très louables qu'ils consentent. Nous sommes passés du silence à l'action, ce qui veut dire qu'il y a une amélioration de la situation sécuritaire que nous valorisons, car nous ne sommes pas nihilistes. Toutefois, ces efforts sont insuffisants tant qu'ils ne sont pas appuyés par la vigilance de la société civile qui doit constituer une deuxième ligne défensive et œuvrer à répandre la culture de la lutte antiterroriste. Il est impératif qu'on s'y mette tous pour venir à bout de cet ennemi et éradiquer ce fléau, car nous ne vivons pas isolés du monde, nous sommes entourés de deux voisins qui sont gravement affectés par cette gangrène : l'Algérie qui en a souffert pendant toute une décennie et qui n'est pas complètement remise de sa blessure, et la Libye qui en est victime actuellement. En fait, la situation qui règne dans notre région du Maghreb n'est que le corollaire de celle qui sévit dans le monde où l'hypocrisie politique l'emporte sur toutes les autres considérations, puisque les grandes puissances font la guerre en Afghanistan, au Pakistan, au Mali, à Ain Anemas et au Yémen à ceux-là mêmes qu'elles soutiennent en Syrie. Donc, ce sont les données sociogéographiques, les rapports internationaux et les intérêts stratégiques qui gouvernent le comportement de ces puissances et qui déterminent l'implantation de ces foyers sur la carte du monde. La guerre contre la Syrie est la résultante de tous ces calculs et ces complots, elle est provoquée par un conflit d'intérêts. Et quelque soit la position qu'on peut adopter vis-à-vis du régime de ce pays, cela n'empêche que tout le monde craint cette attaque armée imminente. En Tunisie, si on veut nous immuniser contre ces menaces, on n'a qu'à instaurer et développer la culture des lumières, celle de la démocratie, de la cohabitation pacifique, de la tolérance, de l'indulgence.
-Mais selon plusieurs observateurs, le parti au pouvoir nous donne l'impression qu'il se prépare autrement que par des moyens politiques pour faire face à l'assaut populaire et ils justifient leur thèse par, entre autres, la constitution de la nouvelle milice baptisée « sawaed ». Quel est votre avis sur la question?
-C'est vrai qu'on entend parler de la substitution de cette milice aux LPR si jamais celles-ci étaient dissolues. Mais, il faut comprendre qu'on politique on doit faire usage de moyens purement politiques et que la violence ne mène à rien. Dans ce contexte, la question qui s'impose est la suivante : Ennahdha est-elle prête à se transformer en un parti civil à l'image des démocraties chrétiennes en Europe ? La violence et les milices doivent être interdites par la loi, de même que les idées politiques qui appellent à la première et soutiennent les secondes. Ennahdha doit comprendre qu'elle est la première bénéficiaire de la résolution de la crise et que la « somalisation » et la déchéance du pays ne pourrait que causer notre ruine à tous et faire de nous tous des perdants. Notre intention c'est de mener le pays vers une vraie démocratie où tout serait gouverné par la loi et les institutions, mais ce n'est pas ce qu'on affiche, malheureusement, dans le camp opposé. Cet objectif suprême ne pourrait être atteint sans concessions douloureuses comme a dit Houcine Abassi, des concessions que Ennahdha n'est, visiblement, pas prête à faire. Ce parti est composée en moitié de gens qui sont habitués à ne rien concéder et à obtenir les choses à la force des bras, donc, ses dirigeants sont appelés à discipliner ces éléments violents. Le double discours et la double vocation du mouvement Ennahdha sont ses caractéristiques essentielles, et cela était avéré encore une fois, lors du meeting de la Kasbah, où Ghannouchi parlait de la razzia de la Mecque et évoquait, en même temps, la question démocratique. C'est un parti à moitié civil, à moitié violent, à moitié politique, à moitié prédicateur, et il est grand temps pour lui de trancher et d'unifier son discours et ses méthodes.
-Certains soutiennent que les dirigeants d' Ennahdha ne veulent pas renoncer au pouvoir, car ils craignent qu'on les fasse revenir à la prison et qu'on révise toutes les nominations auxquelles ils ont procédé. Qu'en pensez-vous ?
-Il s'agit là de deux choses qui sont tout à fait différentes. Pour ce qui est de la révision des nominations, elle fait l'objet d'une unanimité à l'échelle nationale ; c'est la position aussi bien du Front de Salut National et ses composantes, l'Union pour la Tunisie, le Front Populaire et les associations de la société civile, que celle des quatre organisations patronnant le dialogue national et les auteurs de la proposition dont l'une des clauses stipule la création d'un comité impartial et crédible pour réviser toutes les nominations dont la plupart sont faites sur la base de la loyauté partisane et non pas suivant les compétences. D'ailleurs, même Ennahdha a annoncé qu'elle négocierait la question positivement, mais les messages qu'elle transmet ne sont pas rassurants et dont le contenu est le suivant : dites ce que vous voulez et moi, je continue à m'incruster dans les articulations de l'Etat. Sans cette révision, il ne peut pas y avoir d'élections sérieuses et crédibles. Quant à la deuxième question, il faut qu'on sache que l'époque de l'exclusion est révolue, celle-ci ne peut plus s'appliquer sur la base de l'appartenance idéologique ou politique, elle ne doit fonctionner qu'en cas de violation de la loi. Personnellement, de par mes relations constantes avec les principaux acteurs politiques que ce soit à l'Union pour la Tunisie, au Front Populaire ou bien au Front de Salut National, je peux vous assurer qu'à chaque fois que ce dossier est ouvert, il ya une condamnation ferme de ce procédé antidémocratique. Donc, Ennahdha ainsi que toutes les personnes qui occupaient des postes de responsabilité et qui le sont encore doivent se rassurer à propos de cette question, personne n'ira en prison, parce que son parti était au pouvoir. Cependant, aucun des auteurs des crimes de sang, de corruption et de malversation n'est à l'abri de la loi qui doit s'appliquer, indifféremment, à tous les coupables. A ce niveau, on a du pain sur la planche, car on est encore loin de l'Etat civil, de celui des institutions et de l'égalité de tous devant la loi. Ce n'est pas une mince affaire, l'Europe a mis entre un et deux siècles pour y arriver au milieu des affrontements et des développements sociaux. C'est pourquoi, au sein du Parti du Travail Patriotique Démocratique, nous considérons que notre tâche essentielle consiste à continuer à sculpter la société civile et les institutions démocratiques dans le cadre de l'édification nationale globale que nous sommes en train d'accomplir avec tout le monde et nous n'écartons aucune force politique sérieuse, quelque soit sa référence, de cette œuvre gigantesque.
-D'après vous, ce qui se passe en Egypte ne préfigurerait-t-il pas l'éventuel futur scénario que connaîtrait la Tunisie ?
-Je suis autant étonné de ceux qui font des lectures précipitées en tentant de copier le scénario égyptien et de le coller à la réalité tunisienne que de ceux qui considèrent que ce qui s'est passé dans ce pays est un coup d'Etat. On ne peut pas appeler cela ainsi quand 30 millions descendent dans la rue, c'est-à-dire trois fois le nombre de ceux qui ont voté pour Morsi. Ce jour-là, le peuple a retiré la confiance qu'il a placée en ce dernier à cause des nombreuses erreurs commises par ces frères qui ont refusé toute solution intermédiaire susceptible de rectifier le processus révolutionnaire. En pareilles circonstances, une force politique sage et clairvoyante devait se poser la question pourquoi on contestait son pouvoir pour en dégager les enseignements. L'entêtement des frères a provoqué une grande déchirure au sein de la société égyptienne et semé la discorde parmi les différentes communautés qui le composent. Ils s'acharnent contre les Coptes dont ils ont incendié les églises et affichent de l'hostilité vis-à-vis de tous ceux qui sont contre leur gouvernement. Ils auraient pu conserver leur crédibilité s'ils s'étaient départis de leur obstination et cherché le consensus et qu'ils ne se soient pas mis au service de parties étrangères telles que l'organisation internationale des frères musulmans, le Qatar de Kharadaoui et la Turquie de Erdogan dont ils appliquaient l'agenda à la lettre et défendaient les intérêts stratégiques dans la région. Notre politique doit échapper à l'ingérence de toutes ces parties. En tout cas, j'espère que l'islam politique chez nous, incarné par Ennahdha, ne copie pas la même expérience égyptienne, et si cela se produisait, ce serait la catastrophe aussi bien pour la Tunisie que pour Ennahdha qui, si elle quittait le pouvoir dans le sang, ce serait un malheur, car ce sang nous est cher. C'est pour toutes ces raisons que nous poussons les choses en direction de l'évitement du scénario égyptien, on fait tout pour que ne se reproduisent ni l'obstination, ni les affrontements sanglants en Tunisie. Et je suis persuadé que nous sommes capables de réussir cette entreprise, parce que les voix de la compréhension positive ainsi que les outils de l'acte positif de la politique sont disponibles et peuvent jouer un rôle favorable pour soit persuader, soit dissuader toutes les parties.
-Comment accueillez-vous, au PTPD, le rapprochement entre Béji Caïd Essebsi et Rached Ghannouchi ?
-Il y a quelques mois, Nida Tounes était traité de tous les noms par Ennahdha qui y voyait le foyer de recyclage des rcédistes, l'accusait de commettre des crimes politiques pour les monnayer et le considérait comme étant plus dangereux que les salafistes. Et là, je tiens à rappeler que BCE a, dès le départ, affirmé qu'il était là pour soutenir Ennahdha et non pas pour s'opposer à son pouvoir en disant qu'on veut que cette dernière réussisse pour que la Tunisie réussisse. Mais cette main tendue était rejetée par l'autre camp qui a répliqué aussi bien par la loi d'immunisation de la révolution, qui est un châtiment collectif et qui ne pourrait, aucunement, être le couronnement d'un parcours révolutionnaire mais un outil de dictature et de répression, que par l'article de la constitution fait sur mesure pour exclure BCE des présidentielles. Et aujourd'hui, on voit subitement les dirigeants des deux partis se rencontrer et on entend un discours plus rationnel selon lequel le pays ne peut plus continuer dans cette voie d'affrontements et qui insiste sur la nécessité de trouver des solutions. Et tout d'un coup, les mesures privatives à l'encontre de Nida et de BCE se trouvent repoussées ou annulées. Au sein du PTPD, nous ne nous opposons pas à tout rapprochement qui se fait dans l'intérêt de la Tunisie, par contre, nous refusons tout rapprochement qui se conclut sur la base d'un marché en vue de préserver des intérêts particuliers au détriment de celui du pays. En d'autres termes, la rencontre entre les deux parties serait positive et utile si elle visait à trouver une solution globale permettant à ce dernier de dépasser la crise sous tous ses aspects : la démission du gouvernement, la constitution d'un gouvernement de compétences avec un président indépendant, l'amorce sérieuse d'une période transitoire au cours de laquelle on parachève toutes les questions suspendues, l'assainissement de l'atmosphère pour pouvoir réaliser des élections démocratiques et ce par la dissolution des LPR et la révision des nominations dans l'administration tunisienne… Mais si le but de cette rencontre est de réconcilier les deux personnes ou les deux partis aux dépens de l'intérêt national, elle sera refusée de notre part ; et je ne pense pas que les choses soient ainsi.
-Mais, la plupart des observateurs croient que les manœuvres d' Ennahdha visent à diviser l'opposition.
-Personnellement, je ne le pense pas, mais si c'est le cas, celle-ci doit s'unir et faire preuve de sérieux, en ce sens que ses différents acteurs doivent être sincères les uns avec les autres et ne rien se cacher à propos des consultations, des négociations et des projets de résolution conclus dans l'intérêt du pays même si cela est accompagné de concessions qui font souffrir. Mais dans le cas où cela se transformerait en conspiration pour provoquer une scission dans l'opposition, celle-ci n'a qu'à s'unir, éclaircir sa position et faire assumer la responsabilité à la partie qui veut la diviser.
-Les positions positives d' Ettakatol se sont révélées, en définitive, des procrastinations conçues juste pour gagner du temps. Comment vous jugez le comportement de ce parti ?
-C'était l'un des vieux partis civils qui ont participé à la lutte contre la dictature, on était ensemble dans les fronts qui étaient constitués, aux années de braise, pour affronter Ben Ali que ce soit dans le travail politique quotidien ou bien lors des élections pour en dénoncer les falsifications et l'exclusion des candidats, etc. Ce qui veut dire qu'on était surpris de son intégration de la Troïka bien que ce soit son plein droit. Dernièrement, il a essayé de se rattraper et de corriger quelques positions comme celle que je trouve courageuse relative à la suspension des travaux de l'ANC. On s'est attendu à ce que cette position soit développée afin d'arrêter l'élan de ces gens qui essayent d'accroître leur pouvoir en s'appuyant sur une majorité électorale sans s'intéresser à ce qui se passe autour d'eux dans le pays et le changement opéré au niveau des rapports de force. Malheureusement, après cette position positive, Ettakatol est revenu entre les bras de la Troïka pour défendre la thèse de l'unité du gouvernement contre l'opposition, une logique qui est dépassée par la réalité. Aujourd'hui, il y a des gens qui sont pour le dépassement de la crise et qui se trouvent dans les deux camps, et des gens qui sont pour sa poursuite et son approfondissement afin de préserver leurs positions et leurs intérêts. On souhaite voir Ettakatol occuper une position qui sied mieux à son histoire militante et cela reste encore possible, et s'il choisit d'être ailleurs, il assume sa responsabilité historique. M Mustapha Ben Jaâfar est une personnalité importante dans le pays, et en tant que tel, il devrait, normalement, prêter l'oreille à toutes les parties et discuter avec elles sans exception aucune, et prendre, par la suite, des décisions courageuses qui soient au niveau de sa responsabilité historique. Dernièrement, il vient de se rétracter, mais ce retour en arrière est inopérant, il ne changera pas le cours de l'histoire, car le peuple tunisien a dit son dernier mot, il est décidé à aller de l'avant.
-On a l'impression que les instigateurs des assassinats politiques veulent banaliser ce genre de crime. Qu'en pensez-vous ?
-On remarque qu'à chaque fois un meurtre de ce genre est commis, il y a une forte mobilisation des Tunisiens avec ces marées humaines qui participent aux processions funéraires des martyrs et aux commémorations du quarantième jour de leur assassinat. Ce comportement montre qu'on n'est pas habitué à ces pratiques criminelles, la Tunisie n'a pas connu d'assassinats politiques à l'intérieur du pays depuis celui de Frahat Hached et le dernier en date, qui a eu lieu en dehors de nos frontières, remonte à l'époque de discorde entre Bourguiba et Ben Youssef où le premier a envoyé ses agents en Allemagne pour liquider le second. Depuis cette date, la notion de l'assassinat politique est étrange aux Tunisiens, c'est pourquoi ils étaient traumatisés et ont senti qu'une autre culture et des perspectives meurtrières se dessinaient à l'horizon. On espère qu'on n'arrive pas à banaliser ces crimes à l'image de ce qui se passe dans des pays comme la Colombie, le Liban, les Etats Unis et le Pakistan où l'on se permet d'éliminer son concurrent politique comme on vient de le voir dans l'affaire Barwiz Moucharef qui a supprimé Benazir Bhutto pour s'assurer de la victoire dans les élections. Espérons qu'on s'unira tous pour mettre un terme définitif à ce fléau d'assassinats politiques, de violence et de terrorisme. Et que Dieu préserve notre pays !


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