Ils étaient plus de 150 hôteliers, agents de voyages et restaurateurs à prendre part à un débat correct mais sans tabou sur la situation du tourisme dans la région de Nabeul-Hammamet organisé par la FTH qui a au moins eu le mérite de remobiliser les troupes d'un secteur confronté à de nombreux défis. Ils étaient tous là : ministre du tourisme, hôteliers,, agents de voyages, restaurateurs, transporteurs, élus locaux, représentants des fédérations et associations professionnelles, banquiers, Tour-opérateurs venus partager leurs expériences. La ministre Selma Elloumi Rekik a écouté attentivement les doléances des hôteliers.les débats ont été aussi courtois que vifs ! Habib Bouslama, Président de la Fédération régionale de l'hôtellerie a notamment évoqué la question de l'amélioration de la qualité, de la détérioration de l'environnement, de la pression des tour-opérateurs, le bradage des prix, la pression fiscale qui pèse sur le secteur, l'existence d'intrus qui portent préjudice à la qualité des prestations, l'endettement du secteur, l'ouverture du ciel, la lourdeur administrative, la formation et les problèmes sécuritaires. Monji Gueddas a évoqué le coût du transport aérien en Tunisie qui demeure, selon lui, «irrationnel», ce qui amène nombre de tour opérateurs à abandonner la destination tunisienne, pour s'orienter vers d'autres, comme le Maroc, l'Espagne, la Turquie... « L'ouverture du ciel s'impose. On doit suivre le Maroc qui vend Paris-Marrakech à 70 euros. Nous sommes à une heure d'Alger. Pourquoi ne pas programmer des vols chaque week end pour nos voisins algériens ? Cette ouverture à la concurrence nous incitera à poursuivre une politique de low-cost en baissant de manière significative le coût du voyage, ce qui nous permettra de cibler de nouveaux segments de clientèle. En effet, l'ouverture du marché aérien et la baisse des tarifs aéroportuaires stimulera l'arrivée de nouvelles compagnies aériennes régulières et low-cost. Grâce à leurs coûts bas et à leur capacité de commercialisation (via Internet), elles pourront réduire le coût du transport et assurer une plus grande fluidité ainsi qu'une desserte appropriée et directe entre les marchés émetteurs et les zones touristiques ». Abdelkader Khelil agent de voyage a parlé des problèmes bureaucratiques qui découragent de plus en plus les professionnels « Trop de procédures administratives tuent la profession et là je m'adresse à l'administration du tourisme qui doit aider les agents de voyages dans leurs projets au lieu de les freiner » L'all inclusive et le diktat des TO Le forfait all-inclusive, offert par certains hôtels en Tunisie, est un phénomène qui répond à une demande en hausse de la part des consommateurs dans le circuit touristique mondial et la Tunisie n'y échappe pas. « C'est un concept très prisé par les touristes qui a tué le para-touristique », souligne Néjib Touhami restaurateur à Hammamet. Nous constatons dans certaines unités un manque total de normes applicables aux prestations en all inclusive correspondant à de nouvelles données de qualité. Certains hôtels n'ont pas besoin d'animation, mais plutôt de réanimation. L'intervention de Hédi Boudhina était pertinente et a permis de mettre le doigt sur des aspects à revoir en profondeur ou à mettre en valeur, particulièrement dans le chapitre de l'animation. « L'animation touristique dit-il souffre d'une tare importante dont notamment l'absence d'imagination de nature à susciter l'intérêt de la clientèle notamment en dehors de l'hôtel» Faire face aux racoleurs et vendeurs de produits chinois Salem Bouraoui, hôtelier à El Haouria a évoqué la crise que vit la cité de l'épervier en raison de la fermeture des grottes romaines, un site touristique programmé souvent sur les itinéraires et les circuits touristiques. Leur ouverture pourrait dynamiser et propulser le tourisme culturel et écologique dans la région. Mehdi Allani a appelé à mettre en valeur l'artisanat tunisien qui est un produit associé au tourisme. « L'environnement humain s'est gravement détérioré. Une nouvelle race d'individus a envahi l'espace public. Ce sont les racoleurs et ces vendeurs de produits chinois et contrefaits. Nos médinas ont de belles choses à montrer. La Tunisie continue à être commercialisée essentiellement par des tour-opérateurs étrangers. Alléger les procédures administratives Et c'est là que le bât blesse, souligne Bouraoui Miled : «Nos hôteliers ont encore beaucoup de mal à résister aux pressions exercées par de tels mammouths en matière de prix. La forte dépendance vis-à vis des tours opérateurs étrangers a eu pour effet la détérioration de la qualité des services et l'ancrage d'une image de destination à bas prix. Avec le concours de leurs guides, ces TO imposent leur dictat et là il est temps de se libérer progressivement de l'hégémonie de ces groupes de vente. » Ahmed Bettaieb, agent de voyage a insisté sur l'impératif d'assurer la coordination entre les professionnels et l'administration du tourisme « un partenariat public-privé gagnant afin d'améliorer la performance de la destination tunisienne ». Il a appelé en outre à alléger les procédures administratives et à revoir notre législation qui ne s'adapte pas à la réalité actuelle du secteur. Face à ces interventions franches des professionnels, la ministre du tourisme Selma Elloumi se montre en tout cas lucide sur le retour à la normale du tourisme. Elle a annoncé la tenue prochaine de plusieurs séances de travail avec des départements ministériels tel que ceux du transport ou encore des Finances en vue de trouver des solutions aux problèmes de l'endettement hôtelier, de l'environnement dans les zones touristiques, de la commercialisation et à la promotion du produit touristique ainsi qu'à la refonte du système de la formation touristique. Selma Elloumi a affirmé : « Nous devrons trouver des solutions urgentes au problème de l'endettement du secteur qui ne cesse d'impacter négativement la qualité des prestations et l'image même de la destination. Nous devrons faire face au dictat des TO et accélérer l'ouverture du ciel en vue de renforcer les flux touristiques en direction de la Tunisie notamment à Monastir, Djerba et Tabarka. Ceci sans oublier la mise en place d'un nouveau code d'investissement et l'allégement des procédures administratives » Le tourisme ne pourra pas se passer de l'artisanat. Cette activité a ajouté la ministre est en crise et pénalisée par l'invasion des produits chinois. C'est pourquoi notre devoir est de lutter contre la contre façon. « Il est temps de redonner des couleurs à ce secteur », a insisté la ministre, qui a présenté les principales actions et pistes envisagées pour remettre l'artisanat sur les rails.