Ce jour du 25 juillet 2013 aurait dû être une célébration grandiose de la fête de la République, au moins pour envoyer un signal fort dans le sens de l'attachement inaliénable aux valeurs républicaines et à la civilité de l'Etat, dans le même attachement à notre identité et aux fondements pluriels de notre tunisianité. Malheureusement, au départ, nos gouvernants se sont obstinés à minimiser l'importance des fêtes nationales qui ont toujours des amers lumineux et salutaires nous évitant de sombrer dans les ténèbres de l'inconnu. De ce point de vue, le peuple a fêté la République, malgré et contre tous. Mais d'autres spectres de l'obscurité ont tenu à ternir la célébration en la souillant par le sang d'un citoyen militant dont le seul tort aura été de crier haut et fort ses opinions et sa pensée, contre le discours des gouvernants. Pendant que les musulmans en plein mois de ramadhan et au centre des prières qui devraient accompagner « Gazouat Badr », Mohamed Brahmi est tué de onze coups de feu, à sa sortie de chez lui, justement pour aller fêter la République. Le crime n'est pas sans nous rappeler celui perpétré contre feu Chokri Belaïd, au moindre détail près. Nous n'oserions accuser quiconque, sans preuves, mais les rapprochements qui s'imposent doivent être faits, pour une meilleure visibilité. Toutefois, au-delà de ce qui relève désormais du rôle de la justice, on ne peut s'empêcher de formuler l'espoir que la vérité finisse par être dévoilée et assez vite, à la fois pour rendre justice à Chokri Belaïd et à Mohamed Brahmi, mais aussi pour rendre justice à la justice comme valeur républicaine. Force est de reconnaître cependant que des gens de chez nous ne veulent pas reconnaître la république comme régime de gouvernement et la démocratie comme système de gouvernance. Ceux-là sont à bannir pour l'avenir de la Tunisie ne soit pas compromis. Ici, je ne peux que saluer l'analogie établie par le Secrétaire général de l'UGTT, Houcine Abassi, entre ces deux assassinats de 2013 et ceux perpétrés par la « Main Rouge », qui a liquidé physiquement et sauvagement le martyr Farhat Hached quand elle a vu venir de lui et de ses semblables le danger qui menaçait sa mainmise sur notre pays. Important aussi ce qu'il a souligné, en l'occurrence que depuis ces crimes colonialistes, c'est la première fois qu'on retombe dans le même cercle des représailles. Nous sommes donc aujourd'hui bel et bien en présence d'une nouvelle « main rouge », rouge du sang de nos concitoyens plutôt que des couleurs de notre drapeau, rouge du sang du crime et de la haine plutôt que du symbole de l'amour. De fait donc, au-delà des discours des uns et de ceux des autres, à tous les niveaux de la politique politicienne, la Tunisie a besoin d'intentions et d'actions sincères pour la sortir où certains la font traîner, poussant ainsi l'exaspération des concitoyens à son comble et conduisant nécessairement à une recrudescence de la violence. Pour l'essentiel, l'assassinat de Mohamed Brahmi est d'une certaine manière un début d'assassinat de la république, pour lequel certains ont longtemps appelés ; il revient à tous les Tunisiens maintenant de faire que, dans le sang des martyrs Mohamed Brahmi et Chokri Belaïd, comme dans le sang des militants qui ont amené l'indépendance, fait la république et construit l'Etat, de faire que la République tunisienne demeure dans toute sa splendeur, avec ses valeurs éternelles et grâce à ces valeurs inaliénables, contre tous les complots ourdis contre elle. Vive la Tunisie, vive la République.