La fabrication du tapis constitue un élément essentiel de la sauvegarde du patrimoine artisanal. Il demeure par ses couleurs, ses formes et sa géométrie un élément de décor, porteur d'une valeur authentique et occupe, depuis des siècles et jusqu'à l'heure actuelle, une place de choix dans les foyers, malgré les mutations sociales et le développement du mode de vie. Carrefour de civilisation et terre de rencontre, la Tunisie a été de tout temps réputée pour ses tissages. Les tapis traditionnels à points noués ou à bandes unies parallèles où se mêlent harmonieusement formes et couleurs, constituent actuellement une source d'inspiration aux créations artisanales modernes. Pour rendre au secteur du tapis ses titres de noblesse, une stratégie a été mise en place pour impulser la production locale à travers, notamment, l'organisation du «mois du tapis» durant le mois de décembre de chaque année. Aujourd'hui, le tissage du tapis est une activité qui a subi de profondes mutations au niveau de l'organisation du travail et des techniques de production. Les tapisseries et autres décorations murales sont fortement influencées par les tissages de Gafsa composés d'un nombre déterminé de motifs et couleurs vives.
Plusieurs mesures au profit du secteur du tapis Au cours de ces dernières années, de nouvelles approches ont été développées par l'Office National de l'Artisanat. Celles-ci ont permis de mettre en valeur la fabrication du tapis selon les spécificités de chaque région, notamment, en ce qui concerne les couleurs, les motifs et la matière. La fabrication du tapis a bénéficié, depuis le Changement, de plusieurs mesures et incitations dont la création de centres, voire de villages d'artisanat spécialisés à l'instar de ceux de Den-Den, du Kef et de Gafsa, en plus du renforcement des mécanismes de formation, d'investissement et de commercialisation du produit. Quant aux institutions publiques, elles ont été chargées de promouvoir le secteur du tapis et de mettre en place une exposition permanente du tapis au musée de la ville de Kairouan, outre la production de supports publicitaires en plusieurs langues sur le tapis. Ainsi, l'Etat a parié sur la promotion des produits de l'artisanat dans le but d'assurer à ce secteur l'efficience et la rentabilité requise, de l'adapter aux exigences du progrès et de l'imposer sur les marchés extérieurs.
«Tapis de Kairouan», le plus célèbre Le tapis de Kairouan, célèbre entre tous, est un tapis rustique en laine naturelle ou polychromie. Son aspect est fait d'une large bordure constituée de bandes parallèles où s'égrènent des motifs floraux stylisés géométriquement en laissant la place à un large champ central pourvu d'écoinçons aux angles et occupé en son milieu par un motif central en forme de losange. L'appellation d'origine «tapis de Kairouan» a été protégée. Ce tapis de référence a laissé libre cours à la créativité des artisanes pour élargir les bandes, affiner les contours d'un dessin, styliser une fleur, dédoubler un losange central ou semer le champ central de motifs divers. Dans la multitude de ses variétés, ce tapis fut imité dans plusieurs villes tunisiennes. Chaque région entretient la légende d'une initiatrice venue de Kairouan et qui en aurait introduit la technique. Les influences artisanales régionales, les croyances religieuses, les symboles prophylactiques, les emprunts aux décors de céramique ou de broderie ont façonné des styles éphémères ou vivaces au gré des besoins de la clientèle et des effets de mode.
La tapisserie de Gafsa et sa région Les tapis de Gafsa, tissés sur un métier vertical appartiennent à la catégorie des tapis «ras». La grande différence d'un point de vue du tissage se trouve entre le tapis à haute mèche, dit aussi à «point noué», et le tapis «ras», aussi appelé à «point tissé». Traditionnellement, les tissus étaient différenciés selon leur fonctionnalité: tapis de sol, couvertures, tapisserie murale ou habits traditionnels. Actuellement, suite à leur commercialisation, certains tissus perdent leur ancienne fonctionnalité pour devenir des éléments décoratifs. On peut citer, à titre d'exemple, «Ferrachya», «Holi», «Barkhnoug», «Battania», «Klim», «Mergoum»...
Le tapis de Jebeniana Jebeniana (Sud d'El Jem) est un village réputé pour le tissage de la Keseya. Il s'agit d'un tissage épais aux couleurs variées qui est entièrement décoré et principalement utilisé comme tenture d'apparat. Avec des couleurs chaudes, ce tissage crée une atmosphère d'intimité et de confort. Parmi ces tissages, figure la «mouchtia» qui est un châle de grande dimension. Son décor est composé de fines bandes de «regma» aux motifs très variés qui couvre entièrement la pièce.
«Le Gtif» - le seul tapis fabriqué par des hommes ou «ragama» «Le Gtif» ou tapis de laine est l'ancêtre du tapis, tissé par des hommes. Il est décoré en motifs géométriques, le plus souvent asymétriques, et à la forme d'un rectangle allongé, d'une épaisseur moelleuse et servait à la fois de matelas et de couverture. Les couleurs de base étaient le bleu profond, le vert clair et le rouge. C'était le tapis des grandes tribus nomades de la Tunisie.