Nabil Karoui, propriétaire de la chaîne Nessma et Chafik Jarraya, homme d'affaires connu pour être mêlé à plusieurs affaires, ont organisé une conférence de presse dans la journée d'hier. Un point de presse tenu afin de répondre aux accusations portées par Walid Jalled, député du bloc de Nidaa Tounes, à l'encontre de l'homme d'affaires. Une conférence qui aurait pu passer plus au moins inaperçue si elle n'avait pas eu lieu au même instant et au même endroit que la conférence de presse tenue par le comité constitutif du Nidaa ! La conférence de Chafik Jarraya, intitulée ‘le ministère de l'Intérieur viole les données personnelles en publiant des documents d'écoutes téléphoniques, a connu une grande affluence des journalistes accourus pour chercher les exclusivités promises par l'homme d'affaires. Le grand absent de cette rencontre était Nabil Karoui, une absence qui n'a pas été expliquée. S'il ne nie pas le contenu des documents, Chafik Jarraya a tenu le gouvernement de Mehdi Jomaâ pour responsable de la violation de ses données personnelles. Il s'est interrogé sur la légitimité de sa mise sous écoute en rappelant l'existence de la police parallèle qui serait contrôlée, selon ses dires, par son rival, l'homme d'affaires Kamel Letaïef. Jarraya a par la suite accusé le même gouvernement d'avoir fait rater à la Tunisie un emplacement stratégique dans le Dialogue libyen dont a profité l'Algérie après que la Tunisie ait raté sa chance. Dans ce contexte, il a prétendu que 3,8 millions de dollars auraient été prévus par le gouvernement libyen au profit de l'Etat tunisien, un don qui allait servir à développer les régions du sud tunisien. Il a demandé à ce que le sort réservé à cet argent soit dévoilé à l'opinion publique. En ce qui concerne sa relation avec le célèbre homme d'affaires libyen Adelhakim Belhadj, Jarraya a expliqué que ce dernier n'avait rien d'un terroriste et que si c'était le cas, l'Etat tunisien n'avait qu'à le classer comme tel. Il a ajouté que les leaders du monde entier, dont Abdelaziz Bouteflika, s'emploient à défendre Belhadj ‘parce qu'ils savent ce qu'il vaut réellement'. L'homme d'affaires a indiqué qu'il a joué un grand rôle dans la libération des deux diplomates tunisiens kidnappés l'année dernière en Libye et qu'il allait en faire de même pour la libération des deux journalistes, SofieneChourabi et NedhirGuetari, retenus depuis des mois en Libye. Revenant sur son problème avec le mouvement Nidaa Tounes, Chafik Jarraya a expliqué qu'il s'est ravisé de son adhésion au dit mouvement, rétorquant, sur un ton ironique, qu'il leur a rendu ‘l'Appel' tout en gardant ‘la Tunisie.' Il a expliqué qu'après avoir passé deux ans à se déchirer, les dirigeants du Nidaa voulaient camoufler toutes leurs erreurs en lui faisant porter à sa personne tous les torts. Il a ajouté qu'en l'accusant de vouloir faire main basse sur le mouvement avec l'aide de Hafedh Caïd Essebsi était une insulte pour l'intelligence des tunisiens. L'homme d'affaires a déclaré que le député Walid Jalled était venu chez lui, de la part de Ridha Belhadj, pour le soumettre à un chantage. Le député lui aurait expliqué que Kamel Letaïef avait des documents compromettants mais Belhaj pouvait très bien les détourner vu le pouvoir dont il dispose au palais de Carthage. Jarraya a traité Walid Jalled de pion et d'attardé mental. Il a défié Marzouk, Ridha Belhaj et Letaïef de l'évoquer publiquement. De l'autre côté du couloir, dans la salle juste en face, se réunissait le comité constitutif de Nidaa Tounes, accompagné de quelques membres du mouvement, dispersés un peu partout dans la salle, bien. Mohamed Ennaceur, président par intérim du Nidaa, a pris la parole pour expliquer que l'appel à la réunion du Conseil National du mouvement dans la journée du 14 mars, par le clan présidé par Hafedh Caïd Essebsi, était totalement illégal. Ennaceur a insisté sur le fait que le comité constitutif du Nidaa était le seul comité légitime du parti et que toute décision prise en dehors de ce comité sera considérée comme illégale. Dans ce sens, le président du Nidaa a appelé tous les dirigeants à cesser de porter des accusations infondées et irresponsables au comité constitutif qui est le seul à pouvoir prendre des décisions fermes concernant l'avenir du mouvement. Contrairement à l'absence de Nabil Karoui de l'autre conférence, celle de Hafedh Caied Essebsi a été bien expliquée : le comité lui aurait adressé une invitation qu'il aurait ignorée. Pour le secrétaire-général du mouvement, TaïebBaccouche, ce qui se passe actuellement au Nidaa est le tribut de sa réussite et son accès au pouvoir. Il a appelé les dirigeants du mouvement de mettre finà leur querelle et d'agir avec plus de sagesse. LazharKaroui Chebbi, responsable de la préparation du congrès national du Nidaa, a, quant à lui, expliqué que les congrès régionaux du mouvement auront lieu durant les mois d'avril et de mai et que le congrès national verra le jour avant la fin du mois de juin. Mohsen Marzouk a expliqué pour sa part que Hafedh Caïd Essebsi ne savait pas comment diriger un parti et que cela était prouvé par le fait que ce dernier ait appelé les membres du gouvernement et ceux de l'équipe présidentielle à ne pas faire partie du futur bureau politique. Il a ajouté que les deux seuls noms dont l'adhésion au comité constitutif a été refusée sont Faouzi Elloumi et Nabil Karoui. Il a expliqué que ce comité n'avait plus besoin d'être élargi puisqu'un bureau politique verrait, prochainement,le jour. Après des déclarations enflammées, LazharAkremi a nié le fait que ses dernières déclarations médiatiques eussent été à l'encontre de l'adhésion de Mohamed Fadhel Ben Omrane, de Mohamed Ennaceur et de Hafedh Caïd Essebsi au comité constitutif. Alors que le comité constitutif s'employait, inlassablement, à remettre les pendules à l'heure, quelques députés du même mouvement faisaient passer une pétition en dehors de la salle pour demander à Mohamed Ennaceur d'avancer la date du Conseil national. L'une de ces députées nous a expliqué que le bloc parlementaire était le seul à avoir un vrai moyen de pression et qu'il avait décidé de rester neutre quant aux deux clans du mouvement en ayant pour seul objectif de maintenir l'union de ce dernier. S'il était prévisible de voir des problèmes surgir au sein des rangs de Nidaa Tounes au lendemain de son accès au pouvoir, on n'aurait jamais pu imaginer que les choses pouvaient s'envenimer à ce point-là. Avec Chafik Jarraya et Nabil Karoui qui s'y mêlent, la situation risque de se compliquer encore plus. Les dirigeants du Nidaa ne cessent d'expliquer que l'avenir de leur mouvement est intimement lié à celui du pays... Ce qui est sûr c'est que, avec ce qui s'est passé hier, c'est toute la politique tunisienne qui en a pris un coup !