La Chine a proposé ce samedi la création d'une « voie verte » destinée à faciliter et accélérer les procédures d'exportation de terres rares à destination de l'Union européenne, dans un contexte tendu de négociations commerciales entre Pékin et Bruxelles. Cette initiative survient alors que les discussions sur les prix planchers des voitures électriques chinoises exportées vers l'Europe approchent de leur conclusion. Selon un communiqué officiel publié sur le site du ministère chinois du Commerce, les entretiens ont eu lieu mardi à Paris entre le ministre chinois Wang Wentao et le commissaire européen au Commerce Maroš Šefčovič. Les deux parties y ont également abordé plusieurs dossiers sensibles, dont l'accès au marché chinois pour les spiritueux européens, en particulier le cognac français. Terres rares : levée partielle des tensions en vue ? Les terres rares, ces métaux essentiels à la fabrication de technologies de pointe (batteries, éoliennes, semi-conducteurs, équipements militaires...), sont depuis avril 2025 soumises à une autorisation préalable à l'exportation. Pékin contrôle plus de 60 % de leur extraction et 92 % de leur raffinage mondial, selon l'Agence internationale de l'énergie. Cette restriction imposée par la Chine a perturbé des chaînes d'approvisionnement mondiales entières, touchant directement les industriels européens de l'automobile, de l'aéronautique, des technologies vertes et de la défense. En proposant cette « voie verte », Pékin cherche à désamorcer les critiques européennes sur le caractère stratégique et potentiellement coercitif de ses mesures, tout en conservant un contrôle renforcé sur ses ressources. Véhicules électriques et spiritueux : la diplomatie commerciale en action Le second grand dossier en discussion est celui des véhicules électriques chinois, accusés de vente à perte sur le marché européen. Bruxelles a lancé une enquête anti-dumping en 2024 et menace d'imposer des droits de douane punitifs. La Chine, de son côté, demande un accord de prix minimum. D'après le ministère chinois du Commerce, les négociations sont « dans leur phase finale », mais nécessitent encore « des efforts de part et d'autre ». Un compromis éviterait une nouvelle escalade commerciale, alors que les constructeurs chinois comme BYD ou Nio s'implantent rapidement sur le continent. Autre avancée notable : les discussions sur les restrictions imposées au cognac français depuis 2024. Un accord de principe aurait été trouvé, selon la même source, avec une décision définitive attendue avant le 5 juillet. Une relance des relations en vue de la prochaine grande échéance Ces discussions interviennent en amont du prochain sommet UE-Chine prévu en juillet, marquant le 50e anniversaire des relations diplomatiques entre les deux partenaires. Cette échéance symbolique pourrait servir de levier pour relancer un dialogue stratégique aujourd'hui fragilisé par les tensions géopolitiques, les rivalités industrielles et la fragmentation des chaînes d'approvisionnement mondiales. Analyse stratégique et prospective : un tournant tactique dans la rivalité sino-européenne L'ouverture d'une « voie verte » pour les terres rares n'est pas une simple concession technique : c'est un signal politique majeur. En offrant un accès facilité à ces matériaux critiques tout en maintenant une architecture de contrôle, Pékin tente de regagner la confiance de Bruxelles sans affaiblir sa position stratégique. D'un point de vue géoéconomique, cette manœuvre s'inscrit dans une logique plus large : désamorcer les mesures protectionnistes européennes (comme les barrières contre les véhicules électriques chinois) tout en gardant un levier sur les ressources essentielles à la transition énergétique européenne. La Chine agit ici en stratège, anticipant la montée en puissance des politiques industrielles européennes axées sur la souveraineté technologique. En échangeant des compromis ciblés (sur le cognac, les exportations minières) contre un allègement des tensions sur ses exportations technologiques, elle protège ses champions industriels tout en desserrant l'étau réglementaire. Pour l'Union européenne, cette dynamique offre une fenêtre de négociation. Mais l'équilibre reste fragile : la dépendance à la Chine pour les chaînes de valeur critiques reste une vulnérabilité majeure. Dans cette configuration, la Tunisie pourrait jouer un rôle de plateforme alternative, notamment pour des activités de transformation ou d'assemblage à proximité du marché européen, à condition d'investir dans des partenariats ciblés et une infrastructure logistique adaptée. Ainsi, la rivalité sino-européenne entre dans une phase plus subtile : moins frontale, mais davantage marquée par des jeux d'influence sectoriels. La vigilance stratégique devient indispensable, pour l'Europe comme pour ses partenaires périphériques. Commentaires Que se passe-t-il en Tunisie? Nous expliquons sur notre chaîne YouTube . Abonnez-vous!