L'odieux attentat perpétré contre le musée de Bardo a affecté le monde du tourisme. . Bien évidemment, tout le monde est sous le choc. Les professionnels ne baissent pas les bras. Au contraire, ils multiplient les gestes commerciaux pour booster ce créneau porteur comme en témoigne cette réunion organisée par Tourisme info à Yasmine Hammamet et qui a réuni les commerciaux des différentes unités du pays. Afif Kchouk, Directeur de Tourisme.info devait préciser que l'attentat du 18 mars a suscité une vague mondiale de soutien et de sympathie pour la Tunisie de la part des hommes politiques et des artistes notamment « ce fut une campagne, extraordinaire de crowdsourcing, des prises de position en faveur du tourisme tunisien de la part des tours opérateurs. Mais toutes ces actions sont-elles suffisantes pour convaincre le touriste européen, tunisien et algérien à venir passer leurs vacances en Tunisie ? » Le scénario était prévisible ajoute-t-il avec des rapatriements de clients séjournant en Tunisie, des annulations de réservations dont le taux varie selon les marchés, un ralentissement , voire arrêt de nouvelles réservations selon les marchés et un redémarrage des réservations à un rythme progressif dans un délai de quelques semaines » Les préalables de la reprise Quelles stratégies adopter ? Quelle sortie envisager? C'est un véritable travail de lobbying que nous devrons mener en Europe pour re-booster l'activité touristique du pays précise Ridha Attia qui estime que l'année 2015 sera difficile en raison de la conjoncture difficile locale et internationale. Ce qui explique ces annulations et ces arrêts de commandes » Faut-il attirer le client par des prix de séjour bradés. Faut-il compter sur les réservations de dernière minute, quand les autres destinations afficheront complet ? S'interroge Makram Halloul, directeur commercial de l'hôtel Riadh Palm « La Tunisie restera une destination de repli qui se vend par le prix. Les T.O demanderont des réductions de prix et d'autres avantages: 14 pour 10, séjour gratuit des enfants...Les T.O voudront pousser les ventes sur la Tunisie, parce qu'ils espèrent réaliser des profits exceptionnels sur la dépréciation du dinar par rapport à l'€, au $; au £ et au FS. Faut-il les aider en les subventionnant sinon on risque de voir nos hôtels vides en été. Personnellement je suis pour la suppression de la taxe de 30dinars qui pénalise notre destination en cette période difficile. La remise sur orbite du secteur doit se faire à travers un regain de confiance chez les clients potentiels. Pour cela, il faudra miser sur la publicité, le recours au lobbying des amis de la Tunisie, les grandes manifestations, un intérêt plus accru au tourisme intérieur et au marché algérien » Mossaab Battikh, directeur général de Magic Hotels et Resort en Afrique du Nord estime que la Tunisie demeure très compétitive en Méditerranée. L'attentat du Bardo a fait chuter les réservations. Le marché français a été le plus affecté. Le marché anglais se maintient. Il faudrait maintenant se mobiliser pour l'été pour sauver la saison » Le déroulement probable de la saison La Tunisie est –elle capable de redresser la barre après quatre années très difficiles et surtout suite au coup du musée du Bardo ? Comment s'annonce le booking pour 2015 ? Selon Afif Kchouk : « Les flux touristiques et l'occupation hôtelière seront plus faibles que les mêmes périodes des années précédentes durant le 2ème trimestre (avril, mai, juin).Le début d'une vraie reprise se fera sentir dès la 3ème semaine du mois de juillet, à la fin du mois de Ramadan et avec les fêtes de l'Aïd. La 2ème quinzaine de juillet et tout le mois d'août connaitront une affluence record. Nous devrons compter sur les marchés locaux, algérien et libyen, au moins jusqu'à la fin du mois de juillet. Septembre et octobre enregistreront le retour à la normale de la majorité des marchés émetteurs européens et seront de bons mois. Novembre sera, comme d'habitude, faible. Décembre connaitra une relative reprise, grâce aux vacances scolaires et aux fêtes de fin d'année. »Faut-il baisser les prix pour mieux commercialiser le pays ? « Oui répond un agent de voyage d'Hammamet « ceci permettra de stimuler et maintenir la demande durant les deux prochains mois » Kamel Chakroun de la FRAV de Nabeul, explique que le client décide toujours en fonction des prix. Baisser le prix n'est pas toujours la bonne solution surtout que notre produit laisse à désirer! Slah Alouni de Sunny Hotels appelle à une mobilisation forte des professionnels « Arrêtons de paniquer et d'attiser la peur du touriste. Il faudrait dédramatiser et envoyer des messages rassurants aux TO. Ne touchez pas aux prix et boostons ensemble la destination » Habib Bouslama, hôtelier à Hammamet souligne que le secteur vit des moments difficiles « C'est un corps sans immunité. Il a besoin d'une vraie thérapie. Les TO sont conscients de nos faiblesses. Ils exigent une baisse des prix qui n'ont pas augmenté depuis 2002. Au contraire ils ont baissé en raison du glissement du dinar. Je le dis il n' ya aucune politique visionnaire ni une stratégie pour booster le secteur. Le seul espoir c'est d'appliquer la Stratégie du tourisme 2016 de Roland Berger déclinée selon 5 axes majeurs se rapportant à l'offre, au marketing, au cadre institutionnel, au contexte financier et au tourisme webcompatible. Peut-être, elle est une réponse à nos problèmes » Narjess Bouasker, hôtelière s'oppose au bradage des prix « C'est une pratique néfaste à notre secteur. D'ailleurs nos prix sont déjà bradés » dit-elle. Afif Kchouk intervient pour dire que la vente à perte est désormais considérée illégale, exposant le contrevenant à d'éventuelles sanctions ! Monji Barbouch, directeur de Leader Tours, estime que le tourisme tunisien manque de vision et de visibilité. Il se contente de pseudo stratégie « On se réunit pour ne rien dire enfin. Les solutions profondes et courageuses manquent. La situation est grave. L'Egypte a réussi à passer sa crise. Notre tourisme vit dans le provisoire qui dure et perdure. Le résultat, notre produit se vend à des prix cassés, dégriffés et bradés. Les TO dictent leur loi. Ils n'ont pas besoin de nous. Les hôteliers souffrent. L'open sky est peut être capable de réanimer ce secteur morose mais notre compagnie nationale ne veut pas qu'on touche à cette ouverture du ciel. Faouzi Mouelhi, Directeur Central du Produit à Tunisair estime qu'il faut considérer le transport aérien comme le levier de toute reprise et de tout développement touristique et veiller en conséquence à ce qu'il soit toujours disponible et au moindre coût. « Nous devrons dit-il soutenir financièrement les transporteurs aériens, les tours opérateurs et les brookers pour maintenir l'offre et éviter tout désengagement de la part des T.O sur la destination. » L'ouverture du ciel est-elle une opportunité pour renforcer les flux touristique en direction de la Tunisie ? « L'Open Sky est incontournable. C'est une solution gagnante et ne peut être que bénéfique pour le tourisme tunisien » précise Monji Gueddas Une stratégie de crise La régression des indicateurs touristiques (10.000 annulations selon les chiffres de l'ONTT), peut être rattrapée grâce au renforcement de la stratégie de communication « Il faudrait restaurer la confiance en la destination Tunisie et redonner goût au consommateur d'y aller. Anissa Ramoundi, chef de division chargée de la publicité et de l'édition et Riadh Dkhili, directeur des marchés touristiques ont essayé de présenter une stratégie de crise visant à booster l'activité touristique et qui consiste à faire un marketing de proximité, coordonner les actions de relance menées par les professionnels, l'Administration, les partenaires étrangers et les transporteurs aériens, exploiter le crowdsourcing par l'utilisation des réseaux sociaux, faire parler les touristes en train de passer des vacances en Tunisie, reprendre les tournées de « Road Show » et les opérations de prospection et de démarchage « porte à porte » des agences de voyages et aller vers le consommateur là où il se trouve. Deux millions de dinars ont été loués pour l'aérien par l'ONTT. Nous engageons le 11 avril nos campagnes d'affichage. Le marché algérien est porteur pour la Tunisie. D'ailleurs nous lançons un appel d'offres pour le lancement d'une agence de communication sur ce marché et aussi le marché local » Ridha Attia appelle à la révision du budget promotionnel et l'implication des professionnels « Au lieu d'investir dans les salons, il faudrait mieux soutenir l'aérien » avoue t-il . Afif Kchouk appelle à reprendre l'organisation de semaines gastronomiques et de journées culinaires et culturelles dans les différentes villes de provinces, communiquer -touristiquement-sur les différentes manifestations, festivals et évènements qui se déroulent en Tunisie, associer les professionnels du tourisme aux actions menées à l'étranger par le Cepex, la Fipa, le ministère de la Culture et demander aux entreprises étrangères implantées en Tunisie de communiquer sur leurs conditions de travail en Tunisie. Bref des idées pour remonter le moral et sortir de cette ambiance morose en attendant le déclic