Des voix d'experts se sont élevées, à Tunis, à l'occasion du 20ème anniversaire de l'Union du Maghreb Arabe, pour réinventer le projet de Marrakech sur de nouvelles bases, qui, après une vingtaine d'années de sa fondation, n'arrive pas s'affirmer en tant qu'espace crédible ni sur la scène régionale ni sur la scène internationale. Les experts, qui s'exprimaient dans le cadre d'un débat organisé par l'Association des Etudes Internationales sur le Maghreb Arabe, 20 ans après : réalités et perspectives (vendredi 20 février 2009 à Tunis), ont proposé des pistes pour débloquer le processus d'édification de l'Union. Ils proposent trois pistes. La première consiste en la convocation d'un deuxième sommet ''Marrakech II'' pour la mise en avant, dorénavant, de la dimension économique de l'Union et la concentration des efforts communautaires sur la réciprocité des intérêts économiques. La deuxième privilégie la complémentarité bilatérale : l'Algérie et la Libye, qui engrangent d'importantes réserves de matières premières peuvent s'associer pour développer des synergies partenariales fructueuses. La Tunisie et le Maroc, champions dans le domaine des services peuvent faire autant. La Mauritanie, handicapée par son positionnement géographique (un peu en retrait au sud), est tout simplement occultée par ces experts. La troisième piste est le moins qu'on puisse dire «idéaliste». Elle propose la prise en charge de la complémentarité économique de la région maghrébine par les jeunes promoteurs maghrébins qui, après avoir fait des études ensemble à l'étranger, seraient plus motivés que leurs aînés à travailler ensemble. Ces experts n'apportent en fait rien de nouveau. Ils relayent ainsi les propositions formulées, en novembre dernier, par le directeur général du Fonds monétaire international, Dominique Strauss-Kahn. Interpellé sur l'intégration économique maghrébine que le Fonds soutient fermement, il a plaidé pour une entrée en fonction, dans les meilleurs délais, de la Banque maghrébine d'investissement et de commerce extérieur (BMICE) et pour la réalisation, par des privés, de grands projets d'infrastructure fédérateurs. Il avait alors recommandé aux Maghrébins de transcender les problèmes politiques qui entravent l'édification de l'UMA, de suivre l'exemple de l'Union européenne qui groupe des pays réputés pour leurs hostilités ancestrales, de «faire avancer l'intégration économique comme s'il n'y avait pas de problèmes politiques». Le directeur général du FMI avait évoqué, à ce sujet, l'avancement du processus de rapprochement entre la Tunisie et la Libye et la nécessité de progresser davantage sur cette voie à l'échelle maghrébine, ce qui constitue la meilleure protection contre les effets des crises extérieures. Par delà ces propositions, fussent-elles constructives, le projet de l'UMA demeure, au regard des réalisations, et de ce qui reste à faire, un projet ennuyeux qui n'a jamais fait rêver les Maghrébins. Il reflète, de manière scandaleuse, la mauvaise qualité de l'homme maghrébin et le retard qu'il accuse par rapport aux autres communautés régionales qui sont parvenues à se regrouper, à travailler en équipe, à créer de la richesse et à mieux négocier leurs intérêts avec les autres regroupements. Au niveau des réalisations, les rares officiels qui croient encore à l'UMA avancent, beaucoup plus à des fins de propagande, la mise en place des institutions de l'UMA et la conclusion de pas moins de 37 accords et conventions. De véritables professions de foi qui n'ont jamais aidé la région à concrétiser l'intégration souhaitée dans le cadre d'une zone de libre-échange pour un marché commun potentiel de 90 millions de consommateurs. Au chapitre des résultats négatifs, à signaler le gel des sommets arabes depuis 1994, le non-maghreb qui coûte aux pays de la région deux points de croissance par an et le retard qu'accuse la mise en service de la Banque maghrébine pour l'investissement et le commerce extérieure (BMICE) dont le siège est à Tunis. A signaler également et surtout : la modestie du volume des échanges intermaghrébins. Les pays de la région, qui effectuent 80% de leurs échanges avec l'Union européenne, n'échangent entre eux que 3%, un taux bien loin des ambitions médiatisées. Sans commentaire