Le parti de Nidaa Tounès a mis un peu plus de deux ans entre sa création par Béji Caïd Essebsi et sa victoire aux élections législatives d'octobre 2014 et au scrutin présidentiel de décembre de la même année. Moins de deux ans plus tard, où se trouve t-il ? Ou plutôt, qu'en reste t-il ? La question est sérieusement posée avec des réponses à tendance pessimiste. Après avoir été amputé d'une vingtaine de ses députés au profit du parti de Mohsen Marzouk d'Al Horra, le parti a multiplié les crises. Et s'il n'a pas perdu de nouveaux élus, il a pris, à chaque fois, pour son grade. Mais en l'espace de la dernière semaine, uniquement, celui qui passe ou se croit être l'homme fort de Nidaa a subi, coup sur coup, deux revers qui lui enlèvent, selon les observateurs, tout avenir de leadership. En vérité, Hafedh Caïd Essebsi, puisque c'est de lui qu'il s'agit, n'a jamais su ou n'a jamais voulu savoir que ceux qui l'ont courtisé et le courtisent encore, ne l'ont jamais fait parce qu'il a le mérite ou la trempe d'être le chef et le leader, mais parce qu'il est le fils de Béji Caïd Essebsi, devenu, par-dessus le marché, président de la République. D'ailleurs, à bien passer en revue les divers épisodes du feuilletons de Nidaa, on s'aperçoit qu'en autant d'initiatives prises par Caïd Essebsi Junior, il en a récolté autant de déboires et de fiascos. D'ailleurs, si on se rappelle bien, cela avait commencé lors de la campagne électorale pour les législatives lorsqu'il avait voulu prendre la tête de liste de Tunis II. Un tollé général chez les Nidaïstes l'a contraint d'y renoncer afin de ne pas faire exploser le parti dans une phase aussi cruciale. Et à peine deux mois après la prise du pouvoir par Nidaa que HCE ouvrit les hostilités contre Mohsen Marzouk en qui il voyait un rival et un concurrent pouvant l'empêcher de se placer à la tête du parti. Et ce fut la cabale qui avait culminé avec la fameuse interview sur la chaîne de télévisions Nessma. Et là, on se rappelle sa fameuse accusation lancée contre le même Marzouk sur la foi d'un article paru sur un quotidien en langue arabe de la place. Une accusation de conspiration et de complot contre la patrie et contre le président de la République qui, sous d'autres cieux aurait valu des suites judiciaire à l'un des deux selon que les propos soient fondés ou non ! Puis la tension montait crescendo avec des déclarations, un Conseil national, des réunions à Djerba puis à Hammamet, émaillées toutes les deux de violences et d'agressions physiques. Le tout culminant avec le fameux congrès de Sousse auquel BCE avait largement contribué. Et là, on se rappelle que c'est Youssef Chahed dont on venait de découvrir l'existence au grand jour grâce à sa nomination par le président de la République en tant que président de la « fameuse» commission des 13 chargée de désamorcer la crise. Mais au lieu de résoudre le conflit, cette commission des 13 a conduit, illico presto vers le congrès de Sousse qui a tenté d'asseoir la mainmise de Hafedh Caïd Essebsi sur le parti. Ainsi, au lieu de résoudre la crise, Youssef Chahed avait conduit à la première grande fissure de fait au sein de Nidaa avec le départ de plus de vingt élus. Depuis, les divergences se sont multipliés avec des risques latents d'explosion jusqu'à l'avènement de l'épisode des journées parlementaires fixées, par un PV, pour les 24 et 25 septembre courant. Mais encore une fois, HCE s'en est mêlé par élus interposés pour faire avancer la tenue desdites journées et profiter de l'absence du chef du bloc, Sofiène Toubel parti effectuer le pèlerinage. Dans la même foulée, le même HCE a lancé sa fameuse proposition de placer Youssef Chahed à la tête du comité politique de Nidaa. Mais à force de vouloir tout obtenir à la fois, Hafedh Caïd semble avoir perdu, encore une fois, sur les deux fronts. D'un côté, les journées parlementaires on eu lieu les 24 et 25 de ce mois avec la reconduction de M. Toubel en tant chef du bloc et des membres de son équipe au sein des commissions. Et de l'autre, M. Chahed s'est vu opposer une fin de non recevoir de la part, non seulement des Nidaïstes, mais de la part de l'ensemble des politiciens. D'où son recul et sa déclaration, certes un peu floue, affirmant que l'action gouvernementale demeure sa priorité. D'ailleurs, juste après la réélection de Sofiène Toubel à la tête du bloc, l'élu Mahmoud Ismaïl a réitéré l'appel du parti au chef du gouvernement pour qu'il demeure à l'écart des tiraillements au sein du parti, tout en réaffirmant le soutien du bloc parlementaire au gouvernement d'union nationale, notamment, dans cette phase que traverse le pays. D'autre part, l'ancien chef du cabinet présidentiel, Ridha Belhaj, est revenu lors de son passage télévisé dimanche 25 septembre 2016, sur les polémiques au sein de Nidaa Tounes estimant que le fait que le fils de BCE soit au premier plan à Nidaa Tounes nuit considérablement à l'image du président de la République, au parti de Nidaa ainsi qu'au pays d'une manière plus globale, notamment, depuis la mise en place du gouvernement d'union nationale. « Il est tout à fait légitime que Hafedh Caïd Essebsi ait des ambitions politiques, toutefois, il peut attendre la tenue du congrès du parti, et s'il remporte les élections, tant mieux pour lui », a-t-il dit en substance. C'est dire que la situation actuelle à Nidaa se présente comme étant fort complexe. En effet, quelle autorité et quelle discipline aura le bloc de ce parti à l'ARP après la fissure de fait de ce dimanche ? Quelle attitude aura HCE après les camouflets subis au cours de la semaine passée ? Et puis, quelle image et quelle efficacité aura un parti, déjà diminué, dont le bloc est divisé en deux « sous-blocs » par la faute de HCE qui, devrait renoncer à tout leadership qui ne s'acquiert que par le biais de vrais partisans et non par d'éphémères courtisans.