La symbolique du palais de Carthage est devenue tellement importante par ces temps qui courent qu'il attise les convoitises les plus acharnées d'un grand nombre de personnalités. C'est la « Toison d'or » à conquérir. Jusqu'à hier sept candidatures à la magistrature suprême avaient été présentées à l'l'Instance Supérieure Indépendante des Elections (ISIE). Le dernier prétendant en date est Mustapha Kamel Nabli qui a présenté sa candidature hier, en tant qu'indépendant. Il a été précédé par Larbi Nasra, fondateur d'Hannibal tv et Hachemi Hamedi, chef du parti Al-Mahaba (ancien Al-Aridha) qui avaient ouvert le bal dès le premier jour du démarrage de la période de présentation des candidatures. Ils ont été suivis par Béji Caïd Essebsi, fondateur de Nida Tounès, favori des sondages publiés avant la période électorale. Le magistrat Habib Zammali et le journaliste Safi Saïd n'ont pas hésité à faire de même ainsi que Ahmed Néjib Chebbi, leader du parti Al-Joumhouri et figure historique de l'opposition tunisienne à Ben Ali et Bourguiba. D'autres candidats ont exprimé leur intention de concourir pour Carthage. Selon les milieux proches d'Ettakatol, c'est aujourd'hui que Mustapha Ben Jaâfar, président de l'Assemblée Nationale Constituante (ANC) va présenter officiellement sa candidature. Pour Moncef Marzouki, président provisoire et président d'honneur du Congrès pour la République (CPR), la date de présentation de sa candidature se fait attendre. Les équipes de campagne d'Abderrahim Zouari et Kamel Morjane, n'ont encore pas signifié quand leurs prétendants présenteront leurs candidatures. Hamma Hammami, candidat du Front populaire devra présenter aujourd'hui candidature et tenir une conférence de presse, tout juste après. Mohamed Hamdi, secrétaire général de l'Alliance démocratique, un transfuge de l'ex- Parti Démocrate Progressiste (PDP), n' a pas caché son intention de présenter sa candidature. Il dispose des dix signatures des députés de son parti au sein de l'ANC. Kalthoum Kannou, ancienne présidente de l'Association des Magistrats de Tunisie (AMT) a réuni les dix mille signatures nécessaires et devra présenter officiellement sa candidature, samedi prochain. D'autres noms sont évoqués, comme celui de Zied El Héni qui paraît-il peine à récolter les dix mille signatures nécessaires pour présenter sa candidature. On parle aussi d'Adel Almi, Bahri Jelassi, Mohamed Frikha, Lazhar Bali, Manar Skandrani... La liste s'allonge. Entre candidatures sérieuses et d'autres superflus, au premier tour de l'élection présidentielle prévu le 23 novembre prochain, les électeurs auront l'embarras du choix. Le foisonnement des candidatures ne dévalorisera-t-il pas le prestige de la fonction présidentielle ? Il est vrai que les Tunisiens auront, pour la première fois, à réellement choisir leur futur président par le suffrage universel, à travers des élections que tout le monde souhaite transparentes et démocratiques. Beaucoup d'interrogations se posent. Comment vont évoluer les choses d'ici la clôture de la période de présentation des candidatures, le 26 septembre courant? Quels seront les candidats de la dernière minute ? Pr. Kaïes Sayed, constitutionnaliste et observateur averti de la scène politique tunisienne estime que la pléthore de candidats à la présidence de la République ne fera que consolider le sentiment de méfiance de la majorité des Tunisiens vis-à-vis de la classe politique. Il précise dans une déclaration au Temps : « Lors du scrutin de 2011, presque la moitié de l'électorat potentiel n'a pas voté. Le message qui a été adressé également par les Tunisiens, lorsqu'ils ont été appelés à s'inscrire sur les listes électorales, où une grande majorité s'est abstenue à le faire, ne semble pas avoir été bien reçu par la classe politique. La ruée vers le palais de Carthage, n'est pas de nature à rendre les Tunisiens plus confiants. Bien au contraire ! Par ailleurs, les candidatures qui se présentent ou ont l'intention de se présenter, le sont sans projet. Même si elles en ont, ils sont pratiquement les mêmes. Et les Tunisiens n'accordent pas d'importance au contenu des programmes. L'élément essentiel dans toute opération électorale est l'électeur. Il semble que beaucoup ont oublié cet élément fondamental. Ils tirent leur légitimité de l'électeur. Toutefois, ils ne s'intéressent à lui que le jour du vote ou de la campagne électorale. Le peuple tunisien ne peut pas être traité comme un bétail électoral. Les jeunes sont plus intelligents. Ils diront leur mot, non pas le jour de l'élection, mais le jour de la proclamation des résultats du scrutin. Ils ne seront pas satisfaits des résultats. La désillusion s'installe. Le peuple tunisien ne se fait plus d'illusions ».