L'accès à la propriété demeure le rêve de tout Tunisien, ce qui explique un taux d'appropriation de l'ordre de 77% dans notre pays dont la stratégie de développement, depuis des décennies, est d'offrir des logements adaptés aux différentes classes sociales, désireuses, dans leur diversité socioculturelle, d'ordre, de confort et de bien-être chez soi. Disons-le crûment, malgré la gueule de bois de certains promoteurs, les effets désastreux de la flambé des cours du pétrole et l'envol vertigineux des prix des matériaux de construction, l'euphorie immobilière, d'après M. Moncef Koôli, président de la Chambre des promoteurs immobiliers, se fera encore sentir, tout au long de l'année 2008, en raison des dernières mesures concernant les taux d'intérêt des crédits hypothécaires et l'étalage temporel de la période de remboursement.
Perspectives et opportunités
Globalement, la croissance des revenus, la valeur du logement comme actif de refuge et l'urbanisation galopante expliquent l'irrésistible montée du secteur du bâtiment dont le dynamisme, durant la dernière décade, a permis l'éradication progressive de l'habitat vétuste, l'émergence des résidences de standing et l'enracinement de la performance macroéconomique.
Selon les résultats du dernier recensement de la population, effectué par l'Institut National de Statistiques en 2004, le nombre de logements à la date de référence s'établissait à 2.500.830 contre 1.865.522 en 1994. Ce qui représente une moyenne de 63.531 nouvelles demeures par an. La Tunisie comptait, à l'époque, quelque 2,18% millions de ménages dont 40% de l'épargne est consacré à l'habitat, indicateur incontournable d'une visibilité sociale, porteuse de reconnaissance, de valorisation et de hiérarchisation.
Evolution des modes de vie oblige, les promoteurs ont dû s'adapter aux nouvelles attentes des classes moyennes tunisiennes en plein essor, aux impératifs d'un secteur alliant désormais prestations et fonctionnalité et aux techniques d'assistance administrative en vogue (accompagnement post-acquisition, syndic, gestion locative) dont le mérite est de professionnaliser davantage un marché en expansion, de promouvoir un contexte réglementé et de stimuler des stratégies commerciales à même de relever les défis futurs du bâtiment intelligent, aux bâtisses économes en énergie, en adéquation totale avec les nouvelles normes environnementales en cours dans le monde.
La monté de la demande et la politique volontariste de l'Etat ont incité les professionnels du secteur à plus de créativité, de fraîcheur et d'ingéniosité au niveau de l'offre en privilégiant des services à valeur ajoutée, des approches ciblées, capables de coller à l'euphorie immobilière en cours dans la banlieue Nord, la région du Lac sud et les cités périphériques d'El Nassr où la spirale haussière reflète des disparités sociales en gestation.
Eviter la saturation, enrayer la spéculation
L'évolution structurelle du marché, l'aspiration générale à la propriété et l'accès instantané aux produits financiers relatifs à l'habitat ont permis la floraison des promoteurs dont le nombre, d'après les statistiques du ministère de l'Equipement, de l'Habitat et de l'Aménagement du territoire, a grimpé de 827 en 2001 à plus de 1290 fin 2006 avec seulement 200 à 300 en activité permanente.
Certains ont atteint la vitesse de croisière en adoptant les labels hautes performances tout en fidélisant une clientèle en quête de plus-values et de gains de valeur ; d'autres s'ingénient à redéfinir leurs concepts opératoires pour parvenir à maîtriser les coûts évolutifs des cadres bâtis, à fluidifier les rapports avec les autorités de tutelle (municipalités, ministère de l'Equipement ) et à éviter au marché les affres de la spéculation et de la saturation.
«La rareté des terrains, le renchérissement des coûts des matériaux de construction et la spéculation ambiante expliquent la bulle immobilière actuelle», nous dit un membre de la Chambre des promoteurs qui met l'accent sur les taux d'intérêt très élevés des prêts bancaires (8,70%), les frais d'enregistrement exorbitants et les prix de la charge foncière. Il s'agit là d'une tendance haussière favorisant la flambée du marché, mettant les acteurs du secteur à la merci des événements conjoncturels puisque la Tunisie, pays ouvert et de plus en plus intégré dans le circuit international des échanges, demeure dépendant de l'évolution mondiale des cours des matières premières.
Un second souffle
L'Etat tunisien a mené, des années durant, une stratégie visant la propriété du logement au plus grand nombre de citoyens. La mise en place d'un système de financement diversifié et complémentaire, l'accélération des opérations d'immatriculation et les premières opérations de titrisation constituent de réelles avancées susceptibles de propulser l'habitat, de le crédibiliser auprès des structures d'intermédiation donnant ainsi un signal fort au marché financier boursier, outil de capitalisation et levier de croissance pour les entreprises et les sociétés immobilières, soucieuses d'approches globales et intégrées de la performance.
Aujourd'hui, les opérateurs, il y va de leur survie, rivalisent d'ardeur pour commercialiser leurs produits dans un pays, devenu l'eldorado des étrangers qui lorgnent de plus en plus l'immobilier en Tunisie dont les prix quoiqu'en hausse continue, restent incomparables avec d'autres destinations de la rive nord de la Méditerranée.