Le gouvernorat de Médenine vient d'être doté d'un plan régional d'environnement et de développement durable (PREDD), présenté en grande pompe lors d'un séminaire organisé mardi 24 juin 2014 à Djerba en présence de M.Mounir Majdoub, secrétaire d'Etat au Développement Durable, M.Samir Lazaar, chef de cabinet du secrétaire d'Etat au Développement et de la Coopération Internationale, de Mme Irène Kraenzlini, cheffe du Bureau de la Coopération suisse à Médenine, de M.Rainer Krischel, directeur-résident de la GIZ en Tunisie, de M.Mohamed Riahi, directeur général de l'Office de Développement du Sud, et des gouverneurs de Médenine et de Tatahouine. Initiée dans le cadre du programme tuniso-allemand pour l'environnement et mise en œuvre par le secrétariat d'Etat à l'Environnement du ministère de l'Equipement et par la Coopération allemande au développement (GIZ), l'élaboration de ce plan constitue l'aboutissement d'un long processus de concertation, désigné du nom de la « Table ronde économique » soutenue par la Coopération suisse dans le cadre du protocole d'accord tuniso-suisse d'appui à la transition démocratique en Tunisie, et les offices régionaux de Développement (ODSud, ODCentreOuest et ODNordOuest) dans les quatre gouvernorats concernés, à savoir Médenine, Sidi Bouzid, Kasserine et le Kef. Deux ans de dur labeur, de réflexion, de concertation ; onze ateliers en tout, ayant regroupé les acteurs institutionnels, les membres de la table ronde économique, les experts de la GIZ et du Bureau de la Coopération suisse, l'équipe de consultants engagés par la GIZ et des représentants de la société civile ; une démarche méthodologique accordant au préalable un intérêt majeur aux diagnostics approfondis, prônant le recours systématique à l'approche participative dans toutes les étapes du processus d'élaboration, et la complémentarité entre les connaissances de l'expert, les compétences du technicien du développement, le savoir-faire du professionnel et l'engagement du citoyen soucieux du bien-être de sa région, tels étaient, en somme, les ingrédients et le tribut à payer pour mener à bon port ce processus ambitieux qui, aujourd'hui, a donné à plaire et à convaincre, qui fait l'unanimité et bénéficie , de ce fait, des faveurs des jugements. Pour M.Rainer Krischel, directeur-résident de la GIZ en Tunisie, l'éclosion de ce plan régional de développement clôture un processus laborieux de concertation multi acteurs et contribue à offrir à la région une vision stratégique de développement, à ancrer une tradition de coopération entre la GIZ et les institutions régionales ( IRA, CRDA,...) dans les domaines de la lutte contre la désertification, du changement climatique, de l'emploi et de la gestion des déchets. Quant à Mme Irène Kraenzlini, chef du Bureau de la Coopération suisse à Médenine, l'élaboration de ce plan régional illustre « l'engagement de la Coopération suisse dans le soutien à la transition démocratique en Tunisie » ; ce plan régional stratégique, selon ses dires, « produit d'un pilotage et d'une planification décentralisée et participative, est un document de référence qui va contribuer à ancrer une dynamique nouvelle de développement économique durable du gouvernorat de Médenine. » M.Mounir Majdoub, secrétaire d'Etat au Développement Durable, considère, de son côté, que l'initiative d'élaboration du Plan régional constitue une expérience originale et un modèle de coopération exemplaire qui ne manquera pas, de par l'approche méthodologique adoptée, d'inciter justement aurenouvellement des approches et outils de planification locale en vigueur, à la décentralisation et à la démocratie participative. Ce plan régional, selon lui, est un acquis précieux, un instrument de bord qui va permettre à la région d' « organiser son développement dans une perspective de progrès économique et social, de cohésion territoriale et de durabilité » ; il constituera « une base importante pour initier un partenariat fructueux entre l'Etat et les collectivités locales de la région en vue de faire de ce gouvernorat du sud-est un territoire dynamique et attractif ». Une situation économique précaire, et un plan de redressement ambitieux Médenine bénéficie d'une position stratégique exceptionnelle avec ses 4OO km de côte , lui donnant accès à laMéditerranée, l'Europe et le monde, avec une frontière commune s'étendant sur 439 km avec la Libye, pays très riche et peu doté de services, d'institutions et d'infrastructures de base, avec des ressources naturelles diversifiées (lacs poissonneux, vastes parcours steppiques, paysages naturels attrayants variant entre île, côtes, montagnes, parcs, avec son grand potentiel énergétique renouvelable, avec son précieux savoir-faire accumulé dans de nombreux domaines, avec sa grande diversité culturelle, religieuse et linguistique. Cependant, en dépit de tous ces atoûts réunis qui auraient dû permettre à la région de décoller et de la positionner au même niveau de développement que d'autres régions littorales du pays, le gouvernorat de Médenine est aujourd'hui loin derrière Tunis, Sousse, Monastir, Nabeul, ou Sfax, dans plusieurs domaines et sur de nombreux plans, et accuse paradoxalement un retard pénalisant. Ce plan régional de développement se veut donc porteur d'une dynamique nouvelle, d'une vision stratégique innovante de développement qui rompe avec un modèle désuet, fragile et déséquilibré n'ayant prévalu cinq décennies durant que pour entraver l'essor de la région, caractérisé par la prédominance de deux principales activités : le commerce informel qui, à vrai dire, a constitué plutôt un frein au développement même de la région, et le tourisme qui n'a profité qu'à l'île de Djerba en particulier, et à Zarzis à un degré moindre, et qui n'est plus aujourd'hui pour suffire au vu de la concurrence internationale à laquelle il est soumis, ni pour seoir compte tenu des impacts irréversibles sur l'environnement. Le plan d'action défini dans le cadre de la deuxième phase de la démarche méthodologique a prévu deux projets à dimension régionale consistant en la mise en place de deux structures, l'Agence Régionale de Développement et la Banque Régionale d'Investissement, d'un coût estimé à 1151 millions de dinars, en préalable à la réalisation des 75 projets à caractère sectoriel répartis sur les six secteurs prioritaires à savoir, l'agriculture (15 projets), l'industrie (15), le tourisme (10), l'aménagement du territoire (12), l'enseignement supérieur (18), et le partenariat avec l'ouest libyen (04), pour un coût global estimé à 1459 millions de dinars. L'espoir est-il permis, et à quelle(s) condition (s) ? Le gouvernorat de Médenine est le premier des quatre gouvernorats concernés par la Table ronde économique s'inscrivant dans le cadre du protocole d'accord tuniso-suisse d'appui à la transition démocratique en Tunisie, à se voir doter d'un plan régional d'environnement et de développement durable, c'est dire tout l'intérêt porté par toutes les parties prenantes à la région, toute l'importance accordée à la cause de son redressement économique et la conscience unanime quant à l'urgence d'un renouvellement des approches et des outils de planification. L'acquis est donc de taille, et il revient à qui de devoir d'en faire bon usage. Car, un document d'une telle pertinence n'est pas fait pour être rangé dans les archivesde nos administrations, comme de triste mémoire pour l'Agenda 21 local de développement durable de l'île de Djerba achevé depuis 2002 pour sombrer dans l'oubli et l'anonymat. La question est maintenant de savoir s'il en sera tenu compte dans le XIIIè plan quinquennal de développement, si la volonté des politiques sera de la partie pour consentir autant de fonds nécessaires pour permettre la mise en œuvre de ce plan stratégique de développement du gouvernorat, si les différents intervenants et acteurs à l'échelle de la région auront la sagesse, le bon sens et la grandeur d'âme pour ignorer les basses considérations sectaires d'appartenance qui ont pris de l'ampleur depuis l'avènement de la Révolution, pour bannir intelligemment l'égoïsme réducteur et les calculs opportunistes sans lendemain, et pour prendre conscience de tout le profit à tirer de la mise en œuvre d'un aussi important plan stratégique de développement et de développement durable, pour toutes les régions du gouvernorat, sans discrimination aucune.