La descente aux enfers de Nida Tounes (NT) continue inexorablement de plus belle. Le parti est soumis à une érosion implacable de ses figures historiques et de ses plus crédibles cadres. Il est fragmenté en plusieurs agglomérats. Le père fondateur, Béji Caid Essebsi (BCE), président de la république, en assume la première responsabilité tant il rechigne de peser de tout son poids partisan et de son ascendant moral de père fondateur pour rectifier le tir et faire remonter la pente à sa formation politique. Sans aucune volonté de remettre de l'ordre et de frapper un assourdissant coup de poing sur la table, BCE regarde son fiston, à qui il en a confié la clé et le pouvoir par sa compromission et son silence, détruire l'œuvre politique de sa vie et mettre en otage sa marche, son agenda et son évolution. Hafedh Caid Essebsi (HCE), dépourvu d'idée et de programme, incapable de vision et de lucidité, élevant la magouille au rang de stratégie, il fait la pluie et le beau temps, il évince sans ménagement, il recrute à tour de bras, conclue des alliances suspectes et à contre-nature, tout amusé et non moins inconscient de casser le jouet que son père lui a légué. Il déploie le tapis rouge à Borhène Bsaies pour doter le parti d'une nouvelle ligne politique dont HBE n'est guère en mesure d'en tracer les axes. Il fait de Soufiène Toubal, un périlleux acrobate du RCD de sinistre mémoire, son premier lieutenant et son homme de main au sein de l'Assemblée des Représentants du peuple (ARP) comme dans le cœur du parti. HCE montre ses griffes misogynes en savourant que nombre de militantes, compzagnos de la première heure, de NT claquent la porte, alors que son père n'a pu investir Carthage que grâce au vote massif de la gente féminine. Dans les salons moelleux du palais présidentiel, le guide spirituel de NT s'en lave les mains, laissant à son rejeton l'illustre et l'obscur soin d'achever l'œuvre de casse que les choix politiques post-électoraux de BCE et de sa clique d'illuminés ont décrétés. Est-il fortuit que dès que HCE ait commencé à jouer avec le feu, aussitôt NT a entamé son autodestruction ?! Il est vrai que, comme à la guerre, tous les coups sont permis en politique. Sauf que le mobile premier des coups, en politique, c'est pour faire avancer ses pions et non pour aider à faire échec et mat à son roi ou sa reine. Les fous sont tout autant dans les victoires que dans les défaites dans l'échiquier politique. Tout compte fait, hormis un dernier noyau de fidèles parmi les mentors de NT, HCE a mis une masse critique à dos. Pratiquement, le consensus est fait contre lui. Il ne se rend pas compte que le passage de force qu'il a imposé au congrès de Sousse a mis le dernier clou dans le cercueil de NT. En est-il conscient ? De toute évidence non ! La barque prend l'eau de toute part et coule à grands pans, et lui est là, muet, sourd, figé dans son coin. Aucune sortie médiatique, aucun mot d'argumentation, rien de rien. Pas de sortie au public pour s'en expliquer, il compte peut-être sur Carthage pour le sortir de l'ornière et lui garder en entier son petit jouet. De toute évidence, sa volonté d'hégémonie n'a d'égale que sa force d'inertie ou de nuisance, il sera certainement ravi de commander sur des ruines et sur une armée d'hommes de paille! Hafedh Caid Essebsi (HCE) a eu l'insigne force d'écarter ses principaux rivaux et de mettre sous sa sombre coupe la principale œuvre de son paternel, à savoir le parti Nida Tounes (NT), un héritage que HBE a confisqué aux autres fondateurs, lui qui n'était venu au parti que sur le tard quand NT était devenu un cheval de bataille et non plus un tocard dans le bercail politique tunisien. En quelque sorte, une succession à l'envers qu'il a imposée sans que le géniteur ne remue un seul sourcil pour immuniser son parti contre les prédateurs aussi familiers qu'ils soient. Un parfait exemple d'autodestruction. Pire encore, aujourd'hui, HCE fait de NT, ou ce qui en reste, le porteur d'eau et l'artisan des basses manœuvres d'Ennahdha. Aux ordres, obéissant au doigt et à l'oeil, en service commandé, il ne conduit plus un parti, censé au départ être le pilier d'équilibre, mais un pédoncule d'Ennahdha. Qu'importe que NT implose dès lors que les deux vieux brisquards, en l'occurrence Béji Caid Essebsi et son compère Rached Ghannouchi, continuent leur lune de miel, après avoir convolé à Paris, et leur connivence tacite de faire couler NT pour qu'Ennahdha ait la main basse et la haute main sur le pouvoir et dissimule son hégémonie derrière un discours d'entente et de consensus national. Le père a instrumentalisé son rejeton pour que NT soit phagocyté et transformé en pantin d'Ennahdha, au service de agenda. Tout le monde sait que NT et Ennahdha seraient impliqués, jusqu'au cou, dans l'argent sale et entachés par les affaires de corruption. Les deux partis coordonnent pour se tirer d'affaires surtout que la campagne menée par Youssef Chahed risque de mettre à nu leur culpabilité. Sur ce dernier, ils exercent toutes les pressions pour sauver quelques têtes et tenter de s'en disculper. HBE en constitue le levier idoine pour en mener le subterfuge et plomber sinon couper les ailes du chef de gouvernement dans sa guerre déclarée contre la corruption. En conclusion, NT n'est pas seulement en crise, voué à un fracassant effondrement, il est à l'agonie, aux dernières onctions, il sursaute, il se découpe en morceaux pour espérer sauver son pronostic vital, il s'offre à Ennahdha pour survivre. Ce n'est plus un parti mais un faire-valoir, juste une orpheline carte dans une main de poker, un poker de bluff sur lequel Ennahdha ne s'aligne qu'en cas de possibilité de rafler la mise. Un jeu truqué où HCE brade les atouts de NT, à l'ombre de son nouveau maitre à penser, le gourou Rached Ghannouchi et avec la complaisance sinon la complicité de son père !