Cette image sera automatiquement bloquée après qu'elle soit signalée par plusieurs personnes.
« La culture française est importante, car elle n'est pas que la culture d'un ancien colonisateur, c'est aussi une ouverture sur le monde, sur le futur... »
Editeur et membre fondateur de la Section tunisienne d'Amnesty International, Moncef Guellaty est l'auteur d'un livre sur la Révolution tunisienne, « 2011, un parfum de liberté » (Déméter), dont les neuf premiers chapitres ont été publiés en 2012, aux Editions Michel de Maule, Paris, dans la Collection, « Je me souviens », sous le titre : « Tunis, le pouvoir piégé par la toile ». Avec Déméter, il présente des livres, romans et autres qui ne laissent pas le public indifférent. Nous l'avons entretenu en marge de la Foire Internationale du Livre de Tunis pour nous parler des nouvelles parutions qui sont aussi disponibles dans les librairies de Tunis. Le Temps : Déméter a à son actif, une longue aventure qui a commencé depuis les années soixante-dix mais a aussi le mérite de se renouveler en fonction de ce qui bouge dans la société et dans la vie culturelle du pays. Pourriez-vous, nous brosser le chemin parcouru depuis ? Moncef Guellaty :la société Déméter a été créée en 1972 par Cérès Productions, dirigée à l'époque, par Mohamed Ben Smali, pour distribuer ce que proposait cette Maison d'édition. Sa mission était aussi de vendre des cartes postales et quelques livres touristiques comme, « Les bijoux de Tunisie », «Les cités antiques de Tunisie » ou « La peinture sous-verre »...L'activité était largement dirigée vers le secteur touristique. J'ai intégré la boîte en 1975 et on a continué sur cette lignée jusqu'à 1979, avec le recrutement de l'un des fondateurs du mouvement « Perspectives », (l'extrême gauche sous Bourguiba), Noureddine Ben Kheder, à sa sortie de prison. Un homme d'un haut niveau culture et intellectuel, et c'est à partir de ce moment, qu'a commencé notre aventure avec la jeune poésie tunisienne. *Justement, Déméter a contribué au lancement de la jeune poésie tunisienne en publiant au début des années quatre -vingt, Sghaier Ouled Ahmed, pour ne citer que ce poète. -Effectivement, outre Sghaier Ouled Ahmed, on a publié Mohamed Ghozzi, Moncef Louhaibi, Souf Abid, la Palestinienne Chérine, l'Egyptien Ahmed Fouèd Najm, auteur de « Mor Al Kalem » (les mots passent), le Soudanais Ahmed Hardellou. Un autre nom, le poète suédois Söstrend, traduit en arabe par Mohamed Ghozzi et quelques textes en prose signés, Hichem Karoui, Talal Hammad et Ridha Kéfi, auteur de « N » (Noune ). Depuis janvier 2011, l'auteur tunisien a changé en fonction de l'actualité et des événements et nous avons eu droit à une autre veine d'écriture. Chedly Klibi nous propose « Radioscopie d'un règne », (un livre sur Bourguiba), Jacqueline Daoud, « Entretien avec Wassila », (le manuscrit qui date de 1972, est resté 40 ans dans les tiroirs), et Emna Belhaj Yahia, « Questions à mon pays »... *Vous participez à la foire du livre sur le Stand Nirvana, avec « Un siècle de céramique d'art en Tunisie » d'Awlèd Chemla, paru au mois de novembre 2015. Un événement de taille qui sera suivi d'autres manifestations au Palais Abdellya à la Marsa, à l'occasion du mois du patrimoine, (18 avril-18 mai 2016). -La céramique chez les Chemla est une histoire de famille mais c'est aussi en pointillé, une partie de l'histoire de la Tunisie. Cet ouvrage illustre et retrace l'histoire d'un riche artisanat tunisien et d'une famille, celle de Jacob Chemla qui fonda en 1881, une entreprise tunisienne juive, engagée dans la production de céramique d'art ; activité qui était exclusivement exercée par les musulmans depuis le Moyen âge. Le mérite d'Awlèd Chemla réside dans le fait qu'ils aient retrouvé le bleu stannifère et à cette époque, on a commencé à restaurer les céramiques du musée du Bardo, la mosquée du barbier, Sidi Sahbi à Kairouan, etc... Deux dates importantes à retenir, celle du 15 avril avec la tenue au Palais Abdellya, d'une exposition de carreaux répétitifs, de panneaux décoratifs et d'objets tournés, sans oublier la conférence que donnera à cette occasion, Abdelaziz Daoulatli, à propos du Palais Abdellya. Et puis, celle du 20 avril, à partir de 18H00, intitulée « L'artisanat tunisien, le cas Chemla », par Lucette Valensi, (fille de Mouche Chemla), historienne, spécialiste de l'islam méditerranéen et sa sœur, Monique Goffard, chercheur en Science de l'Education. * Parmi les titres phares aussi, vous présentez deux romans d'illustres auteurs tunisiens, Fawzia Zouari, écrivaine et journaliste vivant à Paris et Fawzi Mellah, écrivain et journaliste, vivant à Genève. Pourrait-on avoir une idée sur leurs nouveaux livres ? -Je dirai que les deux romans, « Le corps de ma mère » de Fawzia Zouari et « Ya Khil Salem » de Fawzi Melleh s'inscrivent dans la même lignée éditoriale qui est double ; la qualité littéraire et l'éclairage sur la société tunisienne, le monde rural, plus précisément. Dans « Le corps de ma mère », on rentre dans l'interdit ; une espèce d'affrontement entre deux générations que tout sépare mais que l'amour rapproche. Ce roman vient de paraître aussi en France, dans une édition dont Déméter a vendu les droits à Joëlle Losfeld- Gallimard. Dans « Ya Khil Salem », c'est l'affrontement entre le traditionnel et le traditionnaliste. Le titre est celui d'une chanson de Saliha (1914-1958), artiste tunisienne mythique qui a toujours été à travers ses chansons, attachée à son terroir et à ses origines bédouines. *La France est l'invitée d'honneur de la 32ème édition de la Foire Internationale du Livre de Tunis où de nombreux auteurs sont invités, pourrait-on dire que les échanges dans le domaine de l'édition entre les deux pays, sont au beau fixe ? -C'est un acte d'échange de bons procédés ; l'année dernière, c'était l'Egypte et cette année, la France. D'ailleurs, la Tunisie sera aussi l'invitée d'honneur du prochain Salon du Livre de Genève qui se tiendra en ce mois d'avril. Déméter y fera partie et Fawzi Mellah, résident genevois, participera, je l'espère, à l'animation du Stand de la Tunisie. La culture française est importante car elle n'est pas que la culture d'un ancien colonisateur, c'est aussi une ouverture sur le monde, sur le futur, malgré ce que peuvent penser certains qui réduisent la Francophonie à la nostalgie de la colonisation. *Des projets pour la nouvelle rentrée éditoriale ? -On va essayer de mener à bout nos projets, non sans avoir insisté que tout est difficile. On parle souvent de la cherté du livre mais personne ne parle de la façon de faire un livre ni de ce que cela pourrait coûter, pour vous dire, qu'on va essayer de continuer avec la même veine ; qualité et apport pour la jeunesse tunisienne.