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Le tourisme tunisien: quelle sortie de crise?
Tourisme
Publié dans Le Temps le 23 - 04 - 2013

Le tourisme tunisien passe par une période difficile. A la veille de la haute saison touristique, l'heure est à la mobilisation. Réunis autour d'une table ronde organisée par Nidaa Tounes, les professionnels du tourisme ont essayé de discuter des problématiques et des difficultés de leur profession et des mesures à mettre en place pour réussir la prochaine saison touristique.
Ce rendez-vous a été un moment de réflexion sur la situation du secteur et, partant, celle de la profession à un moment où l'activité touristique gère un contexte particulièrement difficile. Hajer Nabli estime que le tourisme occupe une place de choix pour la Tunisie. Les temps sont durs pour ce secteur. C'est pourquoi nous sommes réunis pour entendre les doléances des professionnels et tracer une stratégie pour sauver la saison. Il est vrai comme l'a affirmé M Habib Bouslama, Vice-Président de la Fédération Tunisienne d'Hôtellerie l'activité touristique a subi une chute libre. Au cours de la période allant du 1er janvier au 20 mars 2013, le secteur touristique a accusé une baisse de 1,8 % au niveau des entrées touristiques par rapport à la même période de 2012 passant de 781 000 touristes en 2012 à 767 000 touristes en 2013. L'attaque de l'ambassade des USA à Tunis et les évènements de Djerba ont frappé de plein fouet le tourisme tunisien créant un climat d'incertitude chez les tour-opérateurs et qui s'est traduit par «des reports et des annulations de réservation vers la Tunisie. Le secteur touristique a besoin d'être redressé rapidement. Nous sommes appelés à travailler sur le court terme pour réussir la saison. Pour cela des mesures urgentes devront être prises dont le respect de l'environnement, la sécurité à titre préventif, l'engagement des professionnels tunisiens dans l'amélioration de la qualité des services, la promotion et la communication, l'octroi des prêts saisonniers et le paiement par étape des échéances financières (CNSS, impôts, crédits bancaire ou Leasing et autres engagements…)
Il faudrait couper tout court avec le passé et amorcer un remodelage structurel du secteur touristique pour développer d'autres produits autres que l'hôtellerie, lui permettant ainsi de rompre avec l'unique composante hôtelière pour s'inscrire dans une logique de diversification pérenne et durable. La Tunisie n'étant pas en mesure de suivre les mutations internationales et s'imposer sur l'échiquier méditerranéen. Elle a été concurrencée par le Maroc et la Turquie. Le mal est là et aucune volonté politique n'a pu sauver le secteur de cette impasse. Il faudrait faire confiance au ministère du tourisme qui pourra prendre des mesures urgentes et efficaces pour booster la destination »
Une prédominance de l'activité balnéaire
La crise du tourisme tunisien et en particulier de l'industrie hôtelière est plus profonde qu'elle ne le paraît. Elle n'est pas conjoncturelle, mais trouve ses racines dans le schéma global de développement sectoriel adopté depuis quelques décennies déjà.
Khelil Abdelkader, Président de la FTAV du Cap Bon a estimé que le secteur touristique n'a pas pu évoluer. « Cette situation avoue-t-il est due à un net recul du produit touristique de base du tourisme tunisien constitué par des séjours de moyenne gamme en bord de mer mais aussi à la sensibilité de ce produit à la conjoncture extérieure. Il y a la prédominance de l'activité balnéaire, qui s'appuie sur une forte saisonnalité et des pratiques de négociation des tarifs étalées sur toute la période de l'année et dominées par les grands tour-opérateurs disposant d'un pouvoir de marché et de négociation puissant. L'hôtelier ou l'agent de voyage est devenu marginalisé face à ces dictats des géants du tourisme international ».
Monji Guedas, hôtelier à Hammamet a expliqué que le tourisme est un secteur vital pour le pays et que le Tunisien doit être conscient de l'importance de ce secteur et doit de ce fait être réconcilié définitivement avec cette activité qui a contribué à l'ouverture des Tunisiens sur d'autres cultures et civilisations. M Gueddas a appelé à développer un autre tourisme en Tunisie. Il a recommandé d'aller vers des résidences de tourisme adaptées au vécu du Tunisien comme les Appart'hôtels, les chambres d'hôtes, les gites et les hôtels de charme. Certains établissements hôteliers peuvent devenir des complexes médicaux et lieux d'hébergement ou encore des cliniques privées. Le rôle des municipalités est à consolider dans le développement du tourisme et sans leur soutien le tourisme ne pourra pas décoller or dans certaines mairies il y a une absence totale de stratégie pour donner un nouvel élan au tourisme. Certains conseillers municipaux ne croient pas à l'impact de cette activité sur l'économie de leur région », Zakaria Zgolli secrétaire général de la Fédération tunisienne d'hôtellerie a affirmé que la restructuration de l'industrie hôtelière tunisienne apparaît, à la lumière de ce constat, comme une urgente nécessité. Il faudrait consolider ce partenariat privé-public. La responsabilité du développement du tourisme est sans aucun doute partagée. En conséquence, toute solution pour être équitable devrait impliquer les deux parties. M Zakaria a évoqué la lente croissance des recettes touristiques tunisiennes qui s'expliquerait par la faiblesse des prix moyens par lit loué (1 à 5 entre la Tunisie et la Turquie et de 1 à 3 entre la Tunisie et le Maroc). La comparaison avec la concurrence est aussi désavantageuse en termes de recettes qui, durant les 30 dernières années, n'ont augmenté que de deux fois et demie, alors que celles du Maroc ont augmenté de cinq fois et celles de l'Egypte de neuf. Un autre facteur de la croissance lente des recettes du tourisme est la dépréciation de près de 50% de la monnaie tunisienne ces vingt dernières années, dans un contexte où les prix négociés avec les grossistes du voyage demeurent libellés en dinars » et que « près de 40% des intrants hôteliers sont importés. Tout cela se répercute sur la compétitivité du secteur et de son endettement et aussi sur la qualité du produit. Les hôteliers n'ont plus les moyens pour rénover ou mettre à niveau leurs unités. « La saisonnalité de l'activité touristique oblige à recourir à une main-d'œuvre temporaire, ce qui ne favorise ni la qualité ni, surtout, la productivité et, partant, la compétitivité » a expliqué M Habib Boujebel hôtelier à Hammamet. Le mono-produit « soleil, plage» à caractère purement saisonnier n'est plus rentable. Face à une demande en mutation des voyageurs internationaux depuis deux décennies, les hôteliers tunisiens n'ont pas su s'adapter à cette nouvelle donne et aux nouvelles perceptions du voyage. La destination n'est plus demandée. La qualité du produit laisse à désirer depuis l'accueil du touriste à l'aéroport en passant par le bus, le taxi jusqu'à l'hôtel. Cela nécessitera la mise en place d'une politique d'amélioration de la qualité globale (renforcement des critères de notation des hôtels, création d'incitations fiscales et autres mesures pour la diversification des composants du produit touristique) il faudrait faire surtout des efforts pour rassurer les clients et les TO. Cela passe par le renforcement de la sécurité, l'amélioration de l'image du pays et la consolidation de l'aérien sans oublier d'accorder un grand intérêt à l'environnement physique et humain ».
Aggravation de l'endettement des hôteliers
La croissance extensive des capacités d'accueil a eu pour effet un endettement accru : « De 1983 à 2008 l'encours total de la dette a pratiquement explosé, passant de 178 millions de dinars à plus de 3,176 milliards, soit une multiplication par plus de 17. (…)La majorité de cette dette bancaire, soit près de 70%, est constituée de crédits à moyen et long terme contractés pour financer le besoin d'investissement. Sous l'effet de la croissance, les flux de crédits contractés annuellement pour financer les investissements et la croissance ont fini par accumuler un encours d'endettement vis-à-vis du système bancaire relativement important a expliqué l'universitaire Mourad Hattab. L'endettement du secteur touristique arrêté au 31 décembre 2010 à 3411 millions de dinars. En 2011, les créances impayées et en contentieux ont été actualisées à 835 millions de dinars soit 23% des crédits en cours du secteur contre une moyenne nationale égale à 12%. Raouf Ghaddhab hôtelier à Sousse estime que le secteur a beaucoup contribué au développement des banques. Sous l'effet de la croissance, les flux de crédits contractés annuellement pour financer les investissements et la croissance, les hôtels ont fini par accumuler un encours d'endettement vis-à-vis du système bancaire relativement important quelque soit le ratio considéré, on relève une augmentation sensible et inquiétante du nombre d'années requis pour rembourser la dette. Le phénomène de l'endettement prend de l'ampleur que l'actuelle crise du secteur n'a pas arrangée. La création d'une société de gestion des actifs des unités hôtelières souffrant d'un fort endettement, idée inspirée d'expériences étrangères confrontées au même problème n'est pas la solution adéquate. Ce fonds d'investissement a pour vocation essentielle le rachat des dettes des 120 unités endettées auprès des banques tunisiennes à un prix déjà négocié qui ne dépassera pas le quart du montant de dette. Ce fonds agira en société de gestion d'actifs. Il peut ainsi devenir propriétaire des hôtels en termes de gestion, de vente ou de fermeture. Ce projet, d'après les experts de la banque mondiale et le ministre du Tourisme, à été déjà entériné lors d'un conseil interministériel et il sera bientôt soumis à l'ANC. Ainsi nous devrons nous mobiliser pour faire face à ce projet et s'il y a des unités à vendre, il faudra donner la priorité aux hôteliers. Nous avons mis un demi-siècle pour créer une industrie et nous ne pourrons pas la laisser maintenant filer de nos mains et devenir spectateur dans notre propre pays. Nous demandons un rééchelonnement et renégociation de la dette vis-à-vis du système bancaire»
L'ouverture du ciel : une priorité
L'aérien n'est pas en train de suivre l'activité touristique en Tunisie. Le trafic aérien en Tunisie ne pourra se faire que grâce au développement du low-cost. C'est la conclusion qui ressort de Monji Barbouchi qui estime que le développement du low-cost est une bonne piste pour relancer le tourisme en Tunisie. Il s'agit d'un véritable modèle novateur qui permet, grâce à la compression des coûts de production, de faire baisser durablement les prix.
Nous pensons certes à notre compagnie nationale Tunisair mais il est temps d'ouvrir notre ciel sinon nos hôtels resteront vides . Le Maroc a opté le low cost depuis belle lurette. La Royal Air Maroc avait peur au début de cette ouverture mais a réussi, en adaptant ses prix, à conserver 50 % du marché. 44 compagnies aériennes low-cost y opèrent actuellement. Les compagnies low-cost accaparent aujourd'hui 35 % des vols (5 % de plus que l'an dernier) et grignotent du terrain. Ryanair, la première compagnie low-cost a doublé ses vols marocains, avec 123 fréquences hebdomadaires. Le touriste du 21ème siècle est à la recherche de plus d'indépendance, de plus de flexibilité et de bonnes affaires. Aujourd'hui, grâce à l'ouverture du ciel et la prolifération des compagnies low-cost, le touriste pourra planifier ses vacances et ses visites, venir en week end surtout que nous sommes à deux heures du vol de l'Europe. C'est dire que l'open Sky est devenu une réalité. L'ouverture du ciel aérien est un fait certain en Tunisie. Cet open-sky ne fera que renforcer la concurrence féroce déjà enclenchée par les compagnies charters. L'ajournement de l'ouverture du ciel tunisien aux compagnies low-cost n'arrange pas les affaires des hôteliers et des agents de voyages tunisiens
Des défis et des idées nouvelles
La Tunisie a été alors considérée parmi les meilleures destinations émergentes. Aujourd'hui, affirme l'ancien ministre du tourisme et consultant international Ahmed Smaoui il en est tout autre. « Nous accumulons les records des prix bas, d'insuffisance de qualité des services et de baisse de la rentabilité. Et, le secteur ne pourra sortir de cette situation que si, on le reconnaît et que l'on décide véritablement, d'y mettre fin. Pour le moment, il faut sauver dans l'immédiat la saison. La visibilité n'est pas nette. Il y a beaucoup des défis devant nous car ce n'est pas facile de faire revenir les touristes et leur offrir un produit de qualité. 2012 a été la pire des saisons pour la Tunisie. Le début de 2013 accuse une baisse .Le tourisme ne marche pas tout seul. Plus que de diagnostics et d'annonces, le tourisme a besoin, aujourd'hui, d'actions, de réformes et des idées nouvelles. L'essentiel des structures administratives du secteur a été créé dans un contexte de dirigisme économique.
Aujourd'hui, l'Etat ne gère plus d'hôtels, ils appartiennent, et sont gérés quasi exclusivement par le secteur privé. Aussi paraît-il urgent de repenser la gouvernance du secteur touristique, en instaurant un partenariat actif et bénéfique aux deux parties : publique et privée. L'endettement du secteur hôtelier est un problème vieux de plus de 20 ans et là il faut trouver une solution qui arrange les professionnels en bloquant par exemple les intérêts de retard et en négociant avec les hôteliers. La création de société de gestion d'actifs constitue un abus du pouvoir financier. Nos concurrents comme la Turquie ont appris chez nous, mais il faut reconnaître que l'élève a dépassé le maître. Ce dernier doit reprendre désormais le chemin de l'école. Cela passe bien évidemment par une révision du cadre juridique, de l'amélioration de la qualité de notre produit, de l'ouverture du ciel, de l'encouragement de l'investissement et de bonne gouvernance. La décentralisation s'impose si on veut booster le tourisme dans nos régions. Cessons de diaboliser le tourisme et mettons la main dans la main pour redorer le blason d'or de notre tourisme » », a-t-il précisé. Clôturant ce débat, Taieb Baccouche le secrétaire général de Nida Tounes réitère, encore une fois, toute l'importance qu'il accorde au tourisme « un choix civilisationnel pour la Tunisie qu'il faudrait mettre en valeur et le consolider. Dans le souci de s'adapter aux défis et aux enjeux de la mondialisation, le tourisme tunisien doit se doter d'une stratégie de développement durable dans les années à venir. C'est une mission collective qui exige certes une volonté politique inexistante actuellement. La mobilisation de la société civile est importante pour sauver ce patrimoine national des sociétés étrangères avec le soutien de l'UTICA et l'UGTT Boujemaa Remili, membre fondateur de Nidaa Tounes a précisé de son côté que le but de ce débat très fructueux, c'est d'avoir une vraie discussion, franche. Ecouter, parler et discuter avec les professionnels pour tracer enfin notre feuille de route en matière de tourisme


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